Richard Strul (Resoneo) "Dans le SEO, certains clients de Resoneo ont souhaité augmenter la cadence pendant la crise"

Le JDN poursuit sa série d'interviews de dirigeants face au coronavirus. Le patron de l'agence de SEO et SEA Resoneo revient sur le maintien ou non de ses activités et du secteur marketing.

JDN. Quelles sont les conséquences de la crise pour le business chez Resoneo ?

Richard Strul est le fondateur et président de Resoneo. © Resoneo

Richard Strul. Entre le 15 mars et le 15 avril, nous avons réalisé un chiffre d'affaires global de 50% inférieur à la période précédente. Mais ce chiffre cache des réalités différentes selon les verticales. C'est surtout dans le référencement payant, c'est-à-dire les annonces sur Google, Bing ou Facebook, où les deux tiers des campagnes ont été arrêtées du jour au lendemain, que ces pertes ont eu lieu. Et parmi ces clients-là, nous avons vu plusieurs cas de figure : il y a ceux dont l'activité locale s'est arrêtée et a pu être basculée au moins en partie sur le web, ceux qui commencent à relancer leur activité après quatre à cinq semaines d'arrêt, ceux qui ont dû stopper leurs campagnes car ils proposaient un service en drive déjà saturé, ou encore les retailers qui ont pu tirer profit de la situation parce que leur offre correspondait exactement aux nouveaux usages.

Comment a évolué votre activité sur le référencement naturel ?

Le SEO et le Web Analytics, n'ont connu qu'une légère baisse d'activité. Certains clients ont même souhaité augmenter la cadence pendant la crise. Ils ont considéré que c'était le bon moment pour investir sur un canal efficace sur le long terme, car leurs concurrents ont relâché la pression en ce moment et qu'avec la suspension des campagnes payantes, il y a plus de place en haut des SERP. D'autres ont décidé de profiter de cette période pour mener des travaux de long terme. Bien sûr, tout n'est pas rose non plus, quelques missions ont été repoussées car les salariés en chômage technique étaient trop nombreux. Mais d'une façon générale, pour nous, cette activité s'est inscrite dans la continuité et nos conseillers dans cette branche ont gardé leur charge de travail habituelle.

Est-ce que cette crise peut impacter directement ou indirectement l'existence de Resoneo ?

En tant qu'agence de taille moyenne, nous avons moins de frais que les grosses agences, et plus de trésorerie que les petites, ce qui nous donne une bonne capacité de résilience en période de crise et la possibilité de nous ajuster très vite à un nouveau contexte. Pour que nous soyons en réelle difficulté, il faudrait que plusieurs gros clients fassent faillite en même temps. Donc même si je préfère rester humble sur ce sujet, je suis optimiste. Nous savons que beaucoup de nos clients vont traverser une période difficile, mais nous avons déjà survécu à celle de 2008. Nous avons toujours manœuvré avec prudence et jusqu'à présent cela nous a réussi.

Est-ce que vos clients sont inquiets pour leur avenir ?

Certains vont être très impactés. Alors oui, ils sont inquiets. De notre côté, nous faisons le maximum pour rester en contact avec eux et les accompagner au mieux. Pour les clients qui tirent leur épingle du jeu et dépensent 1,5 fois leur budget habituel en ads, il faut gérer avec finesse ces investissements. Parmi eux, il y a des pure players spécialisés dans le textile. Pour eux, réussir ces campagnes est presque une question de survie. Par ailleurs, les usages évoluent : beaucoup de personnes entre 50 et 60 ans font maintenant leurs courses en ligne, alors qu'ils pensaient que c'était trop compliqué ou contraignant pour eux. Le monde du digital va sans doute beaucoup évoluer suite à cette crise et nous voulons aider nos clients à prendre au mieux le tournant.

Quelles modifications a entraîné cette crise dans le fonctionnement de l'agence ?

Nous avons dû passer en chômage partiel les collaborateurs dont le portefeuille de clients en médias payants s'était effondré. Cela nous a pris du temps car nous avons calculé le pourcentage de chômage de chacun en fonction de sa baisse d'activité réelle particulière. Pour la majorité des salariés, dont l'activité était maintenue, nous sommes passés en télétravail dans les jours qui ont précédé le confinement. Nous avons la chance dans les métiers du digital, de pouvoir passer tout le monde en télétravail facilement et rapidement. Et nous essayons de promouvoir des activités à distance entre les collaborateurs pour maintenir les liens. Dernièrement, nous avons mis en place un orchestre en visioconférence. Par ailleurs, nous n'avons coupé aucun budget sur les projets de R&D et nous avons continué les recrutements. Nous avons accueilli de nouveaux collaborateurs qui avaient signé avant le confinement et validé un nouveau candidat après des entretiens en visioconférence. Enfin, la crise nous a permis de systématiser la signature électronique de contrat.

Ingénieur de formation, Richard Strul a passé 15 ans dans le marketing de l'information financière (Reuters, Dow Jones) avant de plonger dans le web en 1992. Il a ainsi participé successivement à la création de deux start-ups dans les arts graphiques et l'e-learning avant de rejoindre Zebank, alors premier portail de banque en ligne. Il a ensuite piloté le digital de EGG en France puis fondé le cabinet indépendant de conseil en stratégie et en marketing digital Resoneo en 2004.

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