Quatre questions sur l'arrêt de Google Analytics

Amplitude revient sur les principales interrogations des professionnels quant à la fin annoncée de Google Universal Analytics et la migration vers Google Analytics 4.

En mars dernier, Google bouleversait le monde du web en annonçant la fin de Google Universal Analytics dès juillet 2023, encourageant ses utilisateurs à faire la bascule vers Google Analytics 4. Or, avec plus de 70 % de parts de marché, Universal Analytics est la plateforme gratuite d’analyse web et de publicité la plus utilisée au monde. Sa suppression provoque un séisme et suscite de nombreuses questions chez les professionnels. Quelles sont les caractéristiques de cette nouvelle version ? Que peut-elle apporter de plus ou de moins aux marketeurs ? Comment envisager la migration ? Tour d'horizon des enjeux de cette adoption. 

Pourquoi Google passe-t-il à Google Analytics 4 ? 

L'industrie de l'analytique a connu de nombreux changements ces dernières années, marquée notamment par un phénomène de convergence de l'environnement du web et le domaine des applications. Au cours des précédentes décennies, les entreprises s’appuyaient sur des outils distincts pour l'analyse marketing (marketing analytics) - plus souvent appelée web analytics, experience analytics et product analytics. Avec l’essor des applications web monopages (SPA) et des parcours multi-plateformes, le modèle d’analyse web traditionnel, qui repose principalement sur les sessions de suivi et les pages vues, n’est plus adapté aux besoins du métier. Bien que ces indicateurs restent utiles, la plupart des fournisseurs de solution d’analyse numérique ont peu à peu migré vers un modèle de données basé sur les événements. 

De son côté, Google a acquis en 2014 la plateforme de développement d'applications web et mobiles Firebase, afin de proposer aux utilisateurs d’Universal Analytics des capacités d’analyse basées sur les données d’événements grâce à la propriété Apps + Web. Pour les spécialistes du marketing et les développeurs, la transition vers GA4 n’est donc pas une surprise totale, mais la suite logique d’Apps + Web, marquant l’évolution de l’analyse digitale vers une logique utilisateur centrée sur le comportement des clients. 

GA4, une réponse aux enjeux de confidentialité des données ? 

Les utilisateurs exigent de plus en plus de transparence et de contrôle sur leurs données personnelles, et notamment sur leur utilisation à des fins de personnalisation publicitaire. Or, Google Analytics a souvent été pointé du doigt en raison de sa non-conformité avec les règles de protection des données personnelles et notamment le RGPD (Règlement Général sur la Protection des Données). GA4 vient solutionner le problème grâce à l’anonymisation des adresses IP et en limitant la conservation des données à 14 mois maximum. Ainsi, il n’est plus possible de faire le lien entre les données récoltées et l’identité des utilisateurs, à condition de désactiver l’option de partage des données dans les paramétrages. Toutefois, après la mise en demeure de plusieurs organisations par la CNIL en février dernier, en raison du transfert de données vers les États-Unis - interdit par le RGPD - des inquiétudes légitimes demeurent quant à l’utilisation de certaines fonctionnalités spécifiques de Google Analytics. 

C’est notamment le cas de Google Signals, qui est une fonction proposée par Google pour Analytics, afin d’identifier les visiteurs anonymes et enrichir les données. Pour ce faire, Google Signals exploite d'autres produits Google (Chrome et Gmail, par exemple) avec la fonctionnalité de personnalisation des annonces. Ainsi, la solution permet de tirer parti du réseau publicitaire de Google pour effectuer un suivi multi-appareils des utilisateurs, ajouter des informations démographiques comme l'âge, le sexe et les points d’intérêts publicitaires, et les partager anonymement avec Google Analytics. Désormais, Signals peut être désactivé par les administrateurs dans Google Analytics, mais la plupart des organisations qui utilisent la plateforme l'ont activé et très peu d'utilisateurs de Google savent comment désactiver la personnalisation des annonces dans leur compte. Bien que l'utilisation de Signals soit actuellement autorisée dans le RGPD, si toutes les exigences de consentement sont respectées, le scénario dans lequel l'Union européenne contraindrait Google à supprimer cette fonctionnalité ou à la rendre « opt-in », semble de plus en plus envisageable. Le cas échéant, Google Analytics perdrait en valeur ajoutée, notamment sur le plan de l'enrichissement des données et donc de la connaissance de l’utilisateur. 

