Julien Codorniou (Facebook) "Workplace by Facebook fait face à des déploiements massifs accélérés"

Avec la crise du coronavirus, la déclinaison professionnelle du réseau social profite d'un boom de la demande, notamment en France. Son vice-président détaille les usages qui émergent et les attentes des nouveaux clients.

JDN. Comment évolue l'utilisation de Workplace ces dernières semaines à l'heure où le télétravail est déployé massivement face au Covid-19 ?

Julien Codorniou est le vice-président de Workplace by Facebook. © Facebook

Julien Codorniou. Depuis le début de la crise, nous avons constaté une explosion de l'adoption et du niveau d'engagement de Workplace chez les clients. Evidemment, notre priorité absolue en ce moment est de répondre à nos clients existants qui nous font historiquement confiance, et pour lesquels Workplace est plus que jamais devenu stratégique pour communiquer. Face à l'épidémie de Covid-19, les employés les plus exposés sont aussi souvent les moins connectés. Il s'agit des équipes de terrain, qui travaillent dans les hôpitaux, les magasins, les usines, les aéroports... Du coup, Workplace, du fait de sa capacité à embarquer tout le monde, y compris les salariés sans postes de travail, devient le centre nerveux de l'entreprise. Il est utilisé pour maintenir le lien avec l'ensemble des employés, et même dans certaines sociétés avec les salariés en chômage technique qui devront être remobilisés dès la reprise de l'activité.

Des usages se sont-ils développés plus que d'autres au sein de la plateforme ?

On constate une explosion du recours à la fonction de vidéo live. Énormément de CEO utilisent ce canal beaucoup plus régulièrement pour communiquer quotidiennement avec tous leurs employés. Par exemple chez Century 21, qui compte 7 000 collaborateurs, le président Laurent Vimont s'adresse désormais à tous les collaborateurs chaque jour. Pour les CEO confrontés à la crise, Workplace est à la fois un moyen de faire passer des messages et de répondre aux questions pour s'assurer que tous les salariés aient le même niveau d'information. Les connexions aux applications de visioconférence Zoom et Bluejeans depuis Workplace explosent également, notamment pour streamer des meetings dans Workplace.

On observe en parallèle un accroissement du nombre de bots créés par des partenaires et déployés par nos clients. Ils sont par exemple conçus pour réaliser des sondages éclairs pour s'assurer de la bonne santé des employés, pour répondre à leurs questions et les rassurer face à la situation. D'autres permettent de gérer le shift management, l'allocation de tâches pour la journée... Cette automatisation via les bots a véritablement décollé depuis le début de la crise. Elle fait entrer Workplace sur le terrain de la productivité. Un domaine sur lequel nous n'étions pas forcément identifiés au départ.

Avez-vous observé une évolution de l'utilisation des groupes collaboratifs, du chat ?

Depuis le début de la crise, Workplace Chat est déployé et utilisé massivement. Cela concerne y compris des salariés qui n'avaient jamais recours au chat avant. Historiquement, Workplace est un produit groupe-first. Les groupes sont à la base de la plateforme. Quand on met en œuvre Workplace chez un client, on s'assure que la hiérarchisation et la modération des groupes sont en place. Du coup, le chat arrivait après dans l'adoption des fonctions de Workplace. Aujourd'hui, il émerge sur le devant de la scène, et les nouveaux clients qui nous sollicitent le font principalement pour le chat.

"En France, Boulanger, IKKS ou encore Pharmactiv ont déployé la plateforme à l'occasion de la crise"

Ces réseaux d'utilisateurs connectés sur Workplace Chat ouvrent de nouvelles perspectives en matière de discovery et de distribution de bots. Ce n'est pas un hasard d'ailleurs si l'on observe en parallèle un développement sans précédent des bots sur la plateforme. Les deux effets sont liés. Cette double tendance nous amène à plancher dès à présent sur de nouvelles fonctionnalités en matière de bots.

