Droits de vote : Snapchat va-t-il trop loin pour son IPO?

Droits de vote : Snapchat va-t-il trop loin pour son IPO? L'application mobile sera la première IPO tech d'envergure en 2017, avec une valorisation de 20 à 25 milliards de dollars. Mais pour garder le contrôle de leur société, les deux fondateurs vont émettre des actions sans droit de vote.

Ce doit être l'opération qui relance la machine des introductions en Bourse technos aux Etats-Unis, et par ricochet dans le monde. Snapchat, dont le holding de tête a été renommé Snap, a déposé un document confidentiel auprès de la SEC pour préparer son entrée sur les marchés à l'automne dernier, une option dont la start-up bénéficie dans la mesure où elle réalise moins d'1 milliard de dollars de revenus. Il devrait officialiser ses ambitions mi-février pour une IPO d'ici à la fin du premier trimestre, qui pourrait valoriser l'application mobile instantanée entre 20 et 25 milliards de dollars. Pour suivre ce calendrier, Snap a organisé des rencontres préliminaires avec des investisseurs potentiels à New York en début d'année.

Et le moins que l'on puisse dire, c'est que les deux fondateurs du groupe, Evan Spiegel et Bobby Murphy (respectivement 26 et 28 ans), ont été gourmands en termes de droits de vote. Ainsi, les investisseurs qui achèteront des titres à l'occasion de l'IPO ne recevront aucun droit de vote, selon les informations du Wall Street Journal, si bien que le duo gardera 70% des droits de vote alors qu'il ne détiendra plus que 45% du capital. L'instauration de deux catégories d'actions, permettant au(x) fondateurs(s) de garder le contrôle de leur société en bénéficiant de droits de vote décuplés, est assez usuel au sein des sociétés techs. Google (rebaptisé Alphabet) avait lancé le modèle lors de son entrée en Bourse en 2004, au terme de laquelle les fondateurs Larry Page et Sergey Brin avaient gardé plus de 60% des droits de vote. Et dix ans plus tard, ils ont encore modifié la structure et instauré des actions sans droit de vote, de façon à ce que les deux fondateurs et le chairman Eric Schmidt gardent environ 60% des droits de vote.

Le duo de fondateurs gardera 70% des droits de vote alors qu'il ne détiendra plus que 45% du capital

Même chose chez Facebook, qui a créé une structure à deux classes d'actions pour son IPO en 2012, puis des titres sans droit de vote à l'été dernier, afin de prévenir les donations de titres par Mark Zuckerberg et lui permettre de garder le contrôle (ce dernier a indiqué qu'il ferait don de 99% de sa fortune à son organisme Chan Zuckerberg Initiative, qui investit et s'engage dans la recherche contre les maladies et l'éducation).

Pourtant, les investisseurs ne sont pas toujours d'accord avec cette façon de faire : des actionnaires de Facebook ont attaqué l'approbation de cette nouvelle classe d'actions par le board pour cause de conflits d'intérêt. Et le fonds de pension de Californie, CalPers, qui est très critique sur ce type de structure, a aussi attaqué en justice le groupe IAC (Vimeo, Daily Beast) qui prévoit de créer des actions sans droit de vote.

Pour toutes ces raisons, Snap, qui revendiquait 150 millions d'utilisateurs quotidiens en juin dernier mais n'a pas encore véritablement monétisé son audience, va-t-il trop loin? Les investisseurs privés ont jusqu'à présent été complaisants puisqu'ils ont déjà accepté d'acheter des titres sans droit de vote lors des derniers tours de table. La société justifie cette démarche en expliquant qu'elle vise à assurer l'engagement du CEO Evan Spiegel, présenté comme un petit génie visionnaire, qui sait comment imposer son réseau social à ses pairs, les "millennials". Un nouveau Mark Zuckerberg en devenir, selon le pitch peaufiné par les banquiers conseils, mais il leur faudra aussi démontrer par les chiffres que la société a le même potentiel que son aîné Facebook (375 milliards de dollars de capitalisation boursière).

Article originel publié sur WanSquare par Anne-Laure Peytavin le 16/01/2017.

 

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