Yves Le Mouël (Fédération Française des Télécoms) "Les opérateurs ne sont pas une variable d'ajustement pour financer l'audiovisuel ou la culture"

L'examen des amendements de la loi qui prévoit de taxer les opérateurs télécoms pour financer France Télévisions vient de débuter. Le directeur général de la Fédération Française des Télécoms détaille sa riposte.

La presse fait état de rumeurs concernant l'annulation des taxes visant les chaînes privées et d'une éventuelle augmentation de celle appliquée aux opérateurs. Comment analysez-vous la situation ?

Nous restons méfiants tant que la loi n'est pas votée. Mais comme nous ne cessons de le répéter, cette taxe n'est pas légitime. Ni sur le plan économique, ni sur le plan juridique. Nous avons d'ailleurs déjà mis l'accent sur l'inconstitutionnalité de ce projet. Il est grave de faire porter un tel projet avec un risque juridique si lourd. Mais les parlementaires sont informés, c'est maintenant à eux de prendre leurs responsabilités. En tout cas, si ce projet se confirmait, nous leur avons déjà proposés une série d'amendements pour minimiser l'impact de cette taxe.

Lesquels ?

D'abord, parce que la relation entre les opérateurs télécoms et l'audiovisuel est loin d'être évidente, il faut que cette taxe s'applique uniquement sur nos activités audiovisuelles. Pourquoi nos activités de téléphonie fixe et de mobile sur lesquelles transitent surtout de la voix seraient concernées ? Un de nos amendements propose ainsi de faire correspondre l'assiette de cette taxe à celle que nous payons déjà pour le soutien à la production audiovisuelle (Cosip). Autre problème : dès lors qu'une taxe est créée, il y a un risque qu'elle augmente au fil du temps. Nous demandons donc de plafonner cette taxe et de prévoir de faire le bilan dans trois ans pour étudier la réalité des besoins de financement de France Télévisions.

Le député Frédéric Lefèvre voudrait que l'excédent des revenus issus de la taxe télécoms, si excédent il y a, aille dans la poche de l'industrie culturelle. Qu'en pensez-vous ?

D'abord, je ne vois pas d'où viendrait ce solde. Car s'il devait y en avoir un, il faudrait alors baisser la taxe. Je suis bien entendu extrêmement défavorable à cette proposition. Les opérateurs ne sont pas une variable d'ajustement pour financer l'audiovisuel ou la culture. On est en train d'expliquer aux pouvoirs publics qu'il faut relancer l'économie et on veut assommer les opérateurs en créant de multiples taxes... Pourtant on nous demande d'investir dans les réseaux, fibre et mobile notamment. Sans parler de la crise financière actuelle. Cette proposition est un non sens économique pour le futur et découle d'une vision court-termiste de la situation. La France mérite autre chose.