Engager le désendettement compétitif au service de la croissance économique de la France
Ce désendettement doit être compétitif, en améliorant fortement la compétitivité-prix des entreprises et de notre économie, à travers une fiscalisation des pans de la protection sociale qui ne relèvent pas de la logique assurantielle mais plutôt de la solidarité nationale.
Notre
conviction est que la croissance, qui est un enjeu déterminant pour la
France, ne sera solide et durable que si elle est tirée par les
investissements
des entreprises. Or l’endettement actuel de la France constitue un
fardeau qui réduit inexorablement les marges de manœuvre des entreprises
et la compétitivité de la France, en raison des sommes croissantes
consacrées au paiement de la dette : en 2012, le
montant du seul paiement des intérêts de la dette s’élèvera à 50
milliards d’euros, un montant qui est équivalent à la quasi-totalité de la recette de l’impôt sur le revenu et supérieur au total de l’impôt sur
les sociétés.
Pour
retrouver des marges de manœuvre et stimuler la croissance, le
désendettement de la France est indispensable. Il doit également être
compétitif,
en améliorant fortement la compétitivité-prix des entreprises et de
notre économie, à travers une fiscalisation des pans de la protection
sociale qui ne relèvent pas de la logique assurantielle mais relèvent de
la solidarité nationale.
Pour
mettre en œuvre le désendettement de la France, nous proposons de poser
d’ores et déjà les jalons d’un objectif zéro déficit à l’horizon 2015
et de construire une trajectoire budgétaire excédentaire à partir de
2016.
Nous
espérons l’adoption rapide d’une « règle d’or » budgétaire dans la
Constitution. Le Medef faisait déjà cette proposition il y a 5 ans.
Aujourd’hui,
cette discipline est reconnue comme nécessaire et porteuse d’efficacité
économique par tous les États européens.
Dans cette « règle d’or », il
conviendrait d’étendre à l’État la mesure qui s’applique déjà aux
collectivités territoriales, de non recours à l’endettement
pour financer les dépenses courantes. Tous les acteurs publics seront
sollicités.
Afin
que notre désendettement soit compétitif, nous préconisons que l’effort
porte pour deux tiers sur des réductions de dépenses publiques et un
tiers sur des hausses de recettes sociales et fiscales qui ne
pénalisent pas la compétitivité et l’emploi.
L’Etat
a déjà engagé un effort important de maîtrise de la dépense publique.
Selon nos hypothèses, un effort additionnel entre 50 et 75 milliards
d’euros devrait être engagé sur 4 ans, pour atteindre le zéro déficit
fin 2015. Cela exige d’engager une réforme de l’assurance-maladie, de
réduire les dépenses de fonctionnement de l’Etat et d’étendre aux
collectivités locales l’effort engagé par l’Etat au
travers de la révision générale des politiques publiques (RGPP).
L’ensemble de ces réformes doit s’accompagner d’un développement des
délégations de service public et des partenariats public-privé (PPP).
Parallèlement,
nous proposons de mieux distinguer les prélèvements qui relèvent d’une
logique assurantielle, pesant sur les seuls travailleurs et
les entreprises, et ceux qui relèvent d’une logique de solidarité via
la fiscalité, dans un contexte où il faut alléger considérablement le
coût du travail en France pour redresser notre compétitivité.
La
France a fait le choix de maintenir un niveau élevé de taxation des
facteurs de production et de réduire les prélèvements obligatoires assis
sur la consommation. L’imposition de la consommation a diminué en
France sur les dix dernières années alors que c’est la tendance inverse
qui est à l’œuvre en Allemagne et dans les autres pays de l’Union
européenne.
Depuis
2000, nos coûts de production ne cessent de se dégrader, en particulier
par rapport à l’Allemagne. Alors qu’en 2000, le coût horaire du travail
en France était inférieur de 8 % à celui de l’Allemagne, il le dépasse
aujourd’hui de plus de 13 %, selon Eurostat. Sur la période 2000-2008,
les charges annexes – dont les cotisations sociales patronales
constituent la part la plus importante – ont augmenté
de 39 % en France contre seulement 2 % en Allemagne.
Cette
détérioration de la compétitivité-coût associée aux différences
structurelles de compétitivité hors-prix explique la moindre performance
de la France lors de la dernière décennie, notamment en matière
de commerce extérieur, ce qui a culminé à un déficit du commerce
extérieur de 70 milliards d’euros en 2011.Une amélioration de la
compétitivité-coût est critique pour permettre aux entreprises de
retrouver une capacité d’investir et d’innover afin de renforcer
également la compétitivité hors prix.
Une
distinction plus claire entre solidarité et assurance entraînerait un
basculement du financement d’un certains nombres de dépenses sociales
vers la consommation et la fiscalité. Cette distinction conduirait
ainsi à transférer le montant des cotisations de la branche famille, une
partie des cotisations de la branche maladie et une partie des
cotisations de la branche retraite vers la CSG et la
TVA. En France, la branche famille est actuellement financée à 65 % par
les entreprises tandis qu’en Allemagne ces dépenses relèvent du budget
de l’État et sont intégralement fiscalisées. Un transfert intégral des
cotisations sociales liées à la famille vers
l’impôt semble donc justifié. Quant à la branche maladie, elle est
financée à 41 % par les cotisations sociales alors que la nature du
risque maladie relève de plus en plus d’une logique de solidarité.
Fort
de ce diagnostic, nous proposons un nouveau « Pacte fiscal et social
pour la compétitivité de la France » qui combine une baisse des
cotisations
salariés compensée par une hausse de la CSG d’une part et une baisse
des cotisations employeurs compensée par une augmentation de la TVA
d’autre part.
Cette
« double hélice » de la protection sociale permettrait de redonner la
priorité à la compétitivité et à la croissance en allégeant pour les
entreprises les coûts de production de leurs produits et services, tout
en permettant une hausse des salaires nets grâce à une baisse des
cotisations salariales compensée par une hausse de la CSG.
Ce
nouveau pacte donnerait des marges de manœuvre aux entreprises
françaises. Selon leur situation, elles pourraient, dans des proportions
variables
:
- baisser leurs prix afin de gagner des parts de marchés,
- accroître leurs investissements et leurs dépenses de R&D,
- augmenter les salaires,
- combiner ces trois mouvements.
Plusieurs
scenarii sont envisageables : un transfert de 5 points de cotisation
s’élèverait à 30 milliards d’euros, un transfert de 8 points de
cotisation
à 50 milliards d’euros et un transfert de 12 points de cotisation à 70
milliards d’euros. Les trois scenarii engageraient, avec des vitesses
variables, la convergence entre la France et l’Allemagne.
A
long terme, le Medef propose d’établir un espace social européen
caractérisé par une convergence des niveaux de taux et de prestations
sociales.
L’objectif pourrait être de fixer au niveau européen un niveau minimal
de protection sociale constitutif d’un « socle européen de solidarité »
(taux de remplacement moyen minimum à la retraite, pourcentage de prise
en charge par la solidarité collective des
dépenses de santé, etc.) et un taux maximum de cotisation pour
préserver la compétitivité des entreprises européennes.
Nous
appelons à un grand débat mêlant partenaires sociaux et acteurs du
monde de la santé pour déterminer ce qui, dans les dépenses de santé et
de retraite, doit relever de la solidarité collective ou de l’assurance
individuelle. Nos propositions sont cohérentes et volontaristes. Elles
sont responsables et permettent d’inscrire notre économie dans le temps
long. Elles sont aujourd’hui absolument nécessaires
pour garantir la prospérité de notre pays.