Faire
plus et mieux pour la formation professionnelle
Par Marc Eisenberg (Alma Consulting Group) (mars
2004)
La réforme qui s'annonce donnera sans nul doute un nouvel élan
à la formation professionnelle. Dans ce domaine, notre pays a plutôt
besoin d'un réel sursaut pour assurer la montée en compétence de
sa population active et faire jeu égal avec ses principaux partenaires
économiques. Dans les projets actuels, des efforts supplémentaires
seront demandés aux entreprises, mais sans que l'on ait prévu de
reconnaître celles qui s'engageront à faire plus et mieux.
Acteur
de poids dans le financement de la formation professionnelle, les
entreprises doivent pouvoir être incitées à remplir leurs obligations,
mieux à les dépasser. Un Crédit d'Impôt Formation (CIF) renouvelé
et dynamisé ne serait-il pas le bienvenu pour créer un environnement
incitatif positif ? Dans d'autres domaines de la vie économique,
comme celui de l'innovation, nous voyons que de tels dispositifs,
à la condition d'être lisibles et attrayants comme le Crédit d'Impôt
Recherche, peuvent avoir un impact fort..
Jouer l'individuel et le collectif
L'ambition de la loi Fillon est d'offrir la garantie d'une formation
individualisée à chacun tout au long de sa vie avec le DIF (Droit
Individuel à la Formation). L'enjeu est d'importance, surtout dans
le contexte de vieillissement de la population active, qui s'amorce
en France. L'amélioration de l'employabilité de chaque salarié bénéficiera
à toute la société et d'abord aux entreprises.
Mais face à notre retard de formation professionnelle (les dépenses
de formation sont en baisse depuis trois ans), il nous faut forcer
le pas. Lancer le DIF sans le CIF (Crédit d'Impôt Formation) équivaudrait
à entreprendre cette marche sur une seule jambe en renonçant à inciter
les entreprises à redoubler d'efforts en faveur de la formation
professionnelle.
Le projet gouvernemental n'aboutirait
qu'à compenser le retard"
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Le financement du projet devrait se traduire par un alourdissement
des charges des entreprises. La cotisation des entreprises de plus
de dix employés passerait de 1,5 % à 1,6 % de la masse
salariale. Pour les plus petites entreprises, comptant moins de
dix salariés, la cotisation progresserait de 0,25 % actuellement
à 0,4 % en 2004 et 0,55 % en 2005. Il s'agit de collecter
plus de 500 millions d'euros au bénéfice du DIF.
On ne peut que s'interroger sur la disproportion qui existerait
entre les enjeux et les sommes dégagées en faveur d'un sursaut des
dépenses de formation. Les dépenses annuelles de formation, hors
apprentissage, s'élèvent à 10 milliards d'euros et touchent 5 millions
de personnes. Entre le début 2002 et la fin 2003, les dépenses de
formation auront baissé de près de 5 %, soit environ 500 millions
d'euros. Si cette tendance devait se poursuivre, le projet gouvernemental
n'aboutirait qu'à compenser le retard pris sans favoriser le sursaut
tant recherché. C'est largement insuffisant.
Quelle piste suivre
Il faut donc faire plus pour la formation professionnelle, mais
comment ? La meilleure piste serait certainement de créer une forte
incitation touchant l'ensemble des entreprises françaises à dépasser
la norme obligatoire fixée collectivement. Depuis 2002, la quasidisparition
de l'ancien Crédit d'Impôt Formation (limité aux Très Petites Entreprises)
a accompagné l'érosion continue des dépenses de formation professionnelle.
Un Crédit d'Impôt Formation plus dynamique, s'appuyant d'une part
sur le volume des dépenses de formation engagées et d'autre part
sur la progression annuelle de ces dépenses, pourrait être la juste
reconnaissance accordée par la nation aux entreprises décidées à
faire plus et mieux en matière de formation professionnelle individuelle
et collective.
Marc Eisenberg est président d'Alma Consulting
Group. Cabinet de conseil fondé en 1986, Alma Consulting Group
a pour métier d'identifier des économies pour les entreprises
grâce à l'allègement des charges fiscales et des
charges sociales, et au financement de l'innovation (subventions
nationales et européennes). |
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