Comment Disney+ peut tirer parti de son passage à l'AVOD

La concurrence est forte entre les plateformes de streaming. L'arrivée d'offres avec publicité a bouleversé leur modèle, les habitudes des abonnés. Comment Disney+ peut profiter de cette évolution?

Disney++ n'a même pas encore fêté son troisième anniversaire qu'il est déjà devenu la plus grande plateforme de streaming au monde, avec 221 millions d'abonnés, passant ainsi devant Netflix. Des séries phares comme WandaVision et The Mandalorian, issues de ses marques Marvel et Star Wars, sont venues enrichir le vaste catalogue Disney, créant de la valeur pour les spectateurs. 

Dans une étude européenne, «  The 2021 Connected TV Viewer » (l’usage de la TV connectée en 2021) réalisée auprès de 5000 consommateurs avec une TV connectée dans cinq pays d’Europe (Allemagne, Espagne, France, Italie, Royaume-Uni) indique que près des trois-quarts (72%) du public des smart TV déclarent se tourner presque exclusivement vers les services de streaming quand ils veulent regarder un programme à plusieurs (contre 18 % déclarant préférer la TV linéaire) ; tandis que 73 % vont se tourner vers le streaming pour une soirée complète de visionnage (contre 19 % pour la TV linéaire). Si le streaming est entré dans le quotidien de nombreux foyers, des vents contraires commencent à se lever et à affecter les entreprises de streaming. 

Acteurs du streaming, l’heure du choix et de l’adaptation ?

Dans cette même étude, il est précisé que pour de nombreuses familles, il existe un plafond de dépenses médiatiques à ne pas dépasser. 41 % des téléspectateurs européens de Smart TV conviennent que leurs ménages paient déjà plus qu'ils ne le souhaiteraient pour le streaming et d'autres services (par exemple, câbles, satellite, etc.).  

Pouvoir d’achat en berne, inflation galopante, facture énergétique en hausse, La crise actuelle du coût de la vie va sans nul doute inciter les consommateurs à réévaluer leurs priorités et à resserrer les cordons de leur bourse. Au cœur de cet arbitrage des dépenses, de nombreux consommateurs se désabonnent des services de streaming. Aux Etats-Unis,  au mois de juillet, le taux de désabonnement moyen aux Etats-Unis a fortement augmenté pour atteindre 5,46% contre 4,46% en juillet 2021 et 4,05% en juillet 2020.En France, le nombre d'abonnements par foyer stagne depuis un an. Au premier trimestre, les Français comptaient 1,9 abonnement aux plateformes de streaming. C’est autant qu’au premier trimestre 2021. Netflix a perdu, en un trimestre (Q2 2022), 970 000 abonnés payants à son service, signant la pire performance de son histoire. Fait important, Netflix et Disney+ ne proposent tous les deux qu'un seul service, le streaming (plus une petite offre de jeux vidéo pour Netflix), contrairement aux grandes entreprises technologiques qui incluent un accès à leurs écosystèmes élargis dans le prix de l'abonnement. Les géants du streaming risquent donc de souffrir encore davantage du resserrement des budgets.

Netflix - après des années de résistance - a lancé son offre avec publicité récemment. Disney+ a lui aussi indiqué qu'il lancerait une offre avec publicité (ce qui est déjà le cas aux États-Unis) avant d'étendre la formule à d'autres marchés, notamment le Royaume-Uni et l'Europe. Ce revirement ouvrira la porte à de nouvelles opportunités passionnantes pour les éditeurs et les annonceurs. 

Pourquoi le secteur devrait-il se réjouir de l'arrivée de nouvelles options qui permettront aux consommateurs d'accéder au contenu souhaité sans acquitter un prix exorbitant ? Et comment les éditeurs et les annonceurs peuvent-ils tirer parti de cette opportunité ? 

Un long chemin parcouru...

