Cédric Malengreau (Arkéa) "Le déconfinement d'Arkea a comme principe directeur le maintien massif au télétravail"

Le JDN poursuit sa série d'interviews de dirigeants face au coronavirus. Le nouveau directeur du secrétariat général de la banque coopérative en dit plus sur l'organisation des collaborateurs, au siège comme en agence.

JDN. Depuis le début de la crise, combien de prêts garantis par l'Etat (PGE) avez-vous octroyés ?

Cédric Malengreau, directeur du Secrétariat général et de la communication institutionnelle d’Arkéa. © Arkéa

Cédric Malengreau. Depuis que nous avons mis en place les dispositions nécessaires, à savoir le 25 mars, nous avons reçu plus de 7 000 sollicitations pour l'équivalent de 1,2 milliard d'euros. Nous en avons déjà enregistré 6 100. Les autres dossiers sont en cours d'étude et d'analyse. Nous avons fait preuve d'un grand esprit d'ouverture dans l'octroi et le traitement de ces prêts garantis. Les refus sont dans la moyenne du secteur. Il faut savoir que pour refuser un dossier, nous devons rendre des comptes, cela fait l'objet de contrôles. 

Quels sont les autres impacts de la crise liée au coronavirus chez Arkéa ?

Sur le plan organisationnel, nous avons activé un plan d'urgence et de poursuite de l'activité. Nous avions anticipé un scénario de confinement. Les mesures annoncées n'ont donc été qu'une demi-surprise. La quasi intégralité des effectifs du siège est passée en télétravail. Les caisses locales ont été fermées au public mais elles ont continué à fonctionner avec environ  50% des effectifs pour assurer une continuité de services. C'est une période très active pour les banques car elles doivent soutenir davantage encore leurs clients, en particulier les professionnels afin de les aider à mettre en place des solutions de trésorerie, des reports d'échéances, mettre en place des PGE... 

Est-ce que la période de confinement vous a poussé à accélérer sur certains projets digitaux ?  

Pas vraiment à les accélérer car de nombreux pans de notre offre sont déjà digitalisés, ainsi que nos parcours clients. Mais cela a confirmé leur bien fondé. Il a tout de même fallu faire des ajustements, comme le relèvement du plafond sans contact de 30 à 50 euros. Il s'agissait principalement d'adaptations techniques pas toujours évidentes. Nous tirons également entre autres  enseignements de cette période de confinement, le besoin d'accélérer sur le sujet de la signature électronique et celui d'être encore plus vigilants sur l'exposition à la fraude et au phishing, la période étant très propice à cela. 

Nous sommes entrés en phase de déconfinement. Comment cela se traduit-il chez Arkéa?  Allez-vous rouvrir vos agences ?

"Nous avons reçu plus de 7 000 sollicitations de PGE pour l'équivalent d'1,2 milliard d'euros"

Nous allons procéder à un déconfinement extrêmement progressif, avec comme principe directeur le maintien massif du télétravail. Au siège, environ 180 personnes sont présentes contre 1 500 habituellement. Nous avons mis en place une gestion de file d'attente à l'accueil, matérialisé les parcours et apposé de l'affichage pour les gestes barrières. Le port du masque est obligatoire dans tous les bureaux et espaces communs. Nous avons interdit les réunions, nous continuerons à les faire via Google Meet y compris entre des personnes sur site. Cette situation peut paraître étonnante mais cela incite nos collaborateurs à rester leur domicile. Pour les caisses locales, nous maintenons l'organisation actuelle encore deux ou trois semaines. C'est-à-dire avec des équipes légères sans ouverture au public. Nous ne rouvrirons pas les agences au public avant d'y voir plus clair. 

Envisagez-vous de réduire le nombre d'agences dans le futur ?

C'est une réflexion que nous devons avoir sur la durée et pas de manière conjoncturelle. L'importance d'agir en proximité, que ce soit en termes de production, d'alimentation, d'agriculture, est un autre enseignement que nous tirons de cette crise. A être dépendant de territoires éloignés, on crée des fragilités. Il va falloir prendre un peu de temps pour bien analyser le bon dosage à trouver entre ce besoin réaffirmé de proximité et le besoin de services digitalisés. Notre position reste de maintenir des présences fortes sur nos territoires, comparés à d'autres banques, tout en digitalisant fortement notre proposition. 

Allez-vous normaliser le télétravail ?

Nous avons abattu un certain nombre de tabous sur le télétravail à tous les niveaux, que ce soit pour les collaborateurs, les managers mais aussi les organisations syndicales, qui peuvent y voir des opportunités mais aussi des freins. Il faudra engager une réflexion et des négociations collectives. Il y a beaucoup d'opportunités et d'enseignements à tirer de cette crise : la souplesse de nos organisations passe sans doute par le télétravail.

En termes d'activités, quelles sont vos prévisions pour l'année 2020 ? 

Il est difficile de les apprécier avec aussi peu de recul. Certaines activités sont à l'arrêt, d'autres sont très actives. Il est encore trop tôt pour tirer des bilans consolidés en termes d'impact. Une fois cette période particulière passée, comment sera la reprise ? Sera-t-on dans une dynamique pessimiste ? Ou est-ce qu'au contraire ça va se traduire en "années folles" comme après certaines crises ? On a bien du mal à le percevoir. Quelle va être la réponse apportée par les consommateurs et les citoyens à l'issue de cette phase de l'arrêt de l'économie ? Là est la vraie inconnue. 

Cédric Malengreau est directeur du secrétariat général et de la communication institutionnelle d'Arkéa depuis fin mars 2020. Il a rejoint le groupe Arkéa en 2007, comme responsable du département contrôle périodique métiers, à Brest. Depuis février 2018, il occupait le poste de directeur général d'Arkéa Investment Services, entité qui regroupe les sociétés de gestion d'actifs et les activités de banque privée. Diplômé d'Audencia Nantes , il a assuré pendant près de huit ans des missions d'audit chez PwC et le groupe Bolloré et de conseil en audit et contrôle interne pour le compte de groupes internationaux au sein de Deloitte Consulting. 

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