Bonnes feuilles : Grandeurs et misères des stars du Net Xavier Niel : le Steve Jobs français en maison d'arrêt

xavier niel, patron emblématique de free
Xavier Niel, patron emblématique de Free © S. de P. Grasset / Christophe Beauregard

Tout commence au milieu des années 80. Le jeune Xavier, issu d'une famille modeste, est alors élève au lycée de Créteil, et le minitel connaît une croissance fulgurante. Avec son copain Jean-David Blanc, futur fondateur d'Allociné, il bidouille sur son premier ordinateur tout en suivant des cours au lycée. Il développe des "3615" pour des clients (comme Le Dauphiné libéré) et découvre très vite que le business, le vrai, c'est celui du minitel... rose ! Les 3615 ULLA fleurissent comme des petits pains et rapportent de l'or en barre à ceux qui ont flairé la bonne affaire. Ses comptes commencent à se garnir et lui permettent de mettre la main sur Fermic Multimedia qui sera rebaptisé Iliad à la fin des années 90. Ce sont aussi les années au cours desquelles, mi-flibustier mi-visionnaire, il dépose tous les prénoms féminins possibles en 3615...

Jusqu'au jour où il fait la rencontre qu'il ne fallait pas. La scène se déroule dans un café parisien qui n'est autre que l'ancien QG des employés de sex-shops de la rue Saint-Denis. Un ancien salarié de la Société Générale lui raconte ce jour-là combien son investissement dans un sex-shop peut s'avérer rentable.

Xavier Niel décide alors d'investir en minoritaire dans un premier établissement à Paris sans vraiment y prêter attention. Entre 1993 et 1997 il va prendre plusieurs participations dont une à Strasbourg.

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La réussite fulgurante de Free happe tout son temps et lui met des œillères.

En 2000, il décide de liquider la plupart de ses participations dans les sex-shops. Il a du mal à se séparer de celle de Strasbourg. En abandonnant la grande majorité de son activité, il est pourtant convaincu d'avoir fait le plus dur.

Comment Xavier Niel a-t-il pu se laisser entraîner dans de pareilles histoires ? Son avocate de l'époque avance "l'ivresse de la transgression" comme explication. On n'est pas loin de la réalité. A cette époque, Xavier Niel a besoin d'adrénaline pour mieux savourer le vent de la liberté... Effectivement, trois ans plus tard, en 2004, c'est sa participation pourtant minoritaire dans l'établissement strasbourgeois qui lui sera fatale.

"Comment se porte Xavier ? Pas trop effondré

- Au contraire, il a le moral et 15 000 idées à la minute..."

Son avocat débriefe quotidiennement les équipes de Free qui ont pris le relais pendant sa détention, et notamment Cyril Poidatz, qui est nommé PDG pendant cette période. Le magistrat l'a compris dès son premier jour passé entre les murs de la prison : il y aura un "avant" et un "après" Santé.

Au final, Xavier Niel sera incarcéré pendant un mois dans le carré VIP de cette prison. Des cellules qui ont vu passer entre autres, Pierre Botton, Bernard Tapie ou Alfred Sirven. Xavier Niel pense, dort, lit (Belle du Seigneur), réfléchit à son groupe et à son avenir. Il obtiendra finalement un non-lieu concernant les faits de proxénétisme et sera condamné à deux ans de prison avec sursis et 250 000 euros d'amende pour recel d'abus de biens sociaux.

Vendredi 25 juin 2004. Il est 18 heures. Xavier Niel a "tiré" son mois de préventive. Il est libre. Amaigri, il pousse la lourde porte de la maison d'arrêt parisienne.