Les textiles techniques tissent leur révolution industrielle "Faire émerger toutes les bonnes idées pour des futurs marchés"

Elizabeth Ducottet est la présidente du réseau R3iLab et du groupe Thuasne, leader européen des textiles techniques médicaux. Interview.

elizabeth ducottet, présidente du réseau r3ilab et du groupe thuasne.
Elizabeth Ducottet, présidente du réseau R3iLab et du groupe Thuasne. © (Re)conquêtes industrielles

Quel est le but du R3iLab ?

Le R3iLab a cette particularité d'être dirigé par des chefs d'entreprise. La crise nous apprend qu'il faut avoir l'intelligence d'être solidaires, d'allier nos forces pour tenter de trouver des nouvelles innovations. Il faut sortir du paradigme actuel qui nous pousserait à avoir peur, à n'être concentré que sur notre activité. Il faut écouter les autres et leurs idées.

C'est avec cet état d'esprit que vous menez vos projets ?

Oui, par exemple avec notre programme VATex, nous faisons rencontrer des designers et une vingtaine d'entreprises textiles spécialisées dans l'habitat, accompagnées chacune par un chef d'entreprise du R3iLab qui joue le rôle de conseiller. Une vingtaine de trinômes sont ainsi constitués. L'originalité, c'est que dès le départ on associe un designer qui ne vient pas du domaine textile ou habitat et une entreprise. Ils commencent par discuter et faire des brainstormings. Ils partagent leurs idées en ne se fixant aucune limite. Le but est de trouver une innovation technologique qui apporte une nouvelle fonctionnalité au produit. Ensuite, ils réfléchissent sur un prototype qu'on leur permet de développer sans frais. C'est le même principe avec notre programme Tech & Design.

"Même un marché de mass market est accessible aux textiles"

Pourquoi associer des designers ?

Le design n'est pas la cerise sur le gâteau, il fait partie intégrante du projet. Les designers pensent les choses différemment et les associer dès le départ permet d'avoir des bonnes surprises. Le but du R3iLab, c'est de faire émerger toutes les bonnes idées pour des futurs marchés.

En quoi consiste votre programme Manu Maestria ?

Il conseille les PME, souvent familiales, spécialisées sur de l'artisanat traditionnel. Par des rencontres en trinômes, des brainstormings, on essaye de mettre en valeur leur savoir-faire sur d'autres produits, qui ne sont pas forcément textiles. Enfin, le programme Impact Marché tente de construite un modèle d'organisation pour stimuler l'innovation dans les entreprises. Le but est d'essayer d'établir un " modèle gagnant " pour que les entreprises développent à coup sûr des innovations technolo­giques. Pour cela, on réalise une grande enquête auprès de nos adhérents.

L'innovation coûte cher. N'est-elle pas réservée aux élites du high-tech ?

Pas du tout. Ce réseau ne nous coûte rien : ce ne sont finalement que des discussions entre professionnels. C'est encore une fois, surtout, une nouvelle façon de réfléchir. Avec les nouvelles fibres, les imprimantes 3D, les fils conducteurs directement tissés, on est en pleine révolution industrielle ! Les domaines de développement des textiles techniques sont infinis. Il faut constamment faire du brainstorming pour faire émerger les nouvelles idées de développement.

Quels marchés sont actuellement porteurs ?

Tous ! Même dans le secteur hyper-concurrentiel de l'emballage. Grâce à leurs propriétés protectrice mais aussi biodégradable et biosourcée, ils peuvent facilement remplacer les boîtes de conserve. Même un marché de "mass market" est accessible aux textiles.

Quels conseils donneriez-vous aux entreprises ?

Sortez de votre bulle ! Ecoutez les autres, faites du brainstorming avec vos équipes et écoutez-les, tous, même le stagiaire. Il faut arrêtez d'avoir peur, de croire que la terre tourne autour de nous. Il faut oser se mettre en déséquilibre, prendre des risques, se faire un peu peur. C'est comme cela que l'on découvre des nouveaux produits, des nouveaux projets et des nouveaux marchés.

Article d'Amandine Dubiez paru dans (Re)conquêtes industrielles (Jan-Fév. 2013)