Signature électronique : tendances du marché pour 2021
Signaturit, Septeo, AR24, Arkhineo… les opérations se multiplient sur le segment de la signature électronique. Que se passe-t-il ? Quid de l'évolution pour les mois à venir ?
Hypercroissance du marché de la signature électronique
La crise du Covid et les entraves aux déplacements professionnels et aux rencontres physiques qu’elle a entraînées ont provoqué une explosion de la demande pour la signature électronique. Les entreprises de toute taille ont ainsi pu découvrir les bénéfices de la digitalisation complète de leurs transactions professionnelles : gains de temps, économies à tous les étages et impact écologique immédiat et mesurable.
Le marché de la signature électronique a ainsi augmenté d’au moins 25% (selon Forrester) en quelques semaines (+53% chez DocuSign sur le 3ème trimestre).
Dans le même temps, la crise et la baisse continue des taux d’intérêts ont conduit à une abondance de capitaux à investir, alors que dans le même temps la visibilité était très faible sur les performances futures dans la plupart des secteurs économiques. Ces capitaux ont donc cherché à s’investir dans les secteurs épargnés, voire favorisés, par le contexte actuel.
Cela se traduit par une forte augmentation de la valorisation des entreprises de la tech, des GAFA à AirBnb, qui pourtant durement touché par la crise dans son activité a vu le cours de son action flamber de +150% le jour de son introduction en bourse début décembre. Le leader du secteur de la signature électronique, l’Américain DocuSign, a ainsi vu son cours de bourse tripler - avec un pic à +276% - depuis le 13 mars 2020, tout en accusant une perte d’exploitation de près de 50 millions de dollars sur 3 mois.
Les grandes manoeuvres
Dans ce contexte, les opérations capitalistiques des acteurs du secteur se sont brusquement accélérées.
Les fonds d’investissement en quête de croissance se sont jetés avec appétit sur les acteurs matures ou en fin de cycle comme l’Espagnol Signaturit, dans lequel le fonds de Private Equity Providence Equity Partners vient de prendre la majorité ou les acteurs plus généralistes profitant de la vague vers la digitalisation des transactions, tels que le Français Septeo, spécialiste des logiciels métier repris par le fonds Hg Capital en novembre.
Dans le même temps, les “pure players” du secteur anticipent dans une consolidation sur un marché européen très fragmenté, comptant de nombreuses pépites qui doivent s’organiser pour faire face au géant américain DocuSign, et luttent pour y prendre une place de leader.
C’est ainsi que l’on a vu Docaposte, la filiale numérique du groupe La Poste, racheter coup sur coup le spécialiste des courriers recommandés électroniques français AR24 et son compatriote Arkhineo, ex-filiale de la Caisse des Dépôts spécialisée dans l’archivage légal de documents électroniques, dont l’un des principaux clients est justement DocuSign. Docaposte a également repris via sa filiale Certinomis l’activité historique de certification qualifiée de celui-ci en septembre. On notera aussi le rachat en 2019 par Atos d’Idnomic, qui n’est autre que la branche PKI d’OpenTrust, scindée en 2015 lors de la cession de son activité de certification et de signature électronique à DocuSign, tentative du géant US de s’adapter à un cadre juridique européen exigeant et bien peu familier.
Ce dernier n’est pas en reste et poursuit sa stratégie d’extension dans les services à destination des directions juridiques en amont et en aval de la signature du contrat, avec le rachat de son compatriote Seal Software en février 2020 pour 188 millions de dollars, après SpringCM en 2018 pour 220 millions de dollars.
La troisième catégorie de prédateurs dans cette consolidation est constituée des spécialistes du partage et de la sécurisation de documents électroniques qui souhaitent étendre leur offre en y ajoutant des capacités de signature électronique. Adobe et Citrix ont largement anticipé ce mouvement en rachetant respectivement EchoSign et RightSignature il y a plusieurs années déjà. Dropbox a relancé le mouvement en rachetant HelloSign en 2019, distançant son concurrent Box pour 230 millions de dollars.
Tendance : vers les transactions digitales intégrées
Cette frénésie s’inscrit dans une tendance de fond vers les transactions digitales intégrées (Embedded Digital Transactions ou eDTM), pour répondre au besoin des entreprises de rapprocher le plus possible le service de transactions à valeur légale de leur métier, de leurs données et des outils qu’ils utilisent pour les gérer. Hors fonds d’investissement, tous les acteurs prenant part à ces opérations de rapprochement le font dans ce but d’intégration des précieuses transactions digitales à valeur juridique dans les plateformes d’information et les outils métier de leurs clients, mis à part DocuSign qui tente de faire émerger une nouvelle catégorie à part entière qui lui serait dévolue.
On peut donc s’attendre à une poursuite de ce mouvement en 2021 et à une intégration verticale de plus en plus poussée des transactions digitales dans les outils logiciels et cloud, leur conférant ainsi une place centrale dans le quotidien de millions d’utilisateurs et permettant l’automatisation et l’accélération de leur activité professionnelle, et un renforcement de la sécurité de ces transactions à forte valeur ajoutée qui se font de plus en plus sous forme dématérialisée. Rendez-vous en 2022.