La numérisation pour endiguer le gaspillage de l'eau en France

L'eau est une ressource rare. Pour la préserver, il convient d'améliorer sa gestion, via des solutions numériques, et d'accompagner les collectivités dans la lutte contre les fuites.

L’eau est une ressource rare. Après le « plan anti-sécheresse » en janvier dernier, un ambitieux « plan eau », dévoilé par le Gouvernement, pose les bases d’une volonté d’agir durablement. Dans un contexte où son coût a augmenté - dans certains cas du simple au double - et que les besoins en eau ne cessent de croitre, il est essentiel d’améliorer la gestion de cette ressource, notamment en veillant à réduire les pertes lors de son acheminement.

Un état des lieux mitigé en France

Au cours du 20e siècle, les consommations d’eau ont plus que quintuplé. Qui plus est, à force d'accumuler les épisodes de canicule et de sécheresse, la France voit se tarir son capital d'eau naturelle. Sur le territoire métropolitain, une baisse de 14% a été observée sur la période 2002-2018 par rapport à 1990-2001, selon une récente étude du ministère de la Transition écologique.

En matière de pertes, elles sont aujourd’hui estimées à 20% - un chiffre globalement stable et inférieur à la moyenne européenne fixée à 23%. Et bien que la France soit l’un des pays les plus vertueux en la matière, il n’en reste que les fuites ne cessent d’augmenter d’année en année. Pour cause, un réseau de gestion de l’eau vétuste entrainant des pertes et défauts dans les canalisations.

Parmi les solutions, celle de rénover les quelque 1 296 000 km que représentent le réseau d’eau et d’assainissement vieillissant. Là encore des points restent à éclaircir sur la mise en place d’un tel chantier qui nécessiterait un investissement annuel – estimée à minima à 4,6 milliards d’euros, selon une étude de l’UIE (Union des Industries et Entreprises de l’Eau).

Bien que le Gouvernement souhaite mettre en place un potentiel « Ecowatt » de l’eau afin d’inciter la population à diminuer sa consommation, une des premières nécessités demeure d’accompagner les collectivités dans la lutte contre les fuites d’eau au sein de leur réseau.

Accompagner les collectivités dans leur gestion de l’eau

La distribution d’eau et l’assainissement des eaux usées relèvent de la responsabilité des collectivités. En effet, la réglementation française impose aux élus locaux de mettre en place un plan pour réduire les pertes d’eau et gérer les fuites. Pour parvenir à un meilleur partage de l’eau sur chaque commune, le Grenelle de l’environnement a instauré en 2012 un décret « fuites » garantissant un rendement minimal de 85% de distribution d’eau sans pertes. Pour respecter cet objectif, le dispositif impose une obligation de résultat, soutenue par des aides financières permettant de réaliser les travaux de préservation et de production des ressources, de réduction des fuites et de rénovation du réseau de distribution.

Néanmoins, chaque commune ne disposant pas des mêmes moyens, il est encore difficile pour certaine - à hauteur de 18% - d’atteindre cet objectif. Afin de mener à bien les travaux nécessaires, notamment sur la lutte contre les fuites dans les réseaux ou les interconnexions, il apparaît nécessaire de mutualiser les moyens : le transfert de cette compétence aux Établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à l’horizon 2026 va dans ce sens.

Et pour cause, les conséquences des épisodes caniculaires survenus l’été dernier ont montré que les communes n’étaient pas préparées et armées pour y faire face. Plus d’une centaine d’entre elles ont dû imposer des restrictions d’eau à leurs administrés et certaines ont dû être approvisionnées par citerne. L’actuel niveau d’intempéries - qui permet aux nappes phréatiques de se recharger - ne permet pas aux collectivités d’envisager sereinement l’arrivée de l’été.

Endiguer les pertes grâce au comptage intelligent

Afin d’anticiper rapidement les conséquences d’une situation d’ores et déjà sous tension, des solutions à la fois plus économiques et écologiques existent. Chaque commune a ainsi la possibilité d’améliorer son réseau de distribution d’eau et de réduire les pertes en accélérant sa digitalisation et en améliorant le comptage grâce à l’installation de nouveaux compteurs intelligents capables d’effectuer des relevés à distance. Plus fiables et performants, ces derniers corrigent les erreurs de comptage, pénalisantes pour les revenus de la collectivité, liées aux compteurs vieillissants.

Les économies réalisées pouvant ainsi être réinvesties dans les opérations de recherche de fuite. Pour encourager les collectivités à s’engager pleinement dans cette démarche, les Agences de l’Eau proposent en outre de financer des diagnostics. Bonne nouvelle : dans le cadre du récent « plan eau », ces dernières verront leur budget augmenté de 475 millions d’euros par an et leur plafond supprimé afin d’accompagner au mieux les collectivités.

L’adaptabilité des usages doit lui aussi constituer un point de vigilance : des changements d’activité - dans les commerces par exemple - peuvent induire des modifications de consommation, et donc de pression. L’amélioration du réseau nécessitant une analyse au plus juste, il convient non seulement d’utiliser la bonne technologie de comptage en fonction de l’usage, mais surtout de s’assurer que le modèle choisi est bien dimensionné.

Avec ces nouveaux outils technologiques, les Services de l’Eau améliorent sensiblement leur efficacité opérationnelle face aux fuites et la facturation gagne en précision et en transparence dans le strict respect de l’espace privé. Tarification solidaire ou graduelle incitant à l’économie, maîtrise des pertes et des fuites, construction de stations d’épuration… Toutes ces actions concrètes rendues possibles par les bons choix stratégiques et politiques tendent vers un même objectif : préserver la ressource en eau.