Plaidoyer pour plus de managers philosophes !

La tendance émergente du recours à la philosophie pour aborder les problèmes de gestion des collaborateurs témoigne d'une évolution managériale profonde. Ou comment cette nouvelle approche par la philosophie devient un savoir-faire managérial à part entière.

Le manager du XXIème siècle sera philosophe ou ne sera pas ! Depuis deux ans, un nouveau centre d’intérêt semble émerger chez les managers : la quête du sens dans le travail par le recours à la philosophie. Les dessins de Gorce, chroniqueur du Monde, de samedi dernier, le blog et le livre de Bernard Girard, consultant en philosophie, le regroupement « philosophie & management », autant d’exemples parmi d’autres qui illustrent cette tendance.
Nouvelle marotte des managers ou de ceux qui s’en font l’écho, dont je fais d’ailleurs partie ? Peut-être.
En tout cas, force est de constater que l’objet de la marotte, la quête du sens pour le manager, justifie la démarche: Prendre des décisions lorsque l’entreprise doit non seulement travailler pour ses actionnaires, changeants, mais aussi des parties prenantes à l’influence grandissante, aux exigences contradictoire et, elles aussi changeantes, rallier toutes les troupes de l’entreprise à cette cause (mais laquelle aujourd’hui, au fait ?) sachant que le collègue tente de faire de même avec ses subordonnés, à qui l’on a proposé de prendre eux-mêmes des initiatives, relève d’une vraie prouesse… et peut même être épuisant !

Face à cette quête, quoi de plus naturel que de s’adresser à la philosophie ? Seulement voilà, contrairement à leurs prédécesseurs, les philosophes contemporains semblent s’intéresser trop peu à la question du travail. La dernière à s’intéresser de manière explicite aux méthodes de management, c’est Simone Weil… dans les années 30… Eventuellement Michella Marciano aborde les relations entre clients et entreprises dans son dernier ouvrage, Le contrat de défiance. Alors, comment faire ? Aux managers de devenir eux-mêmes philosophes ! Mais comment ?
Les philosophes du travail, comme Simone Weil, décrivent, certes de manière très critiques, des situations d’entreprises, qui ont évolué depuis !
Pour autant, une (re)lecture de certains de ces textes, souvent abordables, peut fournir des pistes de réflexion au manager en quête de sens dans son travail. L’éthique à Nicomaque d’Aristote permet de réfléchir sur la question du toujours plus, comme acte immoral car sans fondement. D’autres philosophes fournissent même des « méthodes », des postures philosophiques dont chacun peut s’inspirer, postures qui feront l’objet de prochaines chroniques, et qui invitent à la prise de recul par rapport à l’existant : Descartes (Discours de la méthode) rappelle qu’il faut prendre tout problème en le décomposant et le résoudre en travaillant sur chaque composante par ordre de difficulté croissant.  Enfin, Alain (Propos sur le bonheur) invite à une démarche pour plus de recul : « lorsqu’une proposition m’ai soumise, je la nie. C’est ma manière de l’essayer ».

Autant de pistes pour permettre de sortir le nez du guidon et redonner sens à son travail !