Quel est le projet de Facta Media, le premier pure-player participatif de fact-checking ?

Quel est le projet de Facta Media, le premier pure-player participatif de fact-checking ? A la tête du projet, un économiste aguerri, Jean-Charles Simon, qui ambitionne de réunir toute une communauté d'experts, professionnels... et de marques.

Certains parlent d'une nouvelle étape dans le journalisme. D'autres n'y voient rien de révolutionnaire, évoquant une pratique qui a toujours accompagné le travail du journaliste. Reste que le fact-checking, démarche qui vise à passer l'actualité au crible pour démonter les contre-vérités éventuelles à coup de chiffres, a le vent en poupe. La semaine dernière, le Monde annonçait ainsi transformer son blog "Les Décodeurs" en véritable rubrique alimentée par  deux datajournalistes, deux infographistes et un social media editor.

Aujourd'hui c'est un pure-player participatif qui voit le jour, Facta Media, avec l'ambition de réunir les contributions d'experts et professionnels et une seule exigence, "le traitement exclusivement factuel de l'actualité". Lancé par Jean-Charles Simon, directeur de l'Afep de 2004 à 2008 et directeur général délégué du Medef de 2008 à 2010, Facta Media va couvrir un spectre qui va de la politique à l'international, en passant par les sujets de société et l'économie.

Sa ligne éditoriale se déclinera via "des articles de fact-checking, des articles d'informations factuelles baptisés 'explainers' et des bases de données réunies dans un data center".  Le tri, l'aiguillage et la mise en œuvre des contributions seront orchestrés par une rédaction au périmètre non défini, "entre 5 et 10 personnes". Part belle sera également donnée à la data-vizualisation, un moyen de donner un bel écrin à des données pas toujours faciles à digérer, en témoigne la première Une du site, un sujet sur "L'abstention aux élections municipales et autres scrutins".  

Les internautes invités à proposer, produire et corriger

Alors que sa ligne éditoriale lui interdit, plus qu'à un autre, la moindre contre-vérité, Jean-Charles Simon explique que tous les contenus, y compris les commentaires, seront modérés a priori. "Un moyen de ne pas polluer les discussions avec des trolls", avance-t-il. Reste que la tâche est fastidieuse et que Jean-Charles Simon ne cache pas qu'il a dû déléguer ce travail de modération à une société spécialisée. Quant aux contributions des experts, pas exemptes de coquilles ou d'erreurs, Jean-Charles Simon admet une "présomption de véracité à l'égard des sujets que nous maîtrisons moins que leur auteur" et compte sur "la réactivité des internautes pour modifier toute assertion erronée". Ces derniers sont quoi qu'il en soit au cœur du projet Facta Media, eux qui peuvent sur la "Facta Room" proposer des sujets ou répondre à des questions de la communauté. "Nous espérons que le ratio productions de la rédaction / contributions des internautes sera le plus faible possible, preuve que ces derniers seront très actifs", précise Jean-Charles Simon. Tous les articles sont amenés à "vivre", nuancés voire modifiés par les réactions qui surviendront. 

Comment attirer l'expertise ? 

En l'absence de tout budget communication, Jean-Charles Simon compte d'abord sur la communication des experts et leur capacité à mobiliser leur communauté autour des sujets qu'ils traitent. Une problématique qui le rapproche plus du lancement d'un réseau social que d'un lancement de site d'information classique. Et dans cette recherche des perles rares, il ne s'inquiète pas de la concurrence de sites participatifs tels que le Plus ou le Huffington Post, déjà bien ancrés dans le paysage Internet. "Les gens cherchent à diffuser leur expertise au maximum et multiplient les collaborations. J'ajouterais que notre ligne factuelle assure aux experts que leur contribution s'inscrira dans un contexte homogène. Pas de risque d'apparaître aux côtés de tribunes dont ils ne partagent pas l'opinion", assure-t-il. L'audience visée : une centaine de milliers de visiteurs uniques en 2015, même si "plus que des visiteurs, l'objectif premier est d'attirer une audience active".

La parole (payante) aux marques comme chez Forbes

Alors que les sites médias, confrontés à la baisse du CPM display, réfléchissent à de nouveaux leviers de monétisation, Jean-Charles Simon lui croit dur comme fer dans le native advertising et ambitionne de proposer "quelque chose de similaire à la plateforme de contenus de marques de Forbes, Brandvoice". Partant du principe que les marques, confrontées à des enjeux de communication institutionnelle, ont tout intérêt à "se positionner sur des sujets qui affectent leur marché, qu'il s'agisse de communication de crise, de lobbying ou d'opération transparence", il imagine donc Facta Media comme une nouvelle plateforme d'expression de marque, avec toujours le même mot d'ordre, "le factuel, pour ne pas rompre le pacte de confiance signé avec les lecteurs". Une interrogation subsiste toutefois : les marques accepteront-elles de jouer la transparence au point de laisser l'internaute la possibilité de réagir ou mettre en doute certaines de leurs assertions ?