La crise va-t-elle faire rétrécir les produits en supermarché ?

La crise va-t-elle faire rétrécir les produits en supermarché ? La taille des conditionnements de produits de grande consommation progresse depuis 10 ans. Mais cela pourrait changer.

Une bouteille de jus de fruits de deux litres, des boîtes de 36 œufs ou des tablettes de chocolats vendues par dix : ce genre de conditionnement est aujourd'hui courant dans les rayons. Depuis 10 ans, on assiste même à une inflation de la taille des packagings. Entre 2002 et 2012, 60% des produits courants ont vu leur taille progresser, rapporte une étude SymphonyIRI, qui a passé au crible 170 catégories. Les couches pour bébé, par exemple, sont aujourd'hui achetées en moyenne par 53 unités, contre 34 unités il y a 10 ans, soit une hausse de format de presque 34% . La hausse est de 11,7% pour le fromage à pâte pressée (beaufort ou comté par exemple) ou de 10,9% pour le jus de fruits.

Or, la taille des foyers ne cesse de diminuer : de 2,57 personnes en 1970, elle est tombée à 2,3 aujourd'hui. Comment explique ce paradoxe ? "Les gros conditionnements reviennent moins cher rapportés au volume", selon Jacques Dupré, directeur Insight chez SymphonyIRI. Une stratégie des marques pour inciter à consommer plus ou pour fidéliser la clientèle. "Si un client achète 18 rouleaux de papier WC de ma marque plutôt que deux paquets de 9, je suis sûre qu'il n'ira pas se réapprovisionner chez un concurrent", décrypte Jacques Dupré. Une tendance favorisée encore par les multiples promotions de type "Un offert pour deux achetés".

La demande provient également du consommateur : "Les gens considèrent de plus en plus les courses comme une corvée", observe Jacques Dupré. Des grosses courses deux fois par mois évitent de multiplier les visites à l'hypermarché.

 
Evolution de la taille moyenne des achats
Produit Taille moyenne en 2012 Evolution 2002-2012 Evolution janv-août 2012
Source : SymphonyIRI
Couches culotte 53,02 unités +33,9% -1,3%
Confiseries de chocolat 0,29 kg +32,2% +3,4%
Fromage à pâte pressée cuite 0,24 kg +11,7% +1,1%
Jus de fruits 1,34 litre +10,9% -0,1%
Papier toilette 11,02 rouleaux +10,7% -1,9%
Whisky 0,86 litre +9,4% -0,7%
Café 0,44 kg +8,8% +1,6%
Colas 2,28 litres +8,8% -0,8%
Fromage frais 0,69 kg +5,9% -0,3%
Viennoiserie industrielle 0,45 kg +5,6% +0,4%
Tablettes de chocolat 0,21 kg +2,4% -0,7%
Beurre 0,28 kg +1,9% +0,2%
Oeufs 10,02 unités +1,2% +0,5%
Huile 1,05 litre -1,1% +1,1%
Champagne 0,77 litre -1,5% -0,6%
Yaourts 0,93 kg -2,4% +0,1%
Jambon cuit 0,20 kg -4,9% +0,4%
Desserts frais 0,49 kg -5,8% +0,7%

Depuis le début de l'année, pourtant, la course aux volumes semble marquer un sérieux coup d'arrêt, notamment sur les produits les plus chers. Sur les huit premiers mois de 2012, l'augmentation des formats n'est plus constatée que pour 37% des produits dont la valeur faciale dépasse les 4 euros, d'après SymphonyIRI.

Un produit deux fois plus petit coûte en moyenne 30% de plus au volume

La hausse des prix et la crise amènent en effet les fabricants à revoir leur stratégie. Le patron d'Unilever a ainsi fait sensation en septembre en déclarant que "la pauvreté revenait en Europe". "Si un consommateur en Espagne ne dépense que 17 euros pour faire ses courses, je ne me vois pas lui en demander la moitié pour acheter de la poudre à laver", ajoutait-il. Au rayon alcools et sodas, les nouvelles taxes ont aussi fait leur effet : l'inflation, qui s'élève par exemple à 7,7% sur les whiskies depuis le début 2012, a amené une baisse moyenne du volume par acte d'achat de 0,7%.

A court terme, la stratégie permet d'enrayer la chute des ventes. Mais le consommateur n'est pas dupe et n'oublie pas de regarder les prix au kilo ou au litre. Or, un produit dont le format est deux fois plus petit sera vendu en moyenne 30% de plus au volume, a calculé SymphonyIRI.