Les médias français réclament près d'un milliard d'euros à Meta
Près d'un milliard d'euros. C'est le montant qui sera demandé à Meta par les 80 groupes médias français qui s'apprêtent à déposer une plainte devant le Tribunal des activités économiques de Paris, d'ici la semaine prochaine. "Et ce montant pourrait encore évoluer", nous confie une source proche du dossier. Allusion aux quelques gros acteurs qui n'ont pas encore rejoint l'initiative, dont le groupe M6 et Le Monde. Au total, 220 médias sont concernés : presse nationale, régionale, magazine, pure players, chaînes TV et radio, service publique y compris. "C'est historique, c'est la première fois que tous les éditeurs se rassemblent autour d'une telle initiative", se félicite ce directeur juridique d'un des médias partie prenantes.
A travers cette initiative collective, tous comptent réclamer réparation de leur manque à gagner du fait du non-respect par Meta du Règlement général sur la protection des données (RGPD). "La publicité ciblée ne peut être poussée sans le consentement de l'internaute, c'est ce que prévoit le RGPD, une règle confirmée à plusieurs reprises par l'autorité de protection de données irlandaise. Les éditeurs français appliquent cette règle, en mettant en place des plateformes de gestion du consentement (CMP), mais Meta s'en est affranchi en faisant valoir le contrat puis l'intérêt légitime. Ce faisant, il a bénéficié d'un avantage concurrentiel déloyal. Résultat : tandis que les recettes de Meta ont continué de progresser, celles des éditeurs n'ont pas cessé de s'éroder", poursuit-il.
Les 80 groupes représentés pèsent près de 70% du chiffre d'affaires publicitaires des médias français sur le digital. Ils se sont inspirés des 83 éditeurs espagnols qui, le 1er décembre 2023, ont porté plainte en justice contre Meta avec les mêmes arguments. Ces derniers réclament plus de 550 millions d'euros de compensations.
"Nous espérons pouvoir parvenir à un accord avec Meta, qui reste malgré tout un partenaire
En l'absence d'un dispositif de class action, ces groupes médias ont pris le même avocat, le cabinet parisien Darrois Villey Maillot Brochier et comptent sur l'appui de la même structure d'accompagnement et de financement, le cabinet américain Scott+Scott. L'action couvre la période allant de 2019, année de mise en conformité de tous les médias au RGPD, à 2024, selon notre source. "Et on pourra aller au-delà tant que Meta ne sera pas conforme."
L'initiative est en préparation depuis janvier 2024. "Cette procédure est complexe car il nous faudra démontrer chiffres à l'appui le manque à gagner, ce pourquoi un rapport d'économiste a été établi pour chaque éditeur. Elle sera longue car nous devrons nous battre contre un acteur très habitué à ce genre de procédures. Nous espérons pouvoir parvenir à un accord avec Meta, qui reste malgré tout un partenaire", conclut notre interlocuteur.