Process consultation ou comment se faire des amis

A quoi ressemble le donneur d’aide dont nous aurions besoin ? Y a-t-il question plus importante dans la vie ?

Edgar Schein, cet inconnu. Après sa thèse, il enquête sur les prisonniers américains des Chinois, lors de la guerre de Corée. Un travail qui fait grand bruit. C'est le début des études modernes sur la question de la manipulation ou influence. Puis, dans le prolongement des travaux de Kurt Lewin, il applique la science à la psycho-sociologie. Notamment l’anthropologie : c’est probablement à lui que l’on doit le terme "culture d’entreprise". En outre il est l’un des fondateurs de "organization developement", l’étude des techniques qui permettent à une organisation de se développer sainement (de même qu’il y a "personal development", pour les individus). Beaucoup de ce que la sociologie des organisations enseigne vient de là. Mais aussi des stars de la littérature du management, telles que Warren Benis et ses études du leadership. Un de ses apports les plus importants à notre vie quotidienne, est celui de process consultation et de donneur d’aide. Le donneur d’aide joue un rôle critique dans le changement. Voici comment le donneur d’aide peut changer votre vie.

Y a-t-il un donneur d’aide dans la salle ?

La problématique de l’aide. Qu’est-ce que j’attends de quelqu’un qui peut m’apporter de l’aide ? Comment je le reconnais ? Comment je le sélectionne ? Je suis entouré de psychologues. Je leur raconte ma vie, comme je le fais avec tout le monde. Beaucoup me disent que je me présente comme une victime (ah bon ?), et qu’une victime n’est jamais innocente. Je finis par leur répondre que je ne leur ai rien demandé, et surtout pas de me créer des problèmes. Mais il en existe d’autres qui trouvent ma vie amusante. Ce que j’ai observé illustre telle théorie bien connue, me disent-ils. Et il arrive que, curieusement, cette théorie m’ouvre les yeux. Edgar Schein donne cette définition d’un "donneur d’aide" : c’est quelqu’un dont l’aide est efficace ! C'est l'usage qui nous dit si quelqu'un peut nous être utile. Mais cette définition est beaucoup plus puissante qu’il n’y paraît. Un « donneur d’aide » n’est pas une figure d’autorité. Il ne me connaît pas mieux que je ne me connais. Je suis maître de mon sort. Le donneur d’aide est un catalyseur qui contribue à créer des conditions qui font que je trouve une solution à mon problème du moment. Une solution qui me convient. Le véritable entraîneur sportif est un donneur d’aide au sens d’Edgar Schein. Il ne pourra jamais courir aussi vite que le champion qu’il entraîne. Mais il peut lui donner le conseil que seul le champion saura mettre en œuvre, qui le fera gagner. Regardez autour de vous. Qui répond à ces critères ? Vos amis et votre famille ont peu de chances d’être de bons candidats, en tous cas. Tous ont des vues sur vous. 

Process consultation

La technique du donneur d’aide, selon Edgar Schein, s’appelle "Process consultation". Ce que fait un donneur d’aide, c’est vous aider à analyser les "processus" de votre vie. Hautement bizarre et inattendu ?

Imaginons que vous soyez président de la République. Vos problèmes ? Les dettes laissées par vos prédécesseurs ? La manifeste arriération du Français ? Edgar Schein vous répondra que vous vous égarez. Dans les processus qui vous permettent de faire votre travail, il y a quelque-chose que vous pourriez améliorer. Ce n’est probablement pas grand’ chose. Mais cela peut tout changer. Votre vie, et celle de vos administrés. 

Comment aider

La question n’est pas secondaire. Car, qu’il s’agisse de nos enfants, de nos amis, de l’entreprise dans laquelle nous sommes entrés pour la transformer numériquement, ou de la planète dont nous voulons refroidir le climat, nous n’arrêtons pas de vouloir aider. Les travaux d’Edgar Schein amènent à se demander si nous nous y prenons intelligemment. Et si cela n’explique pas pourquoi ceux dont nous ne voulons que le bien nous sont si peu reconnaissants. Voire, même, hostiles. Car le premier processus qu’il faut respecter, avant de pouvoir aider l’autre, est celui de l’acceptation. Je ne peux prétendre à être un donneur d’aide que si j’ai été reconnu légitime comme tel. Et cela demande un examen de passage. Il ne suffit pas d’avoir été nommé "chief data officer", d’avoir été élu président, ou d’avoir mis au monde des enfants pour que sa bonne volonté soit reconnue, et efficace. Oubliez vos diplômes, vos états de service, votre grade social, ou autre complexe de supériorité. 

Le pouvoir sans pouvoir

Seul un saint peut-être donneur d’aide ? Sa récompense est dans l’au-delà ? 

Les travaux sur le changement montrent que celui qui fait changer les organisations est un "donneur d’aide", pas un matamore. En effet, en rendant des services, le donneur d’aide fait changer la société. Mais, aussi, parce qu’il a rendu service, il peut en demander, à son tour. Le donneur d’aide a du pouvoir sans pouvoir. Le pouvoir réel. Et si l'aide était le moteur de la société ?