Face à Zendesk, le challenger Kustomer mise sur un CRM unifié

Face à Zendesk, le challenger Kustomer mise sur un CRM unifié Avec sa richesse fonctionnelle, Zendesk fait figure de leader des plateformes de service client en mode SaaS. Autre éditeur américain, Kustomer entend lui contester le leadership de l'innovation.

La relation client est morte, vive l'expérience client. Loin du marketing de masse d'antan, un consommateur attend aujourd'hui d'une marque qu'elle lui apporte une somme d'émotions et à lui seul. Cette expérience unique doit être fluide et sans couture quel que soit le point de contact : web, application mobile, mail, chat et, de plus en plus, messagerie instantanée. Elle doit intégrer les technologies d'intelligence artificielle pour toujours plus de personnalisation. Pour relever ce défi de l'ominicanalité et de l'IA, les solutions de service desk en mode SaaS partent favoris face aux plateformes traditionnelles conçues historiquement pour gérer des tickets. C'est ainsi que sur un marché particulièrement concurrentiel où évoluent SAP, Oracle ou Salesforce (avec Desk.com), Zendesk tire son épingle du jeu. Face à ce lui, un autre américain, Kustomer, entend lui disputer le leadership de l'innovation.

Comparatif Zendesk vs Kustomer
  Zendesk  Kustomer
Année de création  2007 2015
Modules applicatifs  Support (gestion des tickets d'assistance), Guide (base de connaissances en self-service), Chat (live chat et messagerie), Talk (logiciel pour centre d'appels), Sell (automatisation des forces de vente). Plateforme unique pour la gestion omnicanale des demandes (voix, e-mail, chat, SMS, réseaux sociaux, self-service), avec l'intégration d'un moteur de flux de travail optimisé par l'IA.
Points forts  - Leadership reconnu- Richesse fonctionnelle- Ancrage en France avec de nombreux retours d'expérience - Recours à la RPA et à l'IA pour automatiser et personnaliser l'expérience client- Vue chronologique unique des interactions clients
Points faibles - Absence de solution dédiée à l'industrie- Faible pourcentage de clients ayant un grand nombre de conseillers (plus de 500 positions)  - Jeunesse de l'offre, manque de visibilité- Absence de représentation commerciale et de clients en France
Intégration d'applications tierces Plus de 800 applications disponibles sur la place de marché A date, 45 applications intégrées 
Références clients BlaBlaCar, Mano Mano, Back Market, EBP, Group Up… Ring, Rent the Runway, Glovo, Glossier, Away et UNTUCKit…
Tarification Zendesk Suite (Support, Guide, Chat, Talk) : version Professional à 89 euros par agent et par mois, version Enterprise (administration et assistance étendues) à 149 euros. Une version Enterprise à 99 dollars par mois et par utilisateur et une version Ultimate (fonctionnalités et sécurité étendues) à 169 dollars.

Depuis sa création en 2007 à San Francisco, Zendesk a connu une progression continue. L'éditeur californien a d'abord proposé une plateforme de support client et d'helpdesk nativement SaaS. A grand renforts d'acquisitions et dans le sillage de son introduction en Bourse en 2014, Zendesk a ensuite élargi sa couverture fonctionnelle pour couvrir à la fois l'expérience et la relation client. Dans son dernier quadrant magique remontant à juin, Gartner le classe parmi les leaders des éditeurs de solutions de centre d'engagement client (customer engagement centers, CEC) aux côtés des ténors Microsoft et Oracle, mais toutefois loin derrière Salesforce.

Zendesk : 4 500 clients en France

Aux côtés de ses applications principales (support, base de connaissances, chat, logiciel de centre d'appels), Zendesk propose aussi Sell, un module d'automatisation des forces de vente, et Sunshine, une solution de cloud public. La plateforme de CRM est hébergée par Amazon Web Services afin de gagner en scalabilité et faciliter l'agrégation de données clients.

Ces dernières années, Zendesk a mis l'accent sur l'omnicanalité et la prise en charge des réseaux sociaux. Après Facebook Messenger, Line, Telegram, Twitter et WeChat, Zendesk annonçait, en août dernier, l'intégration de WhatsApp. "Les messageries instantanées constituent une tendance lourde du marché, observe Gabriel Frasconi, directeur de l'Europe du Sud et responsable France chez Zendesk. Les consommateurs entrent de plus en plus en contact avec les marques par ce biais et ces dernières doivent les intégrer dans leur stratégie omnicanale". Pour accélérer cette stratégie, Zendesk a mis la main, en mai dernier, sur la startup canadienne Smooch dont la plateforme centralise les textes émis par les messageries instantanées ou les demandes issues des assistants vocaux.

"Via notre bot, nous entendons décharger les agents du support client des tâches à faible valeur ajoutée"

Autre axe de développement : l'apport de l'intelligence artificielle dans le domaine du self-care, soit la capacité donnée à un client de résoudre lui-même son problème. Zendesk a récemment introduit un chatbot baptisé Answer Bot. "Une réponse automatique se contente d'accuser réception de la demande en indiquant que le service-client y répondra dans les meilleurs délais", explique Gabriel Frasconi. Le bot, lui, va "comprendre" la demande – par exemple, le renouvellement d'un mot de passe - et répondre en envoyant le lien décrivant l'opération à effectuer. Si la demande a été satisfaite, le ticket est fermé. La promesse ? Décharger les agents des tâches à faible valeur ajoutée. Dailymotion automatiserait ainsi 20% de ses demandes.

