Philippe Bernard (GFI Informatique) : "Nous avons su mettre en place une méthodologie de reprise de projet"

Contrat de services, offshore, centres de compétences... le directeur marketing a répondu aux questions des lecteurs sur les tendances de la prestation de services IT.

Quelle est la stratégie de développement de GFI Informatique en termes métiers ?

Le groupe GFI décline son offre, selon trois axes : l'axe Offres stratégiques, l'axe Offre Industrialisation et l'axe Métier. L'axe Métier est primordial pour nous, puisque permettant une proximité intellectuelle avec nos clients, en adressant leurs enjeux et non pas des compétences techniques. Le Groupe dispose d'experts métier dans divers grands domaines (se traduisant par des livres blancs) comme le monde du secteur public, les télécoms, la banque, les assurances et enfin la grande distribution. Pour chaque métier, nous avons des experts non informaticiens intervenant en amont auprès des directions fonctionnelles de nos clients.

Et à l'international, quelle est votre stratégie ?

Le groupe réalise environ un tiers de son chiffre d'affaires à l'international. La stratégie géographique est d'abord de se renforcer dans les pays ou nous sommes présents (péninsule Ibérique, Italie, Canada, Maroc essentiellement). La stratégie Offre est de se focaliser sur les segments porteurs par marché. A titre d'exemple, des investissements significatifs sont réalisés pour adresser le marché allemand et atteindre une taille critique autour de l'expertise ERP SAP. On notera aussi l'expertise Monétique au Canada, l'expertise Sécurité en Espagne et enfin la plate-forme offshore au Maroc.

Vous aviez envisagé un rapprochement avec Bull. Mais avez-vous une stratégie de croissance externe ?

Notre plan stratégique 2007-2010 vise une croissance au-delà du marché, à parts égales entre la croissance organique et la croissance externe. C'est ce que nous avons fait sur 2007, avec une croissance supérieure au marché apportant environ 6% de croissance organique (pour un total de 11%). On notera l'acquisition du groupe BTD fin 2007 qui a apporté 600 collaborateurs à fortes compétences sur des sujets comme la gestion de la performance ou les SIRH. Nous avons divers dossiers à l'étude pour continuer à réussir notre plan stratégique sur 2008, comme nous l'avons fait sur 2007.

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"Nous savons gagner des contrats globaux comme encore récemment sur un grand du monde bancaire" © Cécile Genest / Benchmark Group

Les contrats d'externalisation globale, c'est complètement terminé ou pas ?

Le groupe dispose d'une équipe Infrastructures et Production de plus de 1200 personnes en France. A ce titre, nous savons gagner des contrats globaux comme encore récemment sur un grand du monde bancaire. A notre niveau, nous notons en effet que nos clients cherchent moins une externalisation totale du SI qu'un accompagnement avec engagement et véritable SLA [ndlr Service level Agreement ou engagement de qualité de service). Cela dit, nous sommes en négociation avec un acteur important du monde mutualiste pour une reprise du SI, avec volet social. Nous ne dirions donc pas que cela est totalement terminé, mais que le marché attend plus de valeur ajoutée via des SLA.

Quelle est votre position sur la reprise de projet par le client ? Avez-vous une démarche de documentation et d'accompagnement pour faciliter la démarche ?

Nous faisons souvent face à cette demande. En restant réaliste, nous avons su mettre en place une méthodologie de reprise de projet (au-delà d'un PRA ou d'une clause de réversibilité). Mais cela implique un travail de partenariat entre le client et nous. C'est la condition sine qua non de la réussite. GFI ne sait pas assumer la mauvaise relation d'un client avec un fournisseur donné. GFI peut, dans une relation apaisée, échanger avec un client pour faire la part des choses dans les dérives d'un projet donné et voir ce qui est réaliste de ce qui ne l'est pas.

Je suis DSI d'une société industrielle de 2 500 salariés, et je me demande ce que peut m'apporter un prestataire informatique généraliste comme vous ?

La réponse pourrait être longue... Disons que sur le plan métier, GFI dispose d'un centre d'expertise sur l'informatique Industrielle. Cela nous permet de mieux comprendre les spécificités de ce monde (équipe basée à Grenoble, environ 100 personnes).

Petite question : votre statut d'éditeur joue-t-il dans les appels d'offres ?

Oui, notre statut d'éditeur prend du sens dans les appels d'offres du monde public. Il est évident que nous ne nous positionnons pas à la fois en assistance à maîtrise d'ouvrage et à maîtrise d'œuvre. Dans certains cas, c'est le monde du service que nous mettons en avant et notre métier d'intégrateur prime dans notre réponse. Dans d'autres cas, c'est le métier d'éditeur (100 millions d'euros de chiffre d'affaires, 700 personnes) qui nous positionne en amont et permet d'apporter le plus de valeur ajoutée à nos clients.