Faut-il dire adieu à ses données historiques ?

Même si Google Analytics reste disponible jusqu’en juillet 2023, les entreprises doivent élaborer dès à présent leur stratégie de migration vers GA4. Une démarche qui peut s’avérer complexe, dans la mesure où GA4 repose sur une architecture de données totalement différente de celle de Google Analytics. Ainsi, la migration peut nécessiter autant de temps et de ressources que le passage à une toute nouvelle solution d’analyse. Par ailleurs, le niveau de difficulté dépend des cas d’utilisation, dont certains impliquent des étapes spécifiques, comme le suivi e-commerce, et présentent encore quelques problèmes de compatibilité. Pour les entreprises ayant un usage avancé de Google Analytics, le changement implique logiquement davantage de parties prenantes et nécessite un plan structuré. Cela passe notamment par un audit des rapports existants et une évaluation des besoins de chaque équipe, qui permettront de choisir les solutions technologiques les plus adaptées et de définir un budget et un calendrier précis. Comme tout changement technologique majeur, cette échéance donne aussi l’occasion de dresser un état des lieux de sa stratégie d’analyse digitale afin de déterminer la configuration optimale pour renforcer la compétitivité et la croissance.

Mais l’une des principales préoccupations des utilisateurs concerne le risque de perte des données historiques. Ces derniers pourront continuer de collecter et d’utiliser de nouvelles données dans Google Universal Analytics pendant encore moins d’un an, et les conserver pendant six mois après l’arrêt de la solution. Ainsi, de nombreuses organisations craignent de ne plus pouvoir utiliser leurs données historiques. Mais elles doivent avant tout s’interroger sur leur réelle utilité et à quel point leur business en dépend. S’il existe une réelle fascination pour les données historiques, dans la réalité, peu d’entreprises les mettent réellement à contribution. Celles pour qui c’est le cas possèdent déjà en général des solutions in-house pour les stocker ou ont d’ores et déjà mis en place des moyens externes pour les entreposer. Toutefois, il est essentiel de configurer les propriétés clés dans GA4 le plus tôt possible afin de disposer d’un arriéré de données suffisant et limiter les pertes au moment du basculement. 

Qu’en est-il de la qualité et de la gouvernance des données ?

La plupart des utilisateurs actuels de Google Analytics gèrent sa mise en œuvre à partir de Google Sheets qui répertorie leur taxonomie de données. Mais dans un contexte où l'analyse basée sur les événements devient la référence, cela peut poser des problèmes de gouvernance des données. Aujourd'hui, les entreprises ont besoin d'une confiance totale dans les données qu'elles utilisent et activent pour les applications en aval. Les événements doivent être planifiés, instrumentés, validés, organisés, transformés et observés au fil du temps pour générer des informations de haute qualité conduisant à une prise de décision plus intelligente et plus rapide. 

Les plateformes d'analyse basées sur les événements, nécessitent des investissements importants en matière de gestion des données, mais s’avèrent bien plus puissantes et efficaces en matière de suivi et d’analyse des comportements des clients. Sans excellents outils de gouvernance, les taux d’adoption moindres dus au manque de fiabilité des données et les efforts de ré instrumentation peuvent vite devenir élevés. C’est l’une des principales raisons pour lesquelles les stratégies d’analytique échouent. Ainsi, les utilisateurs de GA4 et de GA360 sont impatients de pouvoir bénéficier de fonctionnalités telles que la planification intégrée du suivi, l'observabilité pour la validation des événements, une expérience « developer-first » avec par exemple l’intégration de Jira et SDK et des capacités de transformation des données plus solides.