L'avis d'un actionnaire de Facebook : "L'IPO de Snapchat rappelle la fin de la bulle Internet"

L'avis d'un actionnaire de Facebook : "L'IPO de Snapchat rappelle la fin de la bulle Internet" Le gérant d'un fond d'investissement très investi dans le réseau social de Mark Zuckerberg a accepté de livrer son analyse sur l'introduction en bourse du concurrent d'Instagram.

"Ces commentaires proviennent du point de vue d'un gestionnaire de fonds avec une position importante dans Facebook, et qui regarde donc Snapchat comme un concurrent. Il est important que les lecteurs en tiennent compte dans les commentaires ou les comparaisons avec Facebook et ses filiales, sachant que ces commentaires peuvent être influencés par cette participation dans Facebook.

"Je vois plus Snap comme un outil technologique intéressant, à l'instar de Twitter, que comme un géant potentiel d'Internet comme Google ou Facebook"

Snap essaie de lever 3 milliards de dollars dans son introduction en bourse. Les investisseurs dans cette IPO n'auront aucun droit de vote, étant donné que ceux-ci sont conservés par les cofondateurs. De nombreuses sociétés technologiques ont des structures de droit de vote doubles, ce que j'apprécie souvent parce que cela garantit qu'un fondateur visionnaire puisse conserver l'accent mis par l'entreprise sur le long terme sans craindre qu'un investisseur activiste à court terme ne vienne perturber la stratégie de long terme. De là à ne pas donner la parole du tout aux  investisseurs dans l'entreprise, c'est un pas de trop selon moi.

Au-delà de ça, je vois plus Snapchat comme un outil technologique intéressant, à l'instar de Twitter, que comme un géant potentiel d'Internet comme Google ou Facebook. Snapchat est une société à produit unique, comme Twitter, ce qui limite son utilité pour les annonceurs. A mon avis, ils se poseront éternellement la question de savoir comment monétiser leur produit, tout comme Twitter.

"Parce que ses ressources sont moins importantes, Snap concentre  son expansion sur les marchés développés"

En outre, le monde de la technologie est un monde dans lequel le vainqueur rafle toute la mise et Snapchat est un numéro 2 loin derrière le numéro 1. Il a 158 millions d'utilisateurs quotidiens actifs contre 400 millions pour l'Instagram de Facebook. La seule section Stories d'Instagram compte 150 millions d'utilisateurs actifs quotidiens. Même si Snap a été celui qui a innové, avec les formats de 10 secondes qui s'autodétruisent ou les Stories de 24 heures, à chaque fois Facebook est parvenu non seulement à faire aussi bien avec Instagram mais même à faire mieux. Facebook ayant des ressources bien supérieures pour la R&D, et une base d'utilisateurs bien supérieure pour amortir ces coûts, il y a peu de chances que Snapchat batte un jour Instagram. Avec la capacité d'Instagram à attirer les investissements via Facebook, Instagram sera toujours non seulement le premier choix des annonceurs mais également la plateforme la plus valorisée

Par exemple, le revenu moyen par utilisateur de Snap est de 1,05 dollar, contre 4,83 chez Facebook. Dans la région nord-américaine, il passe à 2,15 dollars pour Snap contre 19,81 pour Facebook. Parce que ses ressources sont moins importantes, Snapchat concentre  son expansion sur les marchés développés. Conséquence, les utilisateurs actifs quotidiens n'augmentent que de 3% au quatrième trimestre. Et en dehors de l'Amérique du Nord et de l'Europe, Snapchat n'a pas cru du tout. Au contraire, Facebook augmente son nombre d'utilisateurs de 5% hors Amérique du Nord et Europe, et à partir d'une base bien plus large.

"Snapchat est engagé pour plus de deux milliards de dollars pour utiliser le cloud de Google alors que l'IPO ne doit lever que trois milliards"

Une autre inquiétude à propos de Snap est le fait qu'il ne possède pas sa propre infrastructure, il l'achète à Google et est engagé pour plus de deux milliards de dépenses pour utiliser le cloud de Google sur les 5 prochaines années. Et ce alors que l'IPO ne doit lever que trois milliards en cash ! L'an dernier, les coûts de revenus de Snap se sont élevés à 450 millions de dollars pour des revenus de 405 millions. Ils dépensent donc 1,11 dollar pour obtenir 1 dollar de revenu. Et ces chiffres ne prennent pas en compte toutes les autres dépenses opérationnelles (salaires, baux, fournitures…). C'est très inhabituel. Je pense qu'il faut revenir à la fin de la bulle Internet pour trouver des sociétés entrant en bourse avec des coûts de revenus supérieurs à leurs revenus.

En résumé, participer à l' IPO de Snapchat ne m'intéresse pas."