Le grand public est avide de commodité. Les clients veulent pouvoir consommer leur contenu préféré d'une manière adaptée à leur style de vie. C'est la raison pour laquelle les plateformes de streaming sont devenues si populaires : elles ont su exploiter notre désir d'accéder à un contenu de qualité sans devoir attendre. Cependant, les coûts de maintenance de gigantesques bibliothèques de contenus, constamment enrichies par de nouvelles offres, ne sont pas négligeables. Faute d’une croissance continue du nombre d'abonnés, certains services de SVOD risquent d’avoir du mal à créer une offre d'abonnement durable. C'est là que commencent à souffler ces fameux vents contraires : lorsque la croissance du nombre d'abonnés ralentit en raison de la saturation de l’offre et de l’inquiétude des consommateurs, les coûts de création d'un service auquel le client va vouloir rester fidèle commencent à augmenter. C’est l’origine de la tendance croissante de la diversification des sources de revenus, solution pour relever ce défi. Des niveaux d’abonnement différents, financés par la publicité, sont un moyen possible de remédier au problème tant pour l’entreprise que pour ses clients.  

La pertinence, un facteur incontournable

Disney+ et Netflix comptent à eux deux plus de 440 millions d'abonnés dans le monde. L'arrivée prochaine des publicités sur les deux plateformes sera accueillie favorablement par les annonceurs, mais une certaine prudence reste de mise. Il est indispensable de connaître parfaitement les contenus vidéo préférés des consommateurs pour obtenir des résultats positifs.

Aucun spectateur n’a envie d’être bombardé de publicités beaucoup trop longues et qui ne l’intéressent pas. L’enquête de Samsung Ads révèle que pour 63 % des audiences, la pertinence des publicités est un facteur important qui détermine s’ils sont disposés ou non à accepter ces annonces dans leurs services télévisés. Il est donc essentiel de diffuser des publicités pertinentes pour optimiser le potentiel de l'AVOD. 

Les publicités sont considérées comme faisant partie intégrante des expériences de visionnage linéaire, mais elles ne sont pas acceptées aussi aisément dans les services de streaming, sauf si leur pertinence et leur qualité justifient leur valeur. Toutefois, on peut y voir un aspect positif : en se basant sur les informations fournies par la CTV (télévision connectée) et les plateformes de streaming, les annonceurs peuvent vérifier l’efficacité de leurs publicités et contribuent à optimiser l'expérience du spectateur. De ce fait, dans notre enquête, les publicités FAST (Free Ad-supported Streaming TV - chaînes de télévision gratuites financées par la publicité) présentaient le taux le plus élevé d'engagement des audiences (48 %), toutes plateformes de télévision confondues. Le développement d'une audience plus engagée permettra d’attirer un nombre plus important d'annonceurs sur la plateforme. Près de la moitié des personnes interrogées par Samsung Ads (48 %) pensent que les publicités FAST sont pertinentes, contre 35 % pour la télévision linéaire et 31 % pour le BVOD. 

La plateforme où les rêves deviennent réalité ?

L’ample catalogue de contenu de Disney+ continue d'attirer de nouveaux téléspectateurs, mais ce n'est pas le moment pour l’entreprise de s’endormir sur ses lauriers. Le modèle d'abonnement est dominant chez les plateformes de streaming depuis que Neftlix a fait ses premiers pas en ligne il y a plus de quinze ans. Toutefois, les modèles FAST (les chaînes de télévision gratuite financées par la publicité) ont commencé à gagner en popularité ces dernières années, sous l'impulsion de plateformes comme Samsung TV Plus, Rakuten et Pluto. Les difficultés économiques des consommateurs ne montrant aucun signe d'apaisement, le basculement vers un modèle FAST, ou du moins le fait de le proposer, pourrait être une bonne nouvelle pour les éditeurs d'abonnements. Parallèlement, cette diversification de l'espace de streaming vers de nouveaux modèles financés par la publicité rend le streaming encore plus attrayant pour les annonceurs. 

La capacité de Disney+ à proposer régulièrement des expériences commodes et pertinentes déterminera si son changement de stratégie fera office de tapis volant vers un brillant avenir, ou au contraire, le replongera directement dans l'ombre de Netflix.