La gestion de la crise actuelle implique aussi pour les entreprises de collaborer plus intensément avec leur écosystème… Observez-vous ce cas d'usage progresser sur Workplace ?

Effectivement, le recours à Workplace ne s'intensifie pas seulement sur le plan de la collaboration interne. Il progresse également en matière de collaboration avec les fournisseurs, les partenaires, les agences marketing, les avocats... Mais c'est une tendance qui va plus loin. Des clients se sont par exemple fédérés pour créer un groupe Workplace commun en vue d'échanger des bonnes pratiques pour faire face à la situation et mieux gérer la crise. Il compte quelque 1 600 personnes issues de 500 sociétés.

Qu'en est-il des nouveaux clients ?

On constate une augmentation forte de la demande en provenance d'organisations souhaitant mettre en place Workplace le plus vite possible. Toutes les entreprises se posent actuellement la question de s'outiller d'une solution comme Workplace, capable de connecter tous leurs salariés sans exception. C'est un sujet qui ne sera plus d'actualité d'ici quelques mois quand toutes les entreprises seront équipées. Il faut donc pouvoir adresser la demande tout de suite.

En termes de nouveaux clients, nous avons par exemple équipé Pharmactiv, (un groupement français de fournisseurs de services pour les pharmacies, ndlr) qui regroupe 1 700 officines adhérentes. Par le biais de Workplace, elles échangent des bonnes pratiques sur le Covid-19. Autres exemples, l'enseigne Boulanger (groupe Mulliez, ndlr) a déployé Workplace en deux semaines auprès de 7 000 salariés, la marque de prêt-à-porter française IKKS l'a ouvert à tous ses employés en quatre jours (notamment pour évaluer le matériel disponible pour le télétravail, ndlr). Cette nouvelle demande provient du retail, mais aussi des services. Dans ces domaines, le besoin de connecter tous les salariés, de communiquer avec eux, est devenu critique.

D'habitude, le déploiement de Workplace demande un minimum de temps. Différentes fonctions de l'entreprise doivent se mettre d'accord au préalable : comité de direction, ressources humaines, informatique, communication... Là, nous faisons face à des déploiements massifs accélérés que nous devons être capables de supporter en plus de nos clients existants.

Comment les clients de Workplace se préparent-ils à la sortie du confinement ?

"Ce chapitre redéfinit profondément notre ambition et les attentes de nos clients"

Nos clients en Asie, qui avaient été les premiers à être confrontés au confinement, sont aussi les premiers à en sortir. Dans cette perspective, ils ont notamment recours à Workplace pour préparer leurs employés à revenir au bureau. C'est un process qui se rapproche par certains côtés de l'onboarding de nouveaux salariés. Ils mettent en œuvre des bots comme alternatives aux entretiens en face à face. L'objectif étant de s'assurer que les conditions de retour sur site sont bien remplies.

Comment vous projetez-vous, vous-même, dans l'après-confinement ?

Notre objectif premier est de faire en sorte que les clients existants puissent se dire que Workplace les a aidés à maintenir un niveau de productivité tout au long de la crise et que les équipes de Workplace leur ont offert le meilleur niveau de support de toute l'industrie du SaaS. Avec cette crise, les attentes par rapport à un produit tel que Workplace ont explosé. Evidemment, ce chapitre redéfinit profondément notre ambition et les attentes de nos clients.

En tant que vice-président de Workplace by Facebook, Julien Codorniou a pour mission de gérer le développement commercial et les partenariats de la plateforme du même nom. Il a rejoint Facebook en 2011 pour diriger l'activité de jeux vidéos en région EMEA. Il a ensuite pris la tête de l'équipe mondiale pilotant les partenariats du groupe. Avant d'entrer chez Facebook, Julien Codorniou était directeur du développement commercial chez Microsoft, où il a créé et lancé BizSpark, le programme mondial de l'éditeur de soutien aux start-up. Depuis 2012, il est membre du conseil d'administration du Monde. Il est titulaire d'une maîtrise en gestion de la Skema Business School.