Le séisme FTX n'en finit plus de secouer les cryptos et le Web3

Le séisme FTX n'en finit plus de secouer les cryptos et le Web3 La faillite de FTX ne se contente pas de faire chuter le cours des cryptomonnaies. D'importants acteurs tanguent, la méfiance est généralisée et l'afflux de régulation à venir pourrait nuire à l'innovation.

Vendredi 11 novembre 2022, la nouvelle tombe. L'empire de Sam Bankman-Fried (SBF) n'existe plus en tant que tel. La plateforme d'échange FTX, son équivalente destinée au marché des Etats-Unis (FTX.US) et le fonds d'investissement crypto Alameda Research, ont été placés sous le régime des faillites outre-Atlantique.

L'épilogue d'une semaine très difficile pour l'écosystème du Web3 ? Las, le lendemain, la nouvelle d'un piratage des plateformes FTX se propage. Au départ, on parlait d'un hack de 370 millions de dollars. Finalement, il pourrait se compter en milliards. Certains soupçonnent SBF d'être derrière le vol des fonds de ses clients, ce qui reste à prouver. Ce qui est quasi-certain, c'est que les utilisateurs de FTX ne devraient jamais revoir leur argent.

Le séisme provoqué par la chute de FTX est inédit dans les cryptos et probablement le pire depuis la chute de la plateforme Mt. Gox en 2014. Il a, à la fois, des conséquences à l'intérieur même de l'écosystème, mais aussi auprès des personnes externes.

Crise interne : les cryptos et les acteurs impactés

Une baisse importante, mais contenue, du marché des cryptomonnaies

A chaque mauvaise nouvelle, le dégât le plus courant et le plus attendu, c'est bien entendu la chute des marchés. Et l'affaire FTX n'a pas dérogé à la règle. Le Bitcoin (BTC) a perdu près de 20% et la majorité des autres cryptomonnaies a connu une chute encore plus importante.

Cependant, alors que beaucoup d'observateurs s'attendaient à un cataclysme, une chute de 20% pour une affaire aussi grave apparaît comme contenue. En effet, le BTC a résisté et est resté au-dessus du seuil des 16 000 dollars. De même, Ethereum est resté assez loin du seuil des 1 000 dollars.

Néanmoins, la baisse a été bien pire pour certains tokens. On pense notamment au FTX Token (FTT) et à Solana (SOL). La chute d'environ 90 % est logique pour le premier, puisqu'il est tout simplement le jeton de l'écosystème FTX. Or, si FTX n'existe plus, que va devenir le FTT ? Pour Solana, c'est un autre sujet et l'avenir du projet est en jeu.

BlockFi, Solana, Crypto.com : des gros pourraient tomber

L'empire de SBF avait investi dans de nombreux projets et protocoles du Web3 (avec en partie l'argent de ses clients, on le sait aujourd'hui). Certains d'entre eux étaient donc très dépendants de FTX et d'Alameda Research.

Tout d'abord, nous pensons à Solana. En effet, Alameda détenait plus de 800 millions de dollars en SOL. Ainsi, dès que les rumeurs d'insolvabilité ont commencé à se répandre, le SOL a bien plus chuté que les autres. Au final, il a perdu près de 60 % de sa valeur et des milliards se sont envolés. Les équipes de développement du projet semblent perdues et, sans solution rapide, l'avenir de Solana est sombre.

Ensuite, la plateforme BlockFi est en danger. Ancienne concurrente de Celsius, qui a fait faillite l'été dernier, dans les prêts garantis en cryptos, BlockFi a bloqué les retraits des utilisateurs. La raison ? Une exposition de plus de 400 millions de dollars à FTX. Là encore, sans sauveur de la dernière chance, difficile de voir comment la plateforme américaine survivra au séisme FTX.

Enfin, de nombreuses plateformes d'échanges ont tangué. On pense tout particulièrement à Crypto.com. Cette dernière a en effet des ressemblances avec FTX, notamment dans le marketing agressif. En outre, sa preuve de réserves a montré qu'elles étaient constituées de 25% de Shiba Inu (SHIB), une crypto qui n'est qu'une blague. En conséquence, des utilisateurs ont fui la plateforme singapourienne, qui a tout fait pour rassurer, en vain.

Crise externe : investisseurs et régulateurs perdent confiance

2022 : l'annus horribilis des investisseurs cryptos

La chute de FTX est, espérons le, la conclusion d'une année particulièrement difficile pour l'écosystème crypto et ses utilisateurs. En effet, en l'espèce de six mois, le Web3 a subi trois chutes majeures.

La première chute est celle du protocole Terra (LUNA) suite à la perte de parité de son stablecoin, l'UST, avec le dollar. Alors en vogue et deuxième protocole de la finance décentralisée (DeFi), Terra a disparu du jour au lendemain, en voyant des milliards s'envoler pour des investisseurs qui ont tout perdu.

La seconde chute est une conséquence directe de celle de Terra : Celsius Network. La plateforme, qui offre des prêts garantis en cryptomonnaies et des rendements intéressants pour les prêteurs, a bloqué les retraits quelques jours après la chute de Terra. Celsius a finalement été déclarée en faillite au cours de l'été. Là encore, ce sont des milliards de perdus pour les investisseurs.

Terra a également entraîné la disparition d'outils moins connus, comme Voyageur Digital et Three Arrows Capital. Ce dernier était un fonds d'investissement singapourien, qui avait placé de l'argent un peu partout, notamment dans… Terra.

Le séisme FTX est donc le coup de grâce pour de nombreux investisseurs cryptos. Alors que l'écosystème du Web3 a besoin d'elles pour attirer de nouveaux utilisateurs, la confiance envers les plateformes d'échange centralisées semble entamée. Il faudra de longs mois pour la restaurer, qui passera probablement par une réglementation bien plus ardue.

Une régulation drastique à venir ?

Contrairement à une idée reçue bien tenace, le Web3 n'est ni un Far West ni un écosystème sans loi. De nombreux pays européens ont une réglementation propre, dont la France. Les Etats-Unis appliquent certaines dispositions financières qui obligent les plateformes d'échange à créer une entité spécialement dédiée au marché américain. Enfin, le règlement MiCA arrive en Europe et entrera probablement en application en 2024.

Toutefois, il est aujourd'hui acquis que cette réglementation n'est que le début d'un processus de régulation accrue. L'affaire FTX est en effet du pain béni pour les régulateurs du monde entier et toutes les personnes qui répètent à longueur de journée que le marché des cryptomonnaies devrait être mieux encadré.

Alors que MiCA n'est même pas publié au Journal Officiel de l'Union européenne, certains parlent déjà d'un MiCA 2. Outre-Atlantique, la réglementation va être renforcée et il y a fort à parier que cela va être la même chose en Asie.

L'année 2023 devrait donc être celle d'une régulation mondiale du secteur. Pour le meilleur (transparence des plateformes d'échange) comme pour le pire (frein à l'innovation).