Comment l'IoT contribue à réduire l'empreinte carbone des industriels
La réduction des émissions de gaz à effet de serre est un sujet épineux pour les entreprises. En optimisant les transports ou les opérations de maintenance, les objets connectés peuvent les aider à atteindre leurs objectifs.
L'Union européenne s'est engagée à atteindre la neutralité carbone en 2050. Si l'échéance peut paraître lointaine, la réduction des émissions de gaz à effet de serre est déjà une priorité pour beaucoup d'industriels. "On en parle depuis quelques années déjà mais on sent une accélération de l'intérêt pour le sujet depuis le début de la crise sanitaire", observe Emmanuel Privat, responsable IoT business development chez l'éditeur Software AG. L'expert en est persuadé : les industriels veulent s'emparer au plus vite de cette thématique pour éviter tout risque de sanction réglementaire le moment venu. Et pour réduire leur empreinte carbone, un outil s'est vite avéré indispensable : l'IoT. "Sans objet connecté pour obtenir des données, il ne peut y avoir de décarbonation", assure Fabio Bocchi, directeur des ventes en France pour l'éditeur Aveva, filiale de Schneider Electric qui a équipé ses propres usines pour les rendre plus vertes.
Comment s'y prendre pour décarboner efficacement son industrie ? "Beaucoup ne savent pas par où démarrer", reconnaît Fabio Bocchi. La clé, c'est, selon lui, de dresser un état des lieux de l'activité, d'évaluer par IoT les postes les plus émetteurs de gaz à effet de serre et d'établir une feuille de route. Une démarche qu'approuve Emmanuel Privat de chez Software AG : "Il faut commencer petit pour voir ce qui fonctionne, tout en envisageant comment ensuite passer à l'échelle. Mais pour cela, il faut des données et l'IoT est le meilleur moyen de les obtenir."
Les clients débutent généralement par deux sujets : l'optimisation de la logistique pour réduire les transports à vide de camions et l'amélioration de la consommation énergétique des usines. Réviser les trajets à effectuer conduit, en plus d'une réduction de CO² de l'ordre de 20 à 30% en moyenne, à une plus grande efficacité. "L'un de nos clients, qui livre des machines à laver, a obtenu des gains opérationnels puisqu'une meilleure planification lui a permis de passer de 7 à 11 produits livrés par jour en optimisant les itinéraires", raconte Fabien Bréget, PDG et fondateur de la société de smart mobilité Nomadia. Bien sûr, cela implique de mettre en place des outils de prise de rendez-vous pour les livraisons, des capteurs de géolocalisation et d'établir une planification en conséquence. En Finlande, Aveva travaille avec le producteur de diesel renouvelable et de carburéacteur Neste afin de l'aider à optimiser ses processus entre ses différents sites dans le monde et devenir neutre en carbone d'ici 2035.
1 800 tonnes de CO²e évitées sur les chantiers Hesus en France
Autre secteur attentif aux consommations et aux émissions des moyens de transports : le BTP. Hiboo, start-up française spécialisée dans la digitalisation d'équipements de construction, a intégré dans sa plateforme un nouvel indicateur la mesure du CO²e (équivalent CO² qui prend en compte plusieurs gaz à effet de serre) lié à la consommation de carburant des équipements. L'objectif : aider ses clients dans la réduction de leur empreinte carbone. Des capteurs positionnés sur les camions permettent ainsi de savoir s'ils sont à l'arrêt ou non, combien est-ce qu'ils consomment, quels sont leurs trajets et ce qu'ils transportent…
Même démarche chez Hesus, entreprise française spécialisée dans l'évacuation et la valorisation des terres, la gestion des déchets et le déblais des chantiers. "Le transport par camion des matières premières et la réutilisation des terres de chantiers sont les deux plus gros leviers du BTP pour agir sur le sujet", assure Emmanuel Cazeneuve, fondateur et PDG d'Hesus. Grâce aux solutions d'optimisation proposées pour la gestion des terres excavées, "1 800 tonnes de CO²e ont pu être évitées sur les chantiers Hesus en France en 2021, soit l'équivalent des émissions de CO² de 1 800 allers-retours Paris-New York en avion en une année", d'après une étude réalisée avec le cabinet Deloitte. Hesus collabore désormais avec les centres de traitement pour échanger entre les partenaires les données IoT et automatiser la réception des gravats et élaborer de nouveaux services avec les transporteurs.
Au cœur des usines, ce sont les consommations des machines et la gestion des déchets qui sont ciblés par l'IoT. Chez Software AG, on conseille aux acteurs d'analyser en premier lieu les circuits d'air comprimé. "En Europe, 10% de l'électricité utilisée par l'industrie sert à produire de l'air comprimé. Ce dernier est présent dans la quasi-totalité des secteurs, de l'agroalimentaire à l'automobile, souligne Emmanuel Privat. Or, les réseaux au sein des usines enregistrent un taux de fuite moyen allant de 30 à 40%." Des pertes que peuvent prévenir les objets connectés dans leur rôle de maintenance prédictive. C'est sur cet usage que Software AG a travaillé avec l'ESN française Inetum pour mesurer par débitmètres connectés les consommations des clients. Software AG a notamment digitalisé les 25 000 compresseurs d'air dans le monde de Gardner Denver, fournisseur de compresseurs, de soufflantes et de pompes à vide.
Aveva considère, de son côté, que les industriels doivent installer davantage de capteurs IoT pour recueillir plus de données et être plus efficaces. "Nous avons fait évoluer les capteurs pour garantir leur fiabilité et leur aspect plug and play", indique Emmanuel Cazeneuve, fondateur et PDG d'Hesus, pour encourager ses clients en ce sens. "L'IoT détient un grand avantage : les capteurs peuvent servir pour plusieurs usages et plusieurs ROI. Ainsi, ils permettent d'avoir une vision large pour la transformation des métiers", conclut Emmanuel Privat de chez Software AG.