Cécile Lagé (Française des Jeux) "En 2017, nous avons gagné plus de 30% de joueurs en ligne supplémentaires"

Alors que la Nuit du Directeur Digital se rapproche, la CDO de la Française des jeux présente au JDN le chantier majeur qu'elle conduit pour transformer le groupe.

Le JDN propose pour la quatrième année consécutive ce 19 juin un événement destiné à récompenser les meilleurs chief digital officers de France. Pour en savoir plus : la Nuit du Directeur Digital.

Cécile Lagé, CDO de la Française des Jeux. © FDJ

JDN. Vous êtes CDO et membre du comité exécutif de la Française des Jeux (FDJ). Quel est votre principal chantier numérique en cours ?

Cécile Lagé. La transformation digitale de la Française des Jeux a démarré début 2014. L'objectif était d'attirer davantage de jeunes joueurs - seulement 3% de notre chiffre d'affaires en 2014 - vers les jeux et les paris en ligne. Tout cela essentiellement grâce au travail de simplification de notre système d'information et par l'amélioration de nos jeux. Nous avons également conçu une gamme de jeux spécifiquement digitaux, y compris des jeux sportifs, qui représentent environ les deux tiers de notre offre numérique.

Quels résultats avez-vous obtenus ?

Sur la seule année 2017, nous avons gagné plus de 30% de joueurs en ligne supplémentaires et généré un accroissement de leurs mises de 27%. Notre chiffre d'affaires numérique a augmenté de 38% l'an dernier. A l'intérieur de ce périmètre, les mises générées par nos applications mobiles sont passées de 31% à 44%. Au final, en 2017, nous avons réalisé 5% de notre chiffre d'affaires via des canaux digitaux, soit 750 millions d'euros. Les deux tiers des paris numériques proviennent du Loto ou de l'Euromillion.

Avez-vous rencontré des difficultés particulières durant ce chantier et comment les avez-vous surmontées ?

Pour être bien exécutée, cette stratégie nécessitait notamment de reconstruire notre système informatique indépendamment de son interconnexion avec nos différents points de vente dans un contexte de manque d'agilité du SI central. Il y avait donc une nécessaire remise à plat entre numérisation de nos activités et relation avec le réseau de distribution physique. Nous avons donc revu toute l'architecture par appartements, du back office géré exclusivement en interne avec LotSys, une filiale de la FDJ, au front office et aux mobiles gérés en partenariat avec Aubey, une entreprise de services du numérique (ESN), dans le cadre d'un partenariat stratégique. Aujourd'hui, nous avons un nouveau middle office ainsi qu'un nouveau CRM.

"En 2017, nous avons réalisé 5% de notre chiffre d'affaires via des canaux digitaux, soit 750 millions d'euros"

Comment êtes-vous organisé ? De quelle direction dépendez-vous ?

Je suis à la fois chief digital officer et membre du comex, notamment en charge de la chief customer experience et de la loterie - hors paris sportifs donc - de la Française des Jeux. Soit environ 13 milliards d'euros de chiffre d'affaires sur un total de 15,1 milliards d'euros pour le groupe en 2017. Nous nous appuyons sur la transformation digitale pour améliorer la relation et le parcours client dans une logique omnicanale organisée par segment de clientèle.

Sur le plan hiérarchique, je dépends de Patrick Buffard, DGA du groupe. Je dirige une équipe d'environ 150 collaborateurs qui travaillent en relation étroite avec la direction des systèmes d'information. Nous cherchons à reproduire des binômes intelligents dans une sorte d'organisation miroir en mode agile. Mon budget se situe autour de 70 millions d'euros par an si l'on inclut le système d'information et le volet promotionnel.

La Française des Jeux fait-elle appel à des start-up ?

Absolument. Nous avons une équipe dédiée à l'open innovation afin de détecter les opportunités. Nous sommes également impliqués dans la French Tech et France Digitale. Nous avons aussi investi 25 millions d'euros dans deux fonds d'investissement, Partech Ventures et Raise, pour des développements spécifiques à l'univers de jeux. Nous avons une approche assez pragmatique vis-à-vis de l'écosystème de start-up, que je résumerais en trois mots : détection, expérimentation et connexion. Nous avons notamment lancé un chatbot sous forme d'agent conversationnel sur les paris sportifs avec la start-up Botfuel en 2017. Sinon, nous travaillons essentiellement en minimum viable product pour tester de nouvelles applications ".

Résumé du projet

Pourquoi ce projet est-il innovant ?

"Parce qu'il y a en définitive assez peu d'entreprises de grande consommation comme la FDJ qui sont réellement organisées en se concentrant sur le marketing à destination de leurs clients."

Pourquoi ce projet est-il stratégique ?

"Depuis 2015, notre plan stratégique prévoit de mettre le client au cœur de notre stratégie et de ne plus raisonner jeu par jeu comme auparavant. C'est précisément ce que nous sommes en train de faire."

Pourquoi ce projet est-il transformateur ?

"Parce qu'il s'agit d'une profonde révolution interne. Un chef de projet traditionnel est aujourd'hui un patron de sa marque ou de son segment de clients dans une démarche holistique. En 2017, un collaborateur sur deux a ainsi changé de poste."

Pourquoi ce projet est-il accélérateur ?

"Le plan de travail des équipes a beaucoup évolué. Fin mai, chacune d'entre-elles présentait son projet pour les douze ou dix-huit mois à venir tout en tenant compte de ce qui se passe avant et après le jeu. Nous travaillons désormais sur beaucoup plus de sujets qu'auparavant et allons en imaginer encore de nouveaux."