Côté administrateur, Zendesk propose avec Explore un module de reporting et d'analytics pour mesurer la qualité de l'expérience client et entrer dans une démarche d'amélioration continue. Il bénéficie de l'acquisition du français Bime en 2015. Côté intégration, Zendesk revendique la plus importante place de marché du segment de la relation client avec plus de 800 applications disponibles, dont Slack, Qualtrics ou Aircall.

Magic Quadrant 2019 du Gartner sur les applications de customer engagement centers. © Gartner

Enfin, l'éditeur met l'accent sur sa présence en France avec 60 collaborateurs à Paris et Montpellier (le site historique de Bime) et plus de 4 500 clients dont des "digital natives" comme BlaBlaCar et Mano Mano ou encore des entreprises brick and mortar qui voient leur modèle changer avec le numérique parmi lesquels Acadomia, Nexity ou Group Up (Chèque Déjeuner).

Si Gartner salue la capacité d'innovation et la richesse fonctionnelle de Zendesk, le cabinet d'études déplore l'absence de solutions spécifiques à l'industrie dans son portefeuille. La simplicité de son interface conduirait les centres de service client employant un grand nombre de conseillers (plus de 500 positions) à se tourner vers d'autres solutions.

Kustomer, le challenger ambitieux

En mai dernier, Kustomer a frappé un joli coup en levant 40 millions de dollars. Avec ce troisième cycle de financement, la start-up new-yorkaise aura levée au total 113,5 millions de dollars en l'espace de douze mois. Fondée en 2015, Kustomer compte sur cet argent pour enrichir fonctionnellement sa plateforme de service client en mode SaaS et se développer à l'international et plus particulièrement en Europe. Ses références sont pour le moment essentiellement américaines.

D'un point de vue technologique, Kustomer se fixe deux objectifs : jouer la carte de l'omnicanalité et faire appel à l'automatisation des processus (RPA) et à l'intelligence artificielle afin de réduire autant que possible le nombre de tâches répétitives liées à la relation client. Tout le positionnement de la start-up s'est construit par opposition à Zendesk. A commencer par un forfait tout compris qui contraste avec l'approche modulaire de son concurrent

Brad Birnbaum, son PDG et cofondateur, renvoie Zendesk à une approche de ticketing alors que Kustomer est, à ses yeux, "une plateforme de service client et de CRM à même d'unifier les données clients internes comme externes". Il estime que sa solution est centrée sur la conservation client alors que Zendesk l'est sur le ticket. "Dans une vue chronologique unique, Kustomer offre l'historique complet des interactions avec un client. Les agents n'ont pas à basculer d'un écran à l'autre pour trouver l'information", souligne-t-il.

"Il faut pouvoir comprendre la nature de la demande et y répondre en temps réel, même si le client a changé de canal en cours de route"

Par ailleurs, Brad Birnbaum oppose la vision multicanale de Zendesk à l'approche omnicanale de Kustomer. "Il ne suffit pas de donner aux entreprises la liberté de communiquer avec leurs clients via le web, le chat, l'e-mail, le SMS, Twitter, Facebook Messenger ou WhatsApp. Il faut pouvoir comprendre parfaitement la nature de la demande et y répondre en temps réel, même si le client a changé de canal au cours du processus", insiste le PDG de Kustomer. Pour ce serial entrepreneur et ancien CTO d'Airtime, les solutions multicanales comme Zendesk fonctionnent en silos. "Chaque canal est géré par une équipe dédiée qui ne dispose pas ou pratiquement pas des données d'historique relatives aux autres canaux."

Autre avantage compétitif avancé par le dirigeant de Kustomer : l'orchestration du flux de travail grâce à l'IA. Le traitement automatique du langage naturel et l'analyse de sentiments permettent d'améliorer l'expérience client. Le routage des demandes peut être également piloté par les données. Un client VIP sera ainsi dirigé vers la file d'attente dédiée, un client français vers un conseiller francophone. Aux entreprises d'établir un ensemble de règles pour aiguiller les conversations entrantes en fonction d'un attribut client ou du contenu de la demande.

En termes de feuille de route, Brad Birnbaum prévoit de généraliser cette approche IA à l'ensemble de la plateforme. Il souhaite aussi aider les partenaires et les clients à créer leurs propres applications au-dessus de sa solution afin de tirer parti des données disponibles pour "créer des expériences de service client personnalisées, performantes et sans effort". Si Kustomer n'a pas encore de client basé en France, il compte se développer dans notre pays. Ce qui passera par la création d'une représentation commerciale en 2020. Dans le cadre de son expansion européenne, la start-up prévoit d'ores et déjà l'ouverture d'un datacenter sur le Vieux Continent "dans les prochaines semaines".

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