Les Changemakers, ces nouveaux KOL qui (re)donnent du sens à l'influence

Si la définition de " l'influence " fait consensus, la manière de l'exercer montre certaines limites. Aujourd'hui, le modèle tangue, mais est-ce pour autant que le concept d'influence est mort ?

Si la définition de « l’influence » - qui est la capacité d’une personne ou d’une entité à devenir prescriptrice de nouveaux comportements auprès d’une autre personne - fait consensus, la manière de l’exercer a quant à elle montré ses limites ces dernières années. Aujourd’hui, le « marché du marketing d’influence » qui représente un poids prévisionnel mondial de 20 milliards de dollars pour l’année 2023, est loin d’être un phénomène marginal et amateur.  En effet, il est constitué désormais d’un écosystème énorme de marques, d’individus dits « influenceurs » et d’un nombre incalculable d’agents ou d’agences pour les faire travailler ensemble.

Or, le consommateur n’est pas dupe et exprime sa lassitude à être exposé à des influenceurs (auto-renommés « créateurs de contenus ») devenus petit à petit les nouveaux hommes sandwichs des marques, avec une perte quasi totale d’objectivité, voire parfois, d’honnêteté. Entre gains financiers et perte de sens de valeur ajoutée, le modèle a tangué jusqu’à l’adoption de la loi portée par Bercy autour des métiers de l’influence, visant à appeler un chat un chat : un placement produit, c’est de la publicité. Une loi qui fait vaciller l’influence en France, tant du côté des individus que des marques. Est-ce pour autant que le concept d’influence est mort ? Il n’en est rien !

Les Changemakers : les nouveaux KOL des médias sociaux

Ce n’est pas parce les consommateurs expriment une certaine saturation et que le terme « defluencing » émerge, qu’ils remettent complètement en cause le concept d’influence. Au contraire, ils expriment le souhait que l’influence retrouve enfin ses lettres de noblesse. Oui, les consommateurs restent toujours à la recherche de « modèles » en qui ils peuvent avoir confiance et dont l’expertise dans un domaine de compétence spécifique peut influencer positivement leurs comportements et leurs habitudes de consommation. Preuve en est : l’émergence d’une nouvelle catégorie d’influenceurs appelés « Changemakers ». À la croisée des influenceurs dits traditionnels et des Key Opinion Leaders, les Changemakers savent fédérer une audience autour de leur domaine d’expertise. Ils disposent, par là-même, d’un très fort pouvoir de prescription auprès des consommateurs : leur taux d’engagement est 4 fois plus important que celui des influenceurs traditionnels.

Prenons la communauté d’experts du skincare présente sur les réseaux sociaux : « les Skinfluencers ». Leur mission principale est d’éduquer leur public en partageant des contenus éducationnels sur les formulations des produits de soin, comprenant des éclairages détaillés sur les ingrédients bénéfiques, ainsi que des conseils avisés selon le type de peau. Au-delà de cet aspect, leur rôle de pionnier leur permet d’introduire également de nouvelles routines et d’encourager de nouveaux comportements d'achat. Mettant ainsi en lumière les marques et les produits qui répondent à ces exigences, c’est là qu’ils vont influencer les choix de consommation. Présents dans tout type de catégories (food, santé, automobile, mode, etc.), c’est grâce à leur posture solide et sincère qu’ils deviennent petit à petit les acteurs du changement sur un marché. Les marques ont donc tout intérêt à s’y intéresser !

Les marques et les Changemakers : un changement de paradigme

Le nerf de la guerre pour les Changemakers : l’authenticité des contenus. Il est donc plus difficile pour les marques de les approcher, d’autant que leur capacité à générer des ventes en volume est moins impactante à court terme, en raison de la taille de leurs communautés, souvent plus restreintes qu’un influenceur classique. Ainsi, l’approche des marques avec les Changemakers doit donc se situer à deux niveaux. Tout d’abord, au niveau de la veille : les Changemakers sont les meilleurs pourvoyeurs de signaux sur un marché. Les écouter c’est comprendre très tôt, et avant les autres, quels sont les opportunités ou les risques à anticiper en termes de tendances. C’est aussi comprendre quelles sont les marques ou les produits qui sont valorisés et qui ont donc un potentiel de croissance, ou encore, quels sont les types de contenus ou d’activations qui fonctionnent et qui engagent leurs audiences.

Enfin, au niveau du partenariat. S'associer aux Changemakers revient à dépasser une approche opportuniste à court terme, au profit d'une stratégie axée sur la construction d'une image de marque à moyen ou long terme. La marque sera valorisée par ces experts si elle montre qu’elle partage les mêmes valeurs et les mêmes exigences que celles prônées par le Changemaker, et donc qu’elle comprend les attentes de ses audiences.

Avec l’émergence de ces nouveaux influenceurs, c’est tout un secteur qui entame sa mue vers davantage de sens et de profondeur. Les marques doivent comprendre qu’il est important de privilégier le messager plutôt que le message, surtout lorsqu’il détient la confiance de leurs cibles et joue un rôle clé dans leur performance ou celle de leurs concurrents. Il est maintenant temps pour elles de saisir cette nouvelle opportunité !