Rénovation énergétique : deux pas en avant, trois pas en arrière

Décisions gouvernementales sur la rénovation énergétique. Recul dans les efforts écologiques. Importance de maintenir les objectifs à long terme de neutralité carbone. Appel à un soutien accru.

Passoire or not passoire ? Voici la question que doivent se poser de nombreux propriétaires de logements à l’heure d’effectuer leur Diagnostic de Performance Énergétique, le fameux DPE.

Et pour cause. Avec des critères qui évoluent, difficile d’y voir très clair. Mais plus que le DPE, c’est toute la politique écologique et économique du gouvernement en lien avec le logement qui n’est pas claire. Dernière annonce en date ? Un coup de rabot d’un milliard d’euros sur l’aide MaPrimeRénov’ qui permet aux propriétaires de rénover leurs biens et de réduire l’empreinte de leur logement sur l’environnement. En 2023, 623 790 biens ont été rénovés grâce à MaPrimeRénov’ selon l’Agence Nationale de l’Habitat. Une diminution de 7% par rapport à 2022, loin de l’objectif de 700 000 biens rénovés. Alors est-ce le moment de réduire l’effort ?   

Finalement, en ce début d’année 2024, alors que la Loi Climat brigue la neutralité carbone en 2050, le DPE est assoupli pour les surfaces de moins de 40m2 et MaPrimeRenov’ perd son ambition. Est-ce le bon signal à envoyer au marché ? À court terme peut-être, à long terme, on peut en douter.

Des mesures qui visent le court terme au détriment du long terme

Alors oui, le marché en pleine crise a besoin d’une grande bouffée d’air frais et l’assouplissement du DPE répond à ce besoin impératif. Ce sont 140 000 logements classés F ou G qui ne seront plus considérés comme des passoires thermiques alors que ceux classés G seront interdits de location au 1ᵉʳ janvier 2025.

Le Gouvernement, en faisant sortir ces 140 000 logements des critères du DPE, apporte une réponse partielle à l’urgence locative. Mais on ne peut que constater que l’urgence climatique est reléguée au second plan.

Un constat confirmé lorsque le Gouvernement annonce ensuite une coupe d’un montant d'un milliard d’euros sur le dispositif MaPrimeRénov’. La dotation qui devait être augmentée de 1,6 milliard en 2024 sera augmentée de seulement 600 millions d’euros, soit une baisse de 1 milliard.

Comment alors imaginer atteindre la neutralité carbone en 2050 ? Le logement représente 19% des émissions de gaz à effet de serre en France, il reste encore plus de 4 millions de logements classés F ou G et le gouvernement semble faire marche arrière.

De vrais moyens pour enfin transformer le parc locatif

Lors du dernier remaniement ministériel, l’industrie avait pu constater avec optimisme que le portefeuille du Logement était rattaché à celui de la transition écologique. Un bon signal bien vite douché par les premières annonces.

Deux pas en avant, trois pas en arrière, le Gouvernement joue les girouettes sur l’écologie alors qu’il devrait donner un cap ambitieux. Les dernières annonces en lien avec le logement illustrent le manque de moyen chronique pour relever le défi de la transition écologique.

Le DPE bien qu’imparfait, apporte une première pierre à la transformation du parc locatif. Mais dans le même temps, une récente étude affirme que 43% des Français ne savent pas ce qu’est un DPE. Le manque de sensibilisation est criant.

Il est nécessaire d’aller plus loin et d’alerter chaque acteur du marché : locataires, propriétaires et professionnels. Plutôt que de sacrifier les progrès de ces dernières années, il faut donner à ceux qui font vivre le secteur les moyens de faire évoluer en profondeur le parc immobilier.

Il ne faut pas renier la politique de subvention, il faut éduquer chacun et donner à comprendre. Il faut s’appuyer sur les professionnels de la construction et surtout sur les professionnels de l’immobilier. Plutôt que de freiner, il faut accélérer et se donner les moyens de nos ambitions. Une ambition qui peut être portée par les professionnels de l’immobilier.

De réelles opportunités pour soutenir les professionnels de l’immobilier tout en gardant le cap de la neutralité carbone.

Le marché connaît une crise d’une rare intensité et la tension locative atteint des niveaux jamais vus. C’est donc tout un marché qui souffre, à commencer par les professionnels, comme l’attestent les 887 fermetures d’agences en 2023.

Le Gouvernement a donc décidé de lâcher du lest sur le DPE pour soutenir le marché. Une solution à court terme. Mais rappelons que seulement 35% du parc locatif est géré par les agences. La majorité des locations se font de particuliers à particuliers et les professionnels de l’immobilier ont bien du mal à se démarquer aux yeux des propriétaires bailleurs.

Pourtant, le sujet de la réhabilitation du parc immobilier représente une véritable opportunité pour tout le secteur. Avec leur emprise directe sur le marché, les agences et les réseaux sont un formidable levier pour accélérer la refonte du parc. Grâce au volume de lots en gestion, ces derniers peuvent commencer des projets d’ampleur accompagnés d’économies d’échelles importantes en centralisant l’achat des prestations de rénovation.

Pour les bailleurs, c’est une opportunité d’accomplir des travaux indispensables à moindres frais. C’est donc une opération gagnant-gagnant qui a de quoi redynamiser tout le marché en offrant aux agences de nouvelles opportunités de mandats de gestion.

Toutefois, pour réussir ce défi, les pouvoirs publics doivent engager les moyens nécessaires. De la même manière, il est essentiel que les professionnels de l’immobilier s’emparent de ce sujet et saisissent l’opportunité qui se présente. Chacun doit prendre conscience de l’urgence et agir en conséquence !

Malheureusement, les dernières mesures vont à l’encontre de l’ambition indispensable pour relever ce défi si important pour l’avenir. Plutôt que de renier son projet, le gouvernement doit saisir l’opportunité d’accompagner tout un marché vers la transition qui s’impose à tous.