Je ne savais pas que vous étiez éditeur. Quelle est votre offre logicielle ?

Nous sommes le sixième éditeur français de logiciels en 2007 (source PAC). Nous sommes deuxième (derrière un certain Microsoft) dans le monde public, en particulier dans les collectivités locales et territoriales. Notre offre se simplifie en trois cibles: les collectivités locales avec la famille Astre (budget, comptabilité, RH, action sociale), les établissements publics nationaux (budget essentiellement). Et enfin la gestion des temps et la planification, avec une solution coleader du marché (20 millions d'euros environ en 2007).

Nos références sont très nombreuses (confère notre site Internet), mais dans collectivité locales on pourra citer environ 80% des 20 plus grandes villes de France. Côté établissements publics nationaux, on peut citer de nombreux hôpitaux, ou des musées (Branly, le Louvre, etc.) ou mais également l'ANPE, le CNED, l'ENA, etc. Côté gestion des temps, on pourra citer le groupe BNP, ou la Mairie de Paris (avec plusieurs dizaines de milliers d'utilisateurs) ou Castorama, etc.

Quels sont les types de contrat de service que vous négociez en général ?

Nous intervenons historiquement en assistance technique en régie. Depuis nos chiffres 2007, notre chiffre d'affaires se fait majoritairement en engagements (forfait, projets dans des centres de services, SLA de divers niveaux). A titre d'exemple, nous avons fin 2007 plus de 800 personnes en centre de services (back office) générant environ 100 millions d'euros de chiffre d'affaires.

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"Nous disposons de divers niveaux de SLA, en particulier dans les engagements de maintenance correctrice ou évolutive" © Cécile Genest / Benchmark Group

Nous disposons de divers niveaux de SLA, en particulier dans les engagements de maintenance correctrice ou évolutive. GFI est capable de s'engager non seulement sur un temps de réponse mais aussi sur des temps de mise en place de workaround dans des contrats globaux sur des systèmes d'information en production. A titre d'exemple, nous avons des plates-formes de help desk dans notre centre de services national (200 personnes, 2 bâtiments de plus de 2000 m2) en production pour un très grand nom de la grande distribution ou un très grand nom du monde des transport en France.

J'ai l'impression qu'on parle moins de l'offshore. Quelle est la tendance ? Les responsables informatiques sont-ils vraiment preneurs de ce type de prestation ?

L'offshore est maintenant une réalité et plus un effet de mode. L'évolution des salaires et la continuité de la pression sur les prix rendent le modèle économique viable. Cela dit, il faut savoir tenir compte des surcoûts engendrés par cette démarche, surtout en méthodologie et spécifications. Certains secteurs verticaux sont très avancés dans ce domaine en France (industrie, télécoms, etc.), d'autres moins (comme la banque). Les DSI sont certes preneurs, mais de plus en plus avisés de certains dérapages. Ils savent ne pas simplement regarder un TJM attractif et comprennent la réalité du prix in fine.

La différence de langue et la culture est-elle problématique ?

La différence de langue est simple à appréhender. C'est un surcoût connu et donc maîtrisable. La différence de culture reste problématique car souvent irrationnelle. Plusieurs méthodes existent pour pallier cet inconvénient. Le plus évident est de faire un centre offshore dans un monde à la culture proche du donneur d'ordre. C'est ce que GFI a fait avec le Maroc.

Comment se structure votre activité offshore. Etes-vous présents dans plusieurs pays ?

Oui. Nous sommes présents pour l'instant sur 3 pays. Pour la France, nous privilégions le Maroc, ou nous avons un centre de services offshore (CSO) qui atteindra 210 personnes fin 2008. Avec des compétences J2EE et mainframe. En Espagne, nous avons un CSO sur le monde J2EE. Et au Portugal, nous avons un CSO qui adresse le monde Microsoft.

Quelles sont les spécialités de vos centres de compétences ?

Nous disposons d'une douzaine de centres de compétences, qui sont la résultante de notre capacité à capitaliser sur nos expérience technique. Les plus conséquents sont les CC eBusiness, CC Business Intelligence, et CC SAP. Nous avons aussi des centres de compétences (CC) sur Citrix et la virtualisation, sur EDI, sur la mobilité, sur les systèmes d'information géographiques, etc. Enfin, nous avons renforcé récemment notre CC Open Source pour répondre aux attentes fortes de nos clients.
Pour disposer d'un CC, nous veillons à mettre en place une équipe autonome avec des forces techniques, mais aussi avant ventes.

