Editeurs : 4 mesures à prendre pour attirer les annonceurs

Editeurs : 4 mesures à prendre pour attirer les annonceurs La situation est loin d'être simple pour les éditeurs médias. Mais certaines mesures peuvent contribuer à faire revenir les marques et à stopper la baisse des revenus des sites d'information.

Les revenus des éditeurs avec la publicité en ligne sont en baisse. Après un premier semestre catastrophique aux recettes en baisse de 10%, les sites des marques médias ont fini 2023 avec -6% sur le display (vidéo et audio compris), sachant que 2022 avait déjà été une petite année, avec seulement +2%. Ces chiffres sortent des trois dernies Observatoires de l'ePub SRI réalisés par Oliver Wyman en partenariat avec l'UDECAM. Cette décroissance est d'autant plus marquante qu'elle contraste fortement avec les bonnes performances de tous les autres acteurs sur le display : +20% pour les chaînes TV et radio en 2023 ; 12% pour les plateformes de streaming vidéo et musical ; +6% pour les retailers.

"On observe une baisse continue, année après année, des parts de marché des médias français. Or, ces éditeurs produisent des contenus de qualité qui nourrissent les consommateurs. Ils sont de plus transparents sur leurs données d'audiences", regrette Jean-Baptiste Rouet, head of digital innovation et corporate reputation chez Publicis Media.

Le phénomène touche tous les inventaires, y compris les vidéos instream pourtant réputées offrir des CPM élevés. "Le problème est que tous les efforts des éditeurs visant à générer davantage de contenus vidéo n'ont pas abouti à une meilleure monétisation publicitaire", précise-t-il.

La bataille face aux plateformes sociales, de streaming, de retail media et le search est-elle perdue d'avance ? Pas tout à fait, soutient l'expert. "Certains annonceurs, comme les marques du luxe et de l'automobile, restent très attachés aux contextes éditoriaux qualitatifs des marques médias, sans compter leur relation historique et le cadre de leur partenariat global sur les autres leviers, comme le papier", résume-t-il. Jean-Baptiste Rouet semble même convaincu qu'il est encore possible d'attirer davantage de marques voire débloquer des budgets supplémentaires afin d'endiguer la baisse et stabiliser les revenus des éditeurs en ligne. Quatre mesures peuvent selon lui favoriser ce changement.

1. Modifier l'expérience utilisateur en s'inspirant des réseaux sociaux

Pour ce spécialiste des stratégies d'achat média en ligne, les éditeurs ne devraient pas hésiter à s'inspirer des nouvelles pratiques mises en place par les réseaux sociaux en matière d'expérience utilisateur. Et ce afin de drastiquement simplifier la présentation de leurs contenus, d'autant plus que la majorité de la consommation en ligne des marques médias et des sites d'information se fait sur mobile. "Sur YouTube ou Instagram, le fil éditorial que l'on scrolle est infini et la publicité parfaitement intégrée entre les contenus de ce flux. Sur un site ou une application éditeur, dès que l'on quitte la home page on se retrouve face à une très grande richesse éditoriale sans doute inspirée du papier qui offre cependant un accès hétéroclite à une information qui est hiérarchisée. Ce modèle complexifie la navigation car, pour passer à autre chose, on est obligé de revenir en arrière ou à consulter le menu. Cette expérience perturbe l'attention et dégrade l'expérience publicitaire", analyse l'expert.

2. Améliorer la qualité de l'intégration publicitaire, et notamment de la vidéo

"Les éditeurs ont du mal à assumer la publicité, contrairement aux plateformes. Le display est souvent mal intégré : la bannière ne va pas de bord à bord, sans compter le bouton et la croix 'Your online choices' qui ajoutent de la confusion. Or, en mobile on se dispute déjà un petit écran : l'intégration proposée par les médias laisse fortement à désirer comparée au social", analyse Jean-Baptiste Rouet.

Concernant la vidéo, le player est jugé trop petit. "En moyenne sur un PC le player vidéo chez un site éditeur dépasse rarement 20% de l'écran, 30% sur mobile, soit des ratios très inférieurs à ceux pratiqués par les plateformes de streaming ou les chaînes TV. Or, la taille du player est une des variables de calcul du niveau d'attention : un petit écran réduit le score d'attention", explique Jean-Baptiste Rouet.

Dans les plans d'achat publicitaire, les sites éditeurs arrivent généralement à la fin, après les plateformes, chaînes TV et CTV, pour apporter un complément de couverture sur des cibles affinitaires dans un contexte premium de marque média. "Si on disposait d'une meilleur intégration publicitaire, ce serait plus facile de convaincre les annonceurs de débloquer davantage de budgets", analyse l'expert.

L'enjeu du player est d'autant plus crucial que l'industrie construit en ce moment même des critères communs pour fluidifier le media planning de la vidéo instream que l'on soit sur un site éditorial ou sur de la TV ou l'AVOD : la taille de la vidéo affichée est centrale dans la notion de contact publicitaire. "Le contact sur l'instream coûte cher. Il ne suffit par conséquent pas de disposer de l'inventaire instream ; il faut s'intéresser à la qualité de l'exposition de cet inventaire aux consommateurs", alerte Jean-Baptiste Rouet. 

3. Développer sa data first party avec Utiq

La capacité des éditeurs à disposer de données déterministes pour le besoins du  ciblage et surtout de la mesure de l'efficacité des campagnes publicitaires est désormais centrale dans la course visant à attirer des budgets et en l'absence des cookies tiers. "Parmi la multitude de solutions proposées, la plus aboutie en termes de reach et de qualité des données est Utiq, il suffira qu'elle soit largement adoptée", précise l'expert. "Les bénéfices et les cas d'usage sont immenses avec Utiq, encore bien plus qu'avec les cookies tiers, nous avons tous à y gagner !"

A noter que l'industrie publicitaire compte beaucoup sur la plainte déposée auprès de l'Autorité de la concurrence contre Apple au sujet de l'App Tracking Transparence (ATT) à qui on attribue une baisse drastique du consentement des mobinautes au tracking et par conséquent une chute substantielle des revenus des éditeurs en ligne sur iPhone. "Entre l'ATT et la CMP  (consent management platform, ndlr) des sites, les éditeurs se retrouvent avec des taux de consentement de 30% en moyenne, ce qui en dit long sur la dégradation de la valeur sur ces inventaires", analyse Jean-Baptiste Rouet.

4. Faire évoluer le contrôle de la brand safety avec l'IA

Enfin, un vieux dossier continue de pénaliser les éditeurs en ligne : les mots-clés de la brand safety. Ces listes d'exclusion peuvent générer un manque à gagner souvent à tort pour jusqu'à 30% des inventaires, nous confie l'expert.

Mais alors comment faire évoluer la finesse de leur traitement ? Comment éviter qu'un article faisant part de l'explosion des revenus de Netflix ne soit exclu car amalgamé aux informations sur l'actualité des guerres et des conflits ?  "On doit pouvoir contextualiser ces mots-clés négatifs à l'aide de l'IA au lieu de les mettre bêtement dans des listes d'exclusion en repoussoir dans les DSP. Notre industrie – et notamment les adtech impliquées et les annonceurs – ont encore beaucoup de travail devant elle pour apporter des améliorations dans ce domaine", conclut l'expert.