Rafi Haladjian (Sen.se) "Sen.se abordera l'Internet des objets de façon plus mature que Nabaztag"
Quelques mois après la reprise de sa société par Mindscape, le créateur du lapin communicant Nabaztag dévoile quelques facettes de son nouveau projet, Sen.se.
JDN. Vous travaillez depuis plusieurs mois sur votre nouveau projet, Sen.se. De quoi s'agit-il ?
Rafi Haladjian. Quand nous avons lancé notre lapin communiquant Nabaztag (repris en octobre par l'éditeur de jeux vidéo Mindscape après avoir été placé en redressement judiciaure, ndlr.), notre mission était de montrer les possibilités offertes par l'Internet des objets. Nous voulions démontrer que, de la même manière que l'électricité ne sert pas qu'à allumer des ampoules, le Web n'est pas le seul usage d'Internet et que l'on peut tout y connecter. A l'époque, nous avions volontairement choisi un lapin pour marquer les esprits. Aujourd'hui, nous n'avons plus besoin de faire de la provocation ou d'évangéliser le marché. Sans en dévoiler trop, Sen.se abordera la problématique de l'Internet des objets sous un angle plus mature, notamment en termes de richesse et de nombre d'applications. Nous commercialiserons d'abord un seul produit, qui devrait être suivi par d'autres. Mais il ne s'agira pas d'animaux. Dans l'esprit, ce produit sera plus proche du Mirror (lecteur de puce RFID qui reconnaît les objets du quotidien et leur assigne des tâches, ndlr.) que de Nabaztag. Nous débutons actuellement la phase de production, avant la commercialisation prévue au printemps.
Quels enseignements avez-vous tiré de Nabaztag pour nourrir ce nouveau projet ?
Depuis son lancement en avril 2005, nous avons vendu plus de 280 000 Nabaztag pour lesquels ont été développées plus de 200 applications à partir de notre API, ce qui n'est pas si mal. Le problème que nous avons rencontré avec Nabaztag, c'est celui de la prolifération de l'objet lui-même. L'intérêt de la dématérialisation est qu'il n'y a plus de frottement dans la circulation des biens et des contenus. Mais vendre un objet physique implique de trouver des distributeurs, qui se rémunèrent sur la vente de votre objet et en font grimper le prix. Cela rend plus difficile la constitution d'une masse critique d'utilisateurs, capables de produire des applications pour cet objet. Nous passions par ailleurs plus de temps avec nos fournisseurs et distributeurs qu'à fédérer une communauté autour de Nabaztag. Avec Sen.se, je veux avoir une vision plus mature de la prolifération des objets. La solution est peut-être dans le fait de ne pas du tout passer par des distributeurs !
En dehors des objets communicants, qu'attendez-vous du Web en 2010 ?
Qu'il s'y passe enfin quelque chose. Je ne sais pas s'il s'agit d'une fin de cycle ou d'une gélification de l'Internet, mais actuellement tout ce dont on parle se passe entre Apple, Google, Facebook et Twitter. Tout le monde semble attendre avec impatience le moindre de leurs services et les autres acteurs restent confidentiels. A la fin des années 90 ou à la sortie de la crise en 2003, il y avait un foisonnement d'entreprises et d'idées, en Europe comme aux Etats-Unis. Les capital-risqueurs français manquent un peu d'audace, mais j'ai l'impression que même aux Etats-Unis, on n'a rien vu d'intéressant dans le secteur depuis Twitter. Personnellement, je souhaite l'émergence de nouveaux noms, de nouveaux services vraiment intéressants. Un peu ce qu'était une entreprise comme Google à ses débuts.