GIEC & urgence climatique : le reporting environnemental serait-il la clé ?

Comment l'entreprise peut-elle s'engager aujourd'hui dans une démarche drastique de réduction de ses GES face à l'urgence climatique ? Le reporting environnemental pourrait en être la clé...

Depuis la sortie du 2ème rapport du GIEC (AR6) qui décrit les impacts du changement climatique, il n’y a plus l’ombre d’un doute sur l’ampleur de ses conséquences. Le nouveau rapport du GIEC est sans appel : 3,3 milliards d’êtres humains sont exposés au changement climatique,

L’entreprise, qui occupe une place centrale de régulateur dans l’économie mondiale, a une responsabilité non négligeable sur le changement climatique. Aujourd’hui, on sait que 100 entreprises du secteur des énergies fossiles sont responsables de 71% des émissions mondiales de CO2 (The Carbon Majors Database - Carbon Disclosure Project, 2017). Il est évident qu’elles sont la clé de voûte d’un éventuel respect des accords de Paris. Sans elles, nous ne parviendrons pas à contenir le réchauffement global “bien en dessous de 2 degrés” comme le mentionne ces accords.

Mais comment l’entreprise peut-elle s’engager aujourd’hui dans une démarche drastique de réduction de GES face à l’urgence climatique rappelée encore une fois dans ce nouveau rapport du GIEC ?

Je mesure donc je sais : le reporting environnemental

La première étape de toute démarche de réduction est bien entendu la mesure. Ce n’est qu’avec une première mesure que l’on peut commencer à aborder le sujet de la réduction.

La méthodologie bilan carbone® est un excellent outil qui permet d’établir une cartographie de ses GES. Elle se préoccupe des émissions directes (via l’énergie consommée pour chauffer les bureaux par exemple) et indirectes d’une entreprise (tout le reste qui est nécessaire à l’activité).

Toute une économie s’est récemment créée autour de ces calculs de bilan carbone. Il n’est plus très compliqué de le faire réaliser pour son entreprise.

Néanmoins, cette méthode souffre d’une lacune centrale: ses calculs se basent souvent sur une approche monétaire macro. Vous consommez donc X Kg de CO2e à chaque euro dépensé dans le produit ou service concerné (banque, assurance, transport, etc…). On appelle cela un facteur d’émission monétaire.

Or, ces facteurs ne permettent pas à une entreprise de rentrer dans le détail de ses émissions, notamment lorsqu’elles concernent le cœur de l’activité.

  • L’analyse du cycle de vie des produits & services

Si la méthodologie bilan carbone souffre aujourd’hui d’une lacune, il faut y remédier en demandant aux entreprises de prendre leur responsabilité.

Chaque entreprise vendant un produit ou service devrait délivrer le facteur d’émission associé. Ainsi, le bilan carbone d’une entreprise pourrait se calculer au fil de l’eau, à chaque achat réalisé. Le niveau de granularité des bilans carbone serait autrement plus fin et les décisions prises pour réduire les émissions seraient plus pertinentes.

  • Les outils digitaux comme clé de voute de cette démarche

La clé de cette démarche, c'est le reporting environnemental généralisé. Dit simplement, le reporting environnemental généralisé doit mesurer la totalité des GES émis par un produit ou un service et le rendre disponible aux clients. Véritable outil d'aide à la décision, il doit devenir, au même titre que le prix, un critère d'achat.

La révolution digitale nous aura permis de développer des systèmes d'informations capables de gérer des quantités de données substantielles. BIG data, machine learning et IA sont une aubaine pour analyser rapidement des systèmes complexes. Il faut maintenant les utiliser pour se projeter dans un monde moins carboné. 

Après la mesure, la réduction

Une fois l’impact connu, il reste à savoir quelle référence prendre pour le réduire.

Le problème majeur des reporting environnementaux est qu'ils n'étudient la réduction que d'un point de vue absolue. Bien que nécessaire, cette approche auto-centrée passe à côté de l'essentiel.

L’approche relative revient à la notion essentielle de l’usage. On se pose la question “à usage égal” afin de pouvoir mesurer de manière relative.

D’où l’importance de comparer ses actions à la moyenne de la catégorie de mon produit ou service, à usage équivalent. Comment se positionne ma société de vente d'électricité par rapport à l’énergie vendue en France par exemple ?

Ici encore, la clé, c'est la donnée. Analyser en masse les données disponibles sur vos secteurs d'activité sera la première étape avant de pouvoir juger vos produits et services.

Vers une obligation légale : le reporting environnemental généralisé

La responsabilité des entreprises dans le changement climatique n’est plus un débat. Pour limiter le réchauffement climatique et éviter ses conséquences catastrophiques que nous rappelle le rapport du GIEC, il faut imposer aux entreprises le reporting environnemental de leurs produits et services. De plus, cela permettrait d’augmenter le volume de données disponibles sur les bases de données de facteur d’émissions publiques comme la base carbone® de l’ADEME.

Ce changement de paradigme pourra conduire à des changements de business model, notamment par l’approche de réduction relative qui créera un avantage concurrentiel à être en dessous de la moyenne. 

En somme, utiliser la dynamique concurrentielle du marché pour accélérer la transition écologique me paraît être beaucoup plus sain pour notre monde que de l’utiliser pour maximiser les profits.