Sanction disciplinaire: une fonctionnaire utilise ses collègues à des fins personnelles puis demande l'annulation de sa sanction devant le juge

Sanction disciplinaire: une fonctionnaire utilise ses collègues à des fins personnelles puis demande l'annulation de sa sanction devant le juge Par le jugement n°2300621, la justice administrative valide la proportionnalité de la sanction disciplinaire d'une agente pour détournement de moyens publics.

Le jugement n°2300621 du Tribunal administratif de Montreuil pose la question de la responsabilité disciplinaire d'une adjointe administrative territoriale face à des manquements répétés à la déontologie. C'est une fonctionnaire, plus précisément une adjointe administrative de la commune du Blanc-Mesnil, en banlieue parisienne. Le 1er décembre 2017, elle débute un nouveau poste : cheffe du service des seniors. 

Le 17 mars 2021, une plainte est déposée contre elle pour des faits qui auraient débutés en janvier 2018, soit un mois après sa prise de poste. La plaignante est une octogénaire qui fréquente le service des seniors. Elle dénonce une escroquerie de la fonctionnaire. "Elle précise qu'elle a donné de l'argent à la fonctionnaire afin qu'elle paye des courses, des fournitures scolaires pour ses enfants, de l'essence, des restaurants lors des sorties organisées par la ville et des vêtements pour un voyage au Canada", peut-on lire dans la décision n°2300621 du tribunal administratif de Montreuil. Et vous n'êtes pas au bout de vos surprises…

Le culot de la fonctionnaire va bien plus loin. "L'octogénaire mentionne que la fonctionnaire lui a demandé d'inscrire son nom sur son testament et qu'elle détenait le code de sa carte bancaire ainsi que les clés de son logement", précise la décision juridique. Des faits incroyables qui sont fermement contestés par la fonctionnaire. Pour se défendre, elle affirme par exemple n'avoir aucun intérêt à acheter des fournitures scolaires pour son fils car elles sont déjà fournies par son établissement. 

A l'issue de cette plainte, une enquête administrative est ouverte contre la fonctionnaire, et les témoignages pleuvent. Les agents du service qu'elle dirige décrivent des cris, des insultes et un manque de considération à leur égard. "Ils témoignent que c'est une personne manipulatrice avec une volonté de nuire aux agents qui la contredisent. Ils ajoutent que l’intéressée a utilisé sa proximité supposée avec l’élue de secteur, compagne du maire de la commune, pour dissuader les agents de dénoncer les faits à ses supérieurs hiérarchiques", note la décision. Et ce n'est pas fini !

La fonctionnaire utilisait ses agents à des fins personnelles. "Elle a demandé aux agents de son service de l'accompagner faire ses courses, de déposer son plus jeune fils à l'école chaque matin et de préparer ses vacances familiales", liste le rapport d'enquête. La liste pourrait s'arrêter là mais... non. Car lorsque la fonctionnaire quittait son poste sans autorisation, les agents étaient chargés de répondre à ses mails à sa place. 

Enfin, les critiques pleuvaient contre les élus municipaux. "Il ressort des témoignages que la fonctionnaire critiquait régulièrement le maire car elle n’avait pas obtenu une promotion, et qu’à la suite de la dégradation de ses relations avec l’élue de secteur, elle a également émis des critiques à son encontre, l’accusant notamment de racisme et de mettre en place des pratiques discriminatoires", conclut l'enquête.  

Devant tous ces faits, la commune exclut l'adjointe administrative pendant un an par un arrêté pris le 22 octobre 2022. La fonctionnaire conteste cette sanction estimant que les faits ne sont pas exacts et qu'ils ne justifient pas une telle condamnation. Elle met en avant son absence de sanction les années précédentes et le fait que son équipe ne s'est pas plainte d'elle. Elle soutient que "la décision est en réalité justifiée par le souhait de l’élue de secteur de l’évincer du service."

Le Tribunal administratif de Montreuil est chargé de statuer sur l'affaire le 14 octobre 2025. Sans surprise, il a confirmé la sanction et rejeté toutes les demandes de la fonctionnaire. Il affirme que les faits sont établis par les nombreux témoignages et que l'abus de confiance de l'octogénaire est avéré. Il juge la sanction proportionnelle à la gravité des faits. Un an d'exclusion pour tous ces comportements, on peut même dire qu'elle s'en sort bien.