Julien Decot (Directeur de la stratégie de Skype) : "Nous comptons développer nos revenus publicitaires"

Cinq ans après sa création, Skype est le plus populaire des logiciels de VoIP. Son directeur de la stratégie fait le bilan de l'activité de cette filiale d'eBay et évoque son futur : les PME, le mobile et la publicité.

Où en est Skype aujourd'hui ?

Skype comptait à la fin du dernier trimestre près de 340 millions d'utilisateurs, c'est-à-dire d'internautes ayant ouvert un compte, mais qui ne sont plus toujours actifs. Mais je ne peux pas donner le chiffre de nombres actifs dans le monde. Notre croissance reste très bonne avec 30 millions de nouveaux comptes par trimestre. Skype c'est 10 milliards de minutes de communications gratuites et 6 % des communications longues distances dans le monde. Nous avons réalisés 381 millions de dollars de chiffre d'affaires l'année dernière et nous avons améliorés nos revenus de 50 % sur le premier semestre. Pas mal pour une start-up d'à peine 5 ans.

Comment se répartissent vos revenus ?

La grande majorité (je ne peux malheureusement pas dire combien exactement) proviennent des revenus d'interconnexions des opérateurs et nos services payants. Nous avons aussi d'autres activités, à la marge, comme la distribution de la barre d'outils de Google, par exemple, mais qui pèsent très peu dans notre chiffre d'affaires

Pensez-vous avoir fait la preuve de la pertinence de votre modèle économique ?

Notre modèle est bien plus robuste que ce que l'on nous prédisait. L'interconnexion entre opérateurs n'est pas devenue gratuite. Et même si les prix ont baissé, la marge y est toujours positive. Par ailleurs, nous continuons de développer nos services payants. Nous avons encore beaucoup de choses à faire dans ce domaine, notamment dans le mobile et le monde des PME.

A quoi pensez-vous ?

Su le mobile, nous sommes présents à travers trois plates-formes : Windows Mobile, sur laquelle nous comptons 7 millions d'abonnés, un client Java est disponible dans une quinzaine de pays, et à travers un partenariat avec Hutchison dans sept pays, dont le Royaume-Uni, l'Italie et Hong-Kong, où Skype est installé sur ses mobiles 3G. Et nous comptons encore développer notre présence.

En ce qui concerne les PME, un tiers de nos utilisateurs utilisent Skype dans le cadre de leur travail. Pour mieux répondre à leurs besoins, nous travaillons actuellement à la création d'une offre entreprise. Nos cible typique sera une start-up de 15 personnes situées dans des lieux différents, et qui auront besoin de se téléphoner, tchater, faire de la visioconférence, ou s'échanger de gros fichier en situation de mobilité.

En début d'année le nouveau patron d'eBay, John Donahoe, disait se donner un an pour réfléchir à une éventuelle cession de Skype. Dans quelle situation êtes-vous aujourd'hui ?

Tout ce que je peux vous dire est que Skype est la filiale d'eBay qui connaît la plus forte croissance en termes de chiffre d'affaires. Le soutien d'eBay en termes de financement est sans faille, et beaucoup de ses employés nous rejoignent. J'ai d'ailleurs moi même fait ce chemin. Skype a été critiqué pour le peu de synergies créées avec eBay et Paypal. Mais il y en a plus qu'on ne le croit.

Quelles sont elles ?

Les boutons Skype ont été intégrés sur des sites d'eBay dans le monde permettant aux acheteurs et aux vendeurs de rentrer en contact entre eux. Cette option a certes connue un succès mitigé, mais elle marche très bien pour certaines catégories. On réfléchit par ailleurs à ce que Skype pourrait apporter à un site de petites annonces comme Kijiji, une autre filiale d'eBay. Quant à Paypal, la synergie est évidente. Il nous permet de simplifier la vie à n'importe qui dans le monde qui cherche à acheter un crédit de quelques euros sur Skype. Et ça, c'est fondamental.

Comptez-vous développer la publicité sur Skype ?

Oui, nous avons plusieurs projets dans ce domaine qui ne tarderont pas à voir le jour. Nous comptons les tester, chacun dans un ou plusieurs pays, puis généraliser rapidement celui qui nous donnera le plus de satisfaction. Donc oui, la publicité est une source de revenus potentielle. Mais nous sommes très sourcilleux de l'expérience utilisateurs sur Skype. Aussi nous n'envisageons la publicité qu'en cas de proposition de valeur pour nos clients.

C'est-à-dire ?

Je ne peux pas vous fournir de détails de ce que nous allons proposer. Mais pour vous illustrer l'état d'esprit dans lequel nous travaillons, je peux citer cet exemple de services de renseignements téléphoniques aux Etats-Unis. Une personne appelle parce qu'elle veut se faire livrer une pizza à domicile. Et le service de renseignement lui donne alors le numéro de la société qui a payé le plus cher pour être promue par ce service.

Inversement, nous ne ferons pas de publicité audio avant une communication, ce qui dérangerait nos utilisateurs. Nous avons beaucoup étudié ce modèle, et ça n'a marché nulle part dans le monde.