En Marche vers une nouvelle réforme de la formation professionnelle ?

Avec l’élection d’Emmanuel Macron, la formation professionnelle connaîtra très probablement une réforme d'envergure. La volonté de rompre avec le système actuel a été affirmée dans le programme de l’ancien candidat d’En Marche !

La formation professionnelle à l’épreuve des élections présidentielles

Depuis 2002, les parties prenantes de la formation professionnelle en France se sont habituées à vivre la réforme au gré des scrutins présidentiels. L’élection de Jacques Chirac en 2002 avait été suivie d’un texte de loi en 2004, portant création du contrat de professionnalisation, son ouverture aux personnes au chômage de plus de 25 ans, ainsi que la mise en œuvre du droit individuel à la formation (DIF), première étape dans l’affirmation de droits attachés à la personne.

En 2007, Nicolas Sarkozy avait affirmé sa volonté d’une refonte du système, afin de le rendre (déjà) plus simple et plus transparent. Cela s’était traduit par une loi adoptée en 2009, réformant sa gouvernance, avec la création du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP), et la diminution du nombre d’Opca. La loi de 2009 avait porté sur les fonts baptismaux le dispositif de préparation opérationnelle à l’emploi (POE) ouvert aux demandeurs d’emploi et organisé la portabilité du DIF.

Le quinquennat de François Hollande n’a pas échappé à cette règle, avec la loi du 5 mars 2014, adoptée dans le prolongement de l’accord sur la formation professionnelle signé par les partenaires sociaux fin 2013. Plus ambitieuse encore, cette réforme a été marquée par la suppression de l’obligation de financement au titre du plan de formation, la création du compte personnel de formation (CPF) en lieu et place du DIF, ainsi que celle du conseil en évolution professionnelle (CEP). Dénonçant comme ses prédécesseurs le manque d’efficacité de la formation professionnelle en France, sa complexité et son opacité, l’ancien candidat d’En Marche ! et désormais Président de la République s’est fixé pour objectif de porter lui aussi le fer contre le système. Avec quelle ambition ? Le rendre plus simple, plus juste et transparent.

Vers une affirmation plus poussée des droits attachés à l’individu

Sa complexité est de nouveau mise en exergue, qu’il s’agisse de l’accès à la formation ou des choix qui seraient bridés par un système de listes limitées de formations ne correspondant pas toujours aux aspirations individuelles, ni aux besoins du marché du travail. Dans le viseur de l’ancien candidat d’En Marche ! figure le système de listes de certifications éligibles au CPF, régulièrement mises à jour depuis 2015. La dernière version de la liste nationale interprofessionnelle (LNI) des certifications éligibles au CPF validée le 9 mai dernier n’en comptait pourtant pas moins de 2 900, sans compter les listes de branches, ainsi que les listes régionales.

Au-delà de la formation, la priorité devrait être mise sur l’accompagnement et l’orientation. Le conseil en évolution professionnelle (CEP) créé par la Loi du 5 mars 2014 pourrait dans cette perspective bénéficier de financements dédiés. Afin d’accompagner par ailleurs la montée en charge du compte personnel de formation (CPF), une mutualisation du CPF avec le CIF pourrait être mise en œuvre.

Enfin, pour rendre le système plus efficace et plus juste, une partie de la collecte qui résulte de l’obligation légale de participation à la formation (fixée actuellement à 1% de la masse salariale) devrait diminuer, voire disparaître, pour être convertie en droits individuels pour les actifs. Dans ce cadre, les individus auraient la possibilité de s’adresser directement aux prestataires de formation.

Ces droits seraient d’autant plus élevés que les besoins de qualification seront importants. Dans cette perspective, Emmanuel Macron propose ni plus ni moins de supprimer le rôle d’intermédiation des Opca, dont les missions devraient se réorienter vers le conseil apporté aux entreprises.

Priorité aux jeunes et demandeurs d’emploi de longue durée faiblement qualifiés

Partant du constat selon lequel la formation ne bénéficie pas nécessairement à celles et ceux qui en ont le plus besoin, le programme du président Macron prévoit de former un million de jeunes peu qualifiés éloignés de l’emploi, ainsi qu’un million de chômeurs de longue durée faiblement qualifiés.

Ce plan ambitieux de formation serait financé dans le cadre du plan quinquennal d’investissement public de 50 milliards d’euros, dont 15 milliards seraient consacrés à l’acquisition de compétences de ceux qui en ont le plus besoin.

Après le Décret qualité, cap sur la labellisation des organismes de formation

La volonté de renforcer le contrôle par la qualité des organismes de formation était (déjà) un des objectifs de la précédente réforme de la formation professionnelle. Elle s’était exprimée à l’occasion de la publication du Décret Qualité d’août 2015, dont les Opca se sont emparés pour sa mise en œuvre au travers du Datadock, outil dématérialisé de recueil des informations nécessaires à leur référencement, opérationnel depuis janvier 2017.

Le programme de l’ancien candidat d’En Marche ! va plus loin encore en prévoyant la mise en place de labels, visant à améliorer le contrôle de la qualité de l’offre de formation. La labellisation ne devrait pas s’appliquer uniquement à la formation mais également à l’accompagnement.

Afin de rassurer les organismes de formation malmenés il est vrai depuis 2015 par la création du CPF ou encore le respect des exigences du décret Qualité, quelques précisions ont été apportées par Marc Ferracci, mentor du candidat Macron sur les questions d’emploi et de formation pendant la campagne : les labels devraient être attribués pour des périodes longues. Les délais de labellisation devraient être courts et les procédures d’évaluation simplifiées.

L’OCDE vient de rappeler dans son étude de Perspectives sur les compétences, présentée le 4 mai dernier, l’importance pour la compétitivité nationale des politiques de formation continue. Alors que l’organisation internationale pointe dans ce même rapport les limites actuelles des programmes de formation et de développement des compétences qui sont développés en France au bénéfice des actifs, qu’ils soient en activité ou demandeurs d’emploi, l’actuel Président trouvera certainement là un argument en faveur de sa réforme annoncée du système de formation professionnelle.