L'économie de l'abonnement s'apprête à déferler L'abonnement redessine peu à peu de nombreuses industries

Le facteur sonne toujours deux fois ? Bientôt il sonnera tous les mois. Le déferlement des sites d'e-commerce sur abonnement, qui ont séduit de nombreux investisseurs alléchés par la promesse de revenus récurrents, a laissé la place à une phase de consolidation. Cette stabilisation ne doit cependant pas masquer une puissante lame de fond à l'œuvre dans la consommation. Car le principe de l'abonnement, loin de ne concerner que les coffrets de cosmétiques ou d'accessoires de mode, se diffuse depuis plusieurs années à de nombreux secteurs d'activité, au point parfois de redessiner entièrement ces industries.

Le marché de l'édition de logiciels a été l'un des premiers à basculer. Fini le CD vendu en magasin, en voie d'extinction le téléchargement d'un soft à installer sur son ordinateur. Depuis que les débits des fournisseurs d'accès le permettent, un autre modèle prend le dessus : payer chaque mois le droit d'utiliser en SaaS un logiciel que l'éditeur met à jour au fil de l'eau. Que ce soit dans un contexte professionnel avec un outil de comptabilité ou personnel avec un service de stockage de photos.

Les contenus ont suivi le même chemin. On n'achète plus ni CD ni DVD et l'achat de mp3 ou de films à l'acte tend à disparaître, au profit d'offres mensuelles qui accordent à l'utilisateur un accès illimité à un catalogue, qu'il s'agisse de celui de Deezer ou Spotify dans la musique ou de Netflix dans la VOD. L'univers de l'apprentissage et de la formation en ligne s'inscrit lui-aussi dans ce schéma : derrière les MOOC, on trouve encore un modèle d'abonnement.

L'abonnement remplace peu à peu la propriété

Progressivement, la commodité de l'abonnement s'est même étendue aux produits de consommation courante. Organiser une livraison régulière de couches-culottes ou de céréales est possible depuis des années chez Amazon. Et les sites marchands d'optique proposent pour la plupart de renouveler automatiquement les commandes de lentilles de contact. Quid des produits couverts par la vague de start-up d'e-commerce sur abonnement des années 2010-2012 ? Ces services semblent aujourd'hui avoir trouvé leur place en tant que complément à des activités principales d'e-commerce classique, qui permet de faire découvrir aux consommateurs de nouvelles références, des cosmétiques (BirchBox) jusqu'au vin (Le Petit Ballon).

Car le changement de paradigme déclenché par l'accélération des débits d'Internet s'accompagne d'autres phénomènes œuvrant dans le même sens. La crise économique d'abord, qui pousse les consommateurs à ne payer qu'à l'usage et sans s'engager. Mais aussi, très liée, la prise de conscience de la nécessité de mettre en œuvre des modèles écologiques et durables, qui encourage la mutualisation et le partage des biens. Pour louer une robe pour un soir (Girl Meets Dress), un appartement pour quelques jours (AirBnB) ou encore la voiture de son voisin (ZipCar ou WhipCar). A tel point d'ailleurs que les consommateurs dissocient progressivement la notion d'usage et de propriété même pour des possessions aussi ancrées dans les mœurs que l'automobile... ce qui a de quoi bouleverser profondément l'organisation de multiples secteurs économiques.