Le CC est un fournisseur de services pour les agences de GFI. Le CC utilise ses compétences sur un domaine propre pour aider l'agence a apporter la meilleure solution a nos clients, dans un modèle économique valorisant l'expertise technique du CC et la relation commerciale (et métier) de l'agence.

Vos centres de services sont-ils spécialisés ?

Oui, nous avons plusieurs niveaux de centres de services (CS). Les CSR (régionaux) au nombre de 3 (Paris, Lyon et Nantes), centrés sur les études, adressent les projets en fonction de leur taille. Les CSR production (également des centres de traitement) adressent les besoins en fonction des plates-formes techniques (Lyon, Sophia Antipolis et Nantes).

Enfin, nous disposons d'un centres de services national (CSN) à Lille pour tous les projets ayant une partie back office (supérieure a 200 000 euros) et même structure pour les projets production avec un CSN production à Nantes. In fine, nous utilisons aussi nos CSO en fonction des contraintes tarifaires du projet et de notre plan de charge.

Etes-vous certifié ISO ?

Bien entendu, le groupe GFI vient d'avoir la reconduction de sa certification ISO 9001 (version 2000) en janvier 2008. Plus de 100 personnes ont été interviewées et nous sommes fiers de dire que nous avons eu le renouvellement de la certification sans même aucune remarque.

Mais mettez-vous en œuvre des démarches de type ITIL par exemple ?

Bien entendu. Les 1200 collaborateurs de la branche Infrastructures et Production utilisent tous les jours la démarche ITIL dans leur projet (ainsi que nos collaborateurs en TMA sur certaines parties comme le help desk). Nous avons en France presque 300 chefs de projet ou directeurs de projets qui sont certifiés ITIL.

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"Nous ne voyons pas objectivement de projets majeurs en ERP ou BI qui aboutissent en Open Source" © Cécile Genest / Benchmark Group

Que pensez-vous de la concentration du marché des ERP, est-elle bonne ou mauvaise ?

Je ne suis pas Normand, mais je dirais qu'il y a du bon et du mauvais. La partie positive reste l'apport de diverses fonctionnalités (en particulier par les améliorations de R&D) des gros acteurs aux moyens financiers considérables. La partie négative est sans aucun doute le flou dans lequel se trouve la base installée de certains acteurs dont la feuille de route n'est pas évidente.

Espérons que cela sera plus clair dans quelque temps, tant sur le créneau des entreprises de taille moyenne que sur celui des grands comptes. Dans tous les cas, disons que le monde du service des ERP est très porteur (et pas simplement pour des migrations). Chez GFI, nous nous concentrons sur la valeur ajoutée apportée par l'ERP plus que sur l'impérieuse migration prônée par tel ou tel éditeur.

Que pensez-vous de la concentration dans la BI ?

Selon nous, il restera à terme 3 acteurs dans le monde de la Business Intelligence (SAP, Microsoft et Oracle). Comme pour les ERP, cela rend certains positionnements de système d'information peu évidents, et cela d'autant plus que l'Open Source dans ce domaine n'a pas encore percé. GFI a très tôt mis en place des compétences fortes sur ces acteurs forts. Au-delà de la partie avale en BI, nous nous positionnons plus en amont sur le management de la performance (Balance Scorecards, KPI, etc.) afin d'apporter le plus de valeur ajoutée. En ce sens la concentration ne nous gêne pas. Mais il faut bien in fine choisir un produit a implémenter !

Vous êtes positionné dans l'intégration de systèmes (ERP, BI...). Que pensez-vous de la multiplication des offres Open Source dans ces domaines ?

Nous ne voyons pas objectivement de projets majeurs en ERP ou BI qui aboutissent en Open Source. Certes, il y a des proof of concept, et en particulier en BI, nous avons une équipe spécialisée la dessus. La raison est peut être à chercher dans la faible maturité des offres, mais aussi et surtout dans la culture de nos DSI qui acceptent le monde Open Source en développement, mais peut être moins sur des sujets moins techniques et plus fonctionnels. Soulignons pour la BI que la consolidation forte du marché est de nature, à notre avis, à relancer l'Open Source dans ce domaine.

Vous recrutez en 2008 ? Si oui, quels profils ?

Nous avons recruté 1 100 personnes en CDI en France en 2007, et avons un objectif de 1 500 personnes pour 2008. Nous recrutons majoritairement des jeunes diplômés (30% de nos recrutements) et des jeunes ingénieurs avec 2 à 4 ans d'expérience (30% aussi). On soulignera notre forte présence en province (50% de nos effectifs, sur 6000 CDI en France environ).


Philippe Bernard est directeur marketing, communication et partenaires du groupe GFI Informatique