2013 : la victoire par K.O des magasins physiques sur les e-commerçants ?
2012 a démontré avec force qu’Internet ne traduisait pas un désamour des Français pour les magasins. Bien au contraire, les consommateurs s’accrochent à leurs vieux magasins et leur demande de renouveler leur expérience en se basant sur ce qu’Internet a apporté.
Depuis quinze ans, tout le monde ne cessent de
ressasser qu’Internet est et sera partout. Combien de fois avons-nous entendu
que les ventes sur Internet avaient encore progressé de 25% ? Humiliés sur
la place publique de la distribution française, les magasins physiques ont été
relégués au même rang que la vieille machine à vapeur. Erreur ! 2012 a
démontré avec force qu’Internet ne traduisait pas un désamour des Français pour
les magasins. Bien au contraire, les consommateurs s’accrochent à leurs vieux
magasins et leur demande de renouveler leur expérience en se basant sur ce
qu’Internet a apporté.
Cette demande illustre bien que les magasins physiques
sont irremplaçables en matière d’expérience shopping et les remet au centre de
la consommation.
2012 a vu Internet se mettre au service des magasins. 2013 enfoncera le clou : Internet fera allégeance aux magasins physiques.
2012: l’âge d’or d’Internet, c’est du passé !
Commençons
par un rappel. Internet ne représente que 8% des ventes de détail vs. 92%[1]
pour les magasins physiques ! Tout indique qu’Internet ne devrait pas
peser tellement plus à l’avenir et que la cannibalisation prévue des magasins
n’aura pas lieu. Dans les pays où l’e-commerce est plus mature, Internet ne
représente pas forcement un poids plus important (de 7 à 10% pour les États-Unis, le Japon, l’Allemagne, etc.). L’Angleterre fait cependant office
d’exception au niveau mondial. De plus, dans les dix prochaines années, Internet
ne devrait pas dépasser les 15% dans la plupart de ces pays.
En 2012
Internet a vu croître dans son sillage le fameux web-to-store : tendance
désignant les personnes réalisant des recherches en ligne avant d’acheter en
magasin (soit 75% des internautes[2]).
Les freins à l’achat sur Internet sont justement à l’origine de son émergence,
car le web ne permet pas de finaliser ses achats correctement. Un bon nombre de
consommateurs souhaite toucher et voir les produits avant de les acheter. Et
c’est bien là que le champion Internet vacille face aux magasins ! Il
n’est plus utilisé principalement comme un canal d’achat mais comme un canal de
prescription pour les magasins physiques.
Une
autre preuve ? Les fameux champions
pure players qui ne s’avèrent pas être l’eldorado tant avancé ! Une bonne
partie d’entre eux s’est associée à des réseaux de distribution afin de devenir
rentable. C’est le cas notamment de PixMania ou CDiscount. La majorité a même
ouvert des points de vente.
Quid
des réseaux physiques qui ferment leurs portes (Virgin et Surcouf) ? Elles
résultent d’erreur stratégique souvent liée
à un positionnement trop exposé aux catégories de produits les plus achetées
sur Internet. Seules les catégories ne nécessitant pas de toucher et de voir un
produit sont concernées : le tourisme, les produits culturels (CD, livres),
etc. En dehors de ces quelques
catégories, les magasins n’ont plus rien à craindre. Internet a été maîtrisé.
2013 : web-to-store, la V2 du e-commerce
2012 a vu arriver le web-to-store. Parce que les grandes enseignes ont été les premières à se lancer sur ce secteur, elles ont été aussi les premières à en découvrir les points faibles. Les grandes enseignes ont tâtonné sur les divers dispositifs web-to-store possibles : affichages des stocks, réservations en ligne, référencement sur des assistants pre-shopping et autres services de couponing. L’absence de système de tracking fiable, et donc de mesure du retour sur investissement, n’a pas permis d’identifier l’efficacité de chacun des dispositifs. Le coupon, qui a souvent fait office de méthode de tracking, est souvent perçu comme un procédé altérant la force d’une marque et attirant les chasseurs de primes non fidélisables. Une adoption massive du web-to-store ne s’est donc pas réalisée. En revanche, la fin 2012 a vu apparaître un nouveau mode de tracking bien plus prometteur.
Pendant ce temps, victime de la concentration du marché autour des grandes chaines[3] et encore absent sur Internet, le commerce de proximité a continué à souffrir. Internet continue d’effrayer ces indépendants, alors que le web-to-store n’a pas clairement encore été identifié. Cependant, un bon nombre d’entre eux ont déjà initié une stratégie e-commerce afin d’étendre leur zone de chalandise. Une estimation dénombre d’ores et déjà 5 000 commerçants de proximité sur 150 000[4] disposant d’un site marchand. Le commerce de proximité adopte avec quelques années de décalage le même mouvement stratégique que les grandes enseignes.
2013 verra donc une forte adoption du web-to-store !
2013 : la digitalisation des magasins annonce la victoire des magasins sur Internet
Le web-to-store est clairement l’expression des consommateurs désireux de bénéficier du meilleur des deux mondes : la facilité d’usage d’Internet et l’expérience shopping des réseaux physiques. Ainsi, en 2012, la montée en puissance du web-to-store dans les grandes enseignes s’est accompagnée d’une réflexion sur la digitalisation des points de vente. L’adoption a été timide mais l’avenir semble très prometteur : géolocalisation en magasin, catalogues interactifs sur bornes, vitrines interactives, miroirs ou applications de simulation de produits, push d’offres personnalisées sur le mobile, information produit via QR Code ou NFC, paiement sans contact…Néanmoins, aucune solution claire n’a pu réellement émerger parce que la digitalisation doit s’accompagner de changement de processus opératoires importants modifiant les standards en matière de rôle des vendeurs en magasins.
A ce titre, le showrooming[5], tant avancé par les détracteurs du réseau physique comme preuve de la désertion des magasins, relève bien plus de la digitalisation des points de vente qu’une véritable défiance.
2013 verra cette digitalisation continuer à monter en puissance sur un mode exploratoire afin de former les vendeurs à de nouveaux modes opératoires.
2013 ou la victoire des magasins par KO ?
De manière générale, opposer Internet et les magasins n’a pas de sens. Ces canaux se complètent. Internet permet de mieux mailler son territoire et d’adresser le consommateur durant des moments spécifiques pour dynamiser sa consommation. Les magasins physiques, quant à eux, constituent l’essence même de l’expérience shopping à travers l’aventure sensorielle qui y est proposée.
Ce qui changera en 2013, c’est surtout notre perception de cette histoire. Internet ne tue pas les magasins tout autant que le tout-physique n’existe plus. Une fois de plus, c’est la raison qui l’emportera par KO sur la passion.
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[1] Toutes catégories confondus – selon les catégories de produit, la pénétration d’internet peut aller de 3% à 40% / Chiffres Précepta / Xerfi (2012).
[3] 84% des ventes de détail / Données Insee 2011.
[4] Données Insee 2011.
[5] Tendance consistant à aller en magasin puis à acheter sur Internet.