Christian Poichotte (Unsa) "La convention du Syntec est illisible"

Salaire, droits sociaux, climat : si l'Unsa relève des avancées, le syndicat dénonce également de nombreux flous législatifs qui pénalisent le secteur IT.

JDNSolutions. En tant que représentant de l'UNSA au niveau national, quels sont les principaux motifs d'insatisfaction que vous constatez ?

L'une des plus grandes incompréhensions concerne les salaires, et plus particulièrement les augmentations.

Beaucoup de salariés, notamment les plus expérimentés, ne comprennent pas pourquoi leur salaire n'augmente pas depuis plusieurs années. Dans certaines sociétés, cela fait parfois 5 ans que leur rémunération est gelée. Ce manque d'évolution salariale crée de fortes tensions : certains essaient même de trouver des textes de loi qui interdisent ce type de stagnation salariale.

Ensuite, la convention collective du Syntec est illisible. De nombreux passages sont imcompréhensibles, et ce flou entraîne des interprétations diverses alors qu'il s'agit quand même du support de base définissant les règles de nos métiers.

Par exemple, les modalités concernant les jours de fractionnement ne sont pas claires. C'est aussi un sujet de crispation avec les directions. Certaines sociétés affiliées à la convention du Syntec se sont même vu condamnées pour ne pas avoir respecté la loi sur ces jours de fractionnement.

Autre point litigieux : les fameuses modalités définissant le statut des employés. Sur quelles principes sont-elles attribuées ? Pourquoi certains cadres ayant de nombreuses années d'expérience sont-ils toujours classés en modalité 1 et non 2. C'est pourtant essentiel : c'est sur cette base que sera défini leur salaire.

D'ailleurs, concernant les salaires, j'ai également remarqué une tendance nouvelle : s'il y a quelques années, personne ne connaissait le minimum salarial garanti par la convention du Syntec, tout simplement car cela n'existait pas, il est aujourd'hui examiné avec plus d'attention car il est nettement plus fréquent dans les sociétés.

Il n'est dès lors pas étonnant, dans ces conditions, que des salariés de SSII préfèrent travailler chez l'un de leur client dès que l'occasion se présente. Même à salaire égal, les employés des SSII trouveront chez leur client de meilleures conditions sociales.

Le climat social s'est-il amélioré depuis la reprise économique et celle du secteur ?

Je constate en tout cas des avancées notables chez mon employeur Aubay, chez qui l'UNSA est arrivé en tête des élections.

Même s'il reste encore des points à préciser, l'éclaircie économique devrait aider à améliorer le climat social. Il s'agit notamment de formaliser et d'éclaircir les règles. Le temps de travail est un bon exemple, faisant souvent l'objet d'accords oraux, et mal compris. Lorsque certaines dispositions relatives aux congés ne sont pas écrites, cela engendre un flou nuisible. Nous avons pu signer un accord.

"Il n'y a pas que le salaire qui est important"

Ce n'est pas le seul. Alors que de nombreuses sociétés, Aubay inclus, sortent de la crise et affichent de bons bénéfices, nous avons aussi pu rendre plus égalitaire la participation : la répartition de l'enveloppe est plus équitable. Les plus bas salaires peuvent ainsi avoir droit au même montant que les plus hauts salaires.

Nous avons également signé un accord portant sur les seniors. Le recrutement des seniors dans l'informatique est complexe. Il faut également qu'ils puissent rester chez leur employeur. L'accord que nous avons signé permet aux salariés de plus de 45 ans de voir leurs demandes de DIF (droit individuel à la formation) automatiquement acceptées. Cela leur permet de monter en compétence plus facilement. Il est encore trop tôt pour mesure l'impact de l'accord, signé l'année dernière. Nous avons également essayé de mettre en place des tuteurs, mais le succès reste limité.

Nous avons également signé un accord sur la parité homme-femmes, Aubay comptant près d'un tiers d'effectif féminin. Il ne s'agit pas uniquement d'égalité en termes de salaires. L'accord donne aussi la possibilité aux femmes de suivre une formation après leur congé maternité. Il n'y a pas que le salaire qui est important.

Est-ce toujours facile d'être représentant syndical au sein d'une SSII ?

Je suis identifié par la direction, qui est consciente de mes différents rôles. Je suis salarié chez Aubay, mais je suis aussi le représentant de l'UNSA pour la partie France, membre du bureau national de l'UNSA pour la branche la fédération liée à la CCN Syntec et cumule divers postes d'élus (CE, CHSCT et CCE). Tout cela en essayant de continuer mon travail de consultant chez différents clients. Ce n'est pas facile, je manque parfois de temps.

Par exemple, dans les faits, je ne peux pas dédier le nombre d'heures normalement prévues pour assurer pleinement mon rôle de délégué. Je n'ai par ailleurs pas toujours le temps de mener tous les projets que je souhaiterais comme implanter l'Unsa dans d'autres structures.  

Salarié chez Aubay, Christian Poichotte est aussi représentant de l'Unsa pour la partie France, membre du bureau national de l'UNSA pour la branche la fédération liée à la CCN Syntec et cumule divers postes d'élus (CE, CHSCT et CCE).