Aurore Gaspar (Boursorama) "Le nombre d'ordres passé sur Boursorama a atteint des records"

Le JDN poursuit sa série d'interviews de dirigeants face au coronavirus. La directrice générale adjointe de Boursorama évoque les disparités entre les différentes activités de la banque en ligne.

JDN. Quelles activités de Boursorama ont été le plus impactées depuis le début de la crise liée au coronavirus ?

Aurore Gaspar, directrice générale adjointe de Boursorama. © Boursorama

Aurore Gaspar. Les activités qui ont été impactées à la baisse sont le crédit immobilier, ce qui est normal étant donné que la signature des actes est plus compliquée, et les demandes de crédit conso. C'est assez logique puisque les consommateurs n'achètent plus de voiture et ne réalisent plus de gros travaux chez eux. Enfin, notre activité monétique est en baisse, à la fois sur les paiements et les retraits, puisque les Français ont été confinés. En revanche, nous enregistrons une hausse sur les encours de comptes courants, sur l'épargne liquide et une activité record sur la bourse. Le nombre d'ordres passé a été multiplié par 5, c'est un record. 70% des investisseurs se positionnent à l'achat alors qu'avant la crise, c'était plutôt 50%. Ils parient clairement sur une hausse future.

Vous attendiez-vous à ce scénario sur le courtage ?

Ce n'était pas évident. Lors de la baisse fin 2018, le retour sur le marché des actions avait été assez poussif. Aujourd'hui les clients reviennent car ils considèrent qu'il y a un point bas, ce qui se traduit par 70% des ordres à l'achat. On a une croissance liée à nos nouveaux clients, plus de 530 000 l'année dernière, dont 50% de clients qui ont moins de trente ans. Ce sont donc des jeunes qui tentent la bourse avec un horizon de placement plus long. Avant cela, l'IPO de la FDJ avait remis de la visibilité sur la bourse, ce qui avait participé à l'ouverture de nombreux comptes. 

Comment gérer l'afflux de courtage ?

Boursorama a une activité où les processus sont largement dématérialisés et peuvent absorber de la charge. Pour l'instant, ça tient. Tous nos produits sont disponibles, toutes nos fonctionnalités sont opérationnelles.

"Au final, moins de 10% des effectifs, soit 70 personnes, sont sur site"

Quand il y a eu des mouvements sur la bourse, cela a drivé un certain nombre d'appels, nous y avons répondu et nous avons dû prendre des mesures, comme tous les acteurs du secteur. Au-delà, nous avons dû réduire les horaires d'ouverture du service client joignable par téléphone. Mais nous sommes en mesure de répondre en moins de 48 heures aux mails.

Quid de l'ouverture de comptes courants ?

En avril, nous avons connu une très bonne résistance en termes d'acquisition client, proche de nos niveaux de conquête pré-crise.

Votre service client est-il entièrement passé en télétravail ? En tant que banque, y-a-t-il des fonctions qui ne peuvent pas être effectuées en dehors de vos bureaux ?

Suite à l'annonce du confinement, nous avons aussitôt décidé qui devait en priorité rester sur place. Au final, moins de 10% des effectifs, soit 70 personnes, sont sur site. Les deux tiers sont issus du service client. Nous répondons évidemment beaucoup par mail mais pour le téléphone, nos collaborateurs ont besoin d'être au calme. Sans compter qu'ils doivent traiter des opérations et des informations sensibles. Nous organisons un roulement une semaine après l'autre. Le tiers restant représente des fonctions de back office et les quelques courriers à traiter. La majorité de nos opérations peuvent s'effectuer en ligne mais il y a encore certaines choses qui passent par courrier dans la banque. Pour cette nouvelle organisation, nous avons mis en place des mesures sanitaires dans le respect de la distanciation sociale. Nous servons les repas sur le desk pour palier à la fermeture de la cantine. Nous mettons à disposition des gels hydro alcooliques et des masques.

Personne n'a été mis en chômage partiel ?

Non car les niveaux d'activité sont restés stables voire en croissance. D'autres, comme le crédit, sont en baisse mais les clients demandent des reports. Dans le monde de la banque, Boursorama est une petite structure. Par exemple, l'équipe crédit conso ne comprend que six personnes. Certaines petites équipes ont été réaffectées à d'autres tâches, donc n'avons pas eu besoin de mettre en place du chômage partiel.

Comment se traduit le déconfinement chez Boursorama comme vous n'avez pas d'agences physiques ?

Boursorama a décidé fin avril de reporter le début du déconfinement afin de voir comment la situation évolue jusqu'à début juin. Nos équipes restent donc, strictement, dans la même configuration jusqu'au 5 juin inclus, en termes d'effectifs présents sur site comme de mesures sanitaires.

Pensez-vous que vos revenus seront satisfaisants en 2020 ?

Globalement, nous pensons être dans les niveaux de revenus attendus. Mais cela reste difficile de se projeter dans un environnement avec tellement d'inconnus. Avec des activités en baisse, d'autres en hausse, on se dit qu'on devrait globalement être à peu près stable. Nos roadmaps restent valables, il n'y a pas de grand bouleversement. Nous restons axés sur l'évolution de notre offre et l'accompagnement de notre croissance. Notre force aujourd'hui est d'être agile. Nous n'avons pas de boule de cristal mais nous avons au moins des leviers d'adaptation.

Aurore Gaspar est directrice générale adjointe de Boursorama depuis janvier 2018. Avant de rejoindre cette banque en ligne, elle a passé près de 14 ans au sein du groupe Société Générale (dont Boursorama est une filiale). Elle a notamment été directrice adjointe du département payment and cash management.

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