Le marché de l'énergie solaire attire les acteurs du monde IT

En croissance, la demande en panneaux solaires permet aux fabricants de semi-conducteurs de recycler une partie de leur production, et de mutualiser leur savoir-faire.

Les acteurs du monde informatique et les spécialistes de l'énergie solaire ont toujours été en affaires. En effet, pour fabriquer des panneaux solaires, les constructeurs s'appuient en majorité sur du polysilicium (silicium ayant des propriétés spécifiques). Or, ce matériau est extrait par les professionnels des semi-conducteurs lors de la conception de puces électroniques comme la mémoire et les processeurs, qui se basent sur le silicium.

Mais aujourd'hui, l'évolution du marché des énergies propres fait évoluer cette relation. Le prix du polysilicium évolue ainsi à la hausse. Cela s'explique par une hausse de 30% en moyenne de la demande par an. L'Allemagne, très en avance dans le domaine des énergies propres, a produit en 2006 près de 1500 Megawatts d'électricité photovoltaïque, soit les 3/4 de toute la production solaire européenne et le tiers de l'énergie solaire mondiale.

La Commission européenne, quant à elle, s'est fixée d'ambitieux objectifs dans le domaine des énergies renouvelables. Ainsi, à l'horizon 2020, le solaire, l'éolien ou l'hydrolique doivent représenter 20% de la part totale de l'énergie que l'Europe consomme annuellement, contre 8,5% aujourd'hui. Au Japon, en Chine et même aux Etats-Unis, l'énergie solaire attire également les investissements.

Pour faire face à cette demande, les acteurs de l'industrie solaire ont pu compter depuis 2004 sur les capacités de production non utilisée des fabricants de galettes de silicium. Ceux-ci, cependant, ont vite trouvé leurs limites. Du coup, l'industrie informatique vient à la rencontre de celle de l'énergie solaire pour trouver des solutions alternatives.

Qimonda, spécialiste de la mémoire DRAM, veut cueillir ce marché en devenir

Ainsi, IBM propose par exemple une solution qui lui permet de recycler ses galettes de silicium (wafers) en matière première pour la fabrication de panneaux solaires. Le constructeurs estime que 3,3% de ses galettes sont aujourd'hui détruites suite à des erreurs de fabrications, alors qu'elles pourraient, après une étape de ponçage, être recyclées pour servir de galette de silicium brute.

Le procédé exige toutefois d'effacer les données inscrites sur le wafer recyclé en utilisant un abrasif et de l'eau déminéralisée de manière à protéger la propriété intellectuelle du fondeur. Une manière de limiter la pénurie de silicium à laquelle les fabricants de panneaux solaires risquent d'être confrontés à l'avenir.

De son coté, Qimonda, fabricants de mémoires vive, a créé une société commune avec Centrosolar Group dans l'objectif de produire des cellules solaires basées sur le silicium. Cette joint venture sera détenue à 49% par Centrosolar, et à 51% par Qimonda Solar, filiale à 100% de Qimonda. Il s'agit pour le spécialiste des semi-conducteurs, de mutualiser ses frais de R&D et ses usines de production de galettes de silicium.

Cette stratégie originale a pour avantage d'installer Qimonda sur un marché en croissance, et offrant de meilleures marges que le marché de la DRAM d'où il est issu. La société financée par Qimonda et Centrosolar bénéficiera d'un investissement de 70 millions d'euros d'ici septembre 2009 et pourra produire jusqu'à 30 millions de cellules solaires par an. Une initiative intéressante, qui pourrait donner des idées à d'autres fabricants en semi-conducteurs.

Mais face à la pénurie possible de silicium, c'est aussi le savoir-faire en matière de conception de circuits imprimés qui doit s'échanger. Ainsi, la société allemande SolarTec AG s'est installée au coeur de Dresde, la région des semi-conducteurs en Allemagne où s'est installé notamment AMD. Tout comme CV21 ou Zenith Solar, SolarTec mise sur la spécialisation du silicium pour en renforcer l'efficacité dans un contexte de production d'énergie solaire.

Des partenariats pour produire des galettes de silicium spécifiques aux besoins du marché

Aujourd'hui, la galette de silicium ne peut convertir qu'une petite partie du spectre de lumière. Toutefois, en plaçant des loupes pour concentrer la lumière et en employant des cellules solaires à haute efficacité sur des surfaces réduites que l'on empile, les panneaux couvrent un plus grand spectre et offrent une meilleure efficacité (l'efficacité étant le taux de transformation d'un photon en électricité). On obtient ainsi plus d'énergie à partir d'une même surface.

Les premiers tests permettent d'estimer le degré d'efficacité de ces solutions entre 30 et 35% au mieux, contre 15 à 20% en moyenne pour les cellules photovoltaïques standards. Concrètement, cela signifie un coût de fabrication divisé par deux. Et c'est l'un des enjeux principaux que de faire baisser les prix de l'énergie solaire et / ou de diminuer la surface nécessaire pour une même production d'électricité.

Jamais à court d'idée, les spécialistes de l'énergie solaire envisagent même de remplacer le silicium par des solutions telles que des nano-particules ou même certains polymères plastiques. D'autres semi-conducteurs que le silicium pourraient également faire office de solution de remplacement, à condition que leurs rapports coût / efficacité augmentent.

Selon le cabinet d'études iSuppli, les cellules photovoltaïques représentent un marché de 9,6 milliards de dollars en 2007, qui pourrait atteindre 22,1 milliards de dollars d'ici 2012. Une sérieuse alternative pour l'industrie des semi-conducteurs qui pourrait prendre pied sur ce marché en multipliant les acquisitions ou les partenariats à l'avenir.