Podcast et brand safety : le marché tente de faire bouger les lignes

Podcast et brand safety : le marché tente de faire bouger les lignes L'intérêt des annonceurs pour les podcasts pousse le secteur à améliorer la maîtrise du contexte de diffusion. Le rôle de l'humain reste central.

La forte hausse des investissements publicitaires en audio digital observée chaque année depuis 2019 entraîne de la part des annonceurs une exigence accrue de garantie de brand safety sur les inventaires de podcast (replay radio et podcasts natifs). Pour y répondre, régies, agences et adtech multiplient les annonces sur des innovations technologiques. Si ces dernières sont en route, l'expertise et l'écoute manuelle restent cependant dans ce domaine les principaux  garants d'un cadre de diffusion adapté.

Un exemple très illustratif de cette course à l'innovation est celui de la régie Targetspot (Radio France, Deezer, Skyrock, Brut, etc.). Chez eux, les podcasts représentent 60% des recettes comparé aux émissions live. La régie a conclu cet été les derniers tests avec le DSP Hawk et le SSP Magnite afin que les données sur le nom de domaine, la station et l'émission circulent parfaitement sur la chaîne programmatique. Des informations qui étaient déjà disponibles sur les inventaires d'audio live depuis près de huit ans. 

"Nos tests ont démontré que ce mapping fonctionne parfaitement : les SSP récupèrent nos données, qui sont ensuite renvoyées aux DSP et aux agences. Désormais les annonceurs disposent d'une transparence totale sur les inventaires que nous proposons en podcast", explique Chérifa Afiri, directrice générale de Targetspot en France. Pour aider les annonceurs à se repérer au niveau de chaque épisode, la régie prévoit pour début 2023 l'intégration du ciblage contextuel basé sur les mots-clés déclarés par les podcasteurs sur les descriptions des flux RSS. "Ces informations permettront de black ou white lister ces inventaires", ajoute-t-elle.

"Les marques connaissent déjà très bien les émissions radio, mais il en va autrement pour les podcasts natifs"

Contrairement au display ou à la vidéo, le podcast est un format spécifique qui ne permet pas à ce stade de disposer de solutions d'ad verification tierces et indépendantes pouvant assurer de manière industrialisée la mesure de la brand safety sur ces inventaires. Mais là aussi les choses bougent. Comme l'illustre le partenariat annoncé en juin entre IAS et Spotify, avec la participation d'UM Wolrdwide, pour démarrer des travaux de recherche afin de mettre au point une solution de brand safety et suitability sur les podcasts pour les annonceurs à l'intérieur de l'environnement de Spotify Audience Network, la place de marché publicitaire dédiée aux podcasts de la plateforme de streaming.

Cela reste cependant encore très lointain pour répondre aux besoins immédiats des marques sur toutes les plateformes, notamment en matière de podcast natif. C'est pourquoi la clé de voûte dans ce domaine reste la même : les innovations en cours sur la chaîne programmatique ne se substituent pas pour le moment au besoin d'une sélection manuelle des inventaires en amont par les régies et les agences. "Les marques connaissent déjà très bien les émissions radio, mais il en va autrement pour les podcasts natifs. Même si beaucoup sont produits par des personnalités et des marques médias connues, l'offre de podcasts indépendants est foisonnante et évolutive. Tout l'enjeu pour nous, c'est de disposer d'une expertise irréprochable nous permettant de maîtriser le cadre de diffusion dans ces environnements", explique Sébastien Ruiz, directeur de GroupM Audio et Cinéma.

GroupM a lancé fin 2021 un outil d'intelligence planning dédié aux podcasts en partenariat avec la plateforme d'achat programmatique Hawk. AudioM Planner rassemble les informations fournies par les éditeurs d'environ 3 000 podcasts et émissions en replay afin de proposer en temps réel des données exhaustives sur la thématique, les cibles, la fréquence de publication des épisodes et les nombres d'écoute. "Sur la base de ces données, nous établissons nous-mêmes le cadre de diffusion de chaque campagne sur mesure", précise Sébastien Ruiz. Le groupe refuse en effet toute logique d'achat média massif en programmatique, ce dernier venant juste servir de rouage pour la diffusion, en mode garanti.

L'intervention humaine reste indispensable

Chez Acast, on va encore plus loin dans cette logique, en intégrant à cette approche sur mesure l'analyse de chaque épisode à des fins de ciblage mais également de maîtrise du cadre de diffusion, grâce à la technologie de speech-to-text et à l'intelligence artificielle. Ce service européen d'hébergement, distribution et monétisation rassemble 47 000 podcasts natifs dont "plusieurs milliers" en France. Chez eux aussi on part du principe qu'une sélection humaine et sur mesure basée sur des critères de qualité et l'accompagnement à la fois des éditeurs de podcasts et des annonceurs est une condition sine qua non à la fois à la monétisation des contenus et à la maîtrise du cadre de diffusion des campagnes.

"Notre équipe contenu connait chaque podcast présent dans notre plateforme, nous choisissons un par un tous ceux qui seront ouverts à la publicité sur la base de critères de qualité et, en dehors des niches, de volumes d'audience. Puis on pré-valide avec les annonceurs les épisodes et émissions qui feront partie du cadre de diffusion", explique Cédric Bégoc, directeur du contenu chez Acast France. Ainsi, même si les inventaires d'Acast sont injectés dans les tuyaux programmatiques via Adswizz, la définition des deals est faite en amont par les équipes commerciales de la régie avec les agences et les annonceurs. L'analyse contextuelle et émotionnelle des contenus audio à des fins de brand suitability tenant compte du sens donné aux mots (le graal des annonceurs aujourd'hui) est le prochain chantier sur lequel la plateforme travaille.