Comment L'Oréal instille la techno dans ses produits pour mener sa transformation Beauty Tech
En 2018, L'Oréal accélérait sa transformation digitale avec le programme Beauty Tech. Si la société ne communique pas le budget consacré à ce programme, son directeur Stéphane Lannuzel précise que "l'investissement dans la technologie est du même ordre que celui dans la science". Depuis le lancement de Beauty Tech, la data occupe une place centrale. Avec plus d'un siècle d'expertise dans le domaine de la peau et des cheveux, le groupe L'Oréal compte à son actif de nombreuses données de recherche auxquelles s'ajoutent les données clients, de fabrication ou encore de finance. "Au départ, la mission première de Beauty Tech a consisté à structurer toutes les données, retrace Stéphane Lannuzel. Nous avons investi dans des plateformes technologiques pour les stocker et les analyser." L'enjeu étant de combiner toutes les sources de données pour proposer des produits et services adaptés. L'Oréal cumule également les données de ses partenariats avec Verily, depuis le mois de janvier, dans le cadre de la santé cutanée de précision ou avec Clue pour les données des cycles hormonaux.
Combinaison de technologies
Pour le directeur de Beauty Tech, le secteur de la beauté devra maîtriser de nombreuses technologies dans le futur. Ainsi, l'appareil connecté Rouge sur mesure commercialisé en janvier 2021 pour Yves Saint Laurent permet aux clientes de concevoir leur rouge à lèvres à partir d'une teinte donnée, grâce à la réalité augmentée, tout en restant chez soi. Un créateur de rouge à lèvres personnalisé qui mêle en son sein plusieurs technologies comme la mécatronique et des algorithmes pour déterminer la teinte ciblée. "Les moteurs utilisés pour développer la technologie de Rouge sur mesure sont les mêmes que ceux utilisés pour l'usage des drones", affirme Stéphane Lannuzel. Pour ce projet, L'Oréal s'appuie sur les talents de sa filiale ModiFace, société canadienne spécialisée dans la réalité augmentée et dans le giron du groupe depuis 2018.
Chez Beauty Tech, le développement des nouveaux produits à partir de la data science est aussi le fruit du travail des équipes de Tech Accelerator basées à Paris, Shanghai et New York. "Ces équipes rassemblent les mêmes profils que ceux des start-up technologiques qui déploient des applications digitales", explique Stéphane Lannuzel. Le programme développe également des solutions de diagnostic de peau pour mieux connaître ses clients et affiner l'éventail des recommandations produits. A partir de l'analyse d'un selfie et sur la base d'algorithmes entraînés, les signes du vieillissement peuvent être détectés et quantifiés avant d'établir un diagnostic puis une recommandation produit.
Mais L'Oréal mise également sur des technologies plus connues du grand public et simples d'usage telles que le QR code. Grâce au programme Beauty Tech, le groupe prévoit l'ajout de QR code sur les 7 milliards de produits qu'il distribue chaque année. "Une fois scanné, le QR code permet d'accéder au jumeau numérique du produit et à des informations comme la liste des ingrédients, les consignes d'utilisation du produit ou encore sa recyclabilité. L'expérience consommateur sera personnalisée puisqu'en fonction du pays où le client se situe, les informations issues du produit scanné ne seront pas toutes les mêmes." Le projet de QR code a débuté avec les marques Kérastase et La Roche-Posay et concerne actuellement 19 marques, soit plus de 5 500 QR codes.
Le groupe L'Oréal cultive la discrétion sur l'évolution des ventes de ses produits depuis l'intégration massive de la technologie. "Notre positionnement favorise une adhésion plus forte de nos consommateurs à nos marques et nous conforte dans l'idée d'associer chaque produit à un service technologique, détaille Stéphane Lannuzel. Au global, notre stratégie influence le taux de conversion, le panier moyen, et diminue les retours." La feuille de route de Beauty Tech se veut aussi soucieuse des enjeux environnementaux actuels. Les équipes se mobilisent notamment sur la green science en favorisant les algorithmes dans le cadre de la formulation naturelle des produits. Une manière de mesurer l'impact de la technologie sur l'environnement. Et Stéphane Lannuzel de conclure : "Nos data scientists sont à la fois challengés sur la performance des algorithmes et la qualité des recommandations produits mais aussi sur la performance environnementale des algorithmes, ce qui implique parfois de coder différemment."