Christian Teutsch (Lands' End) "Il y a beaucoup de potentiel en France pour notre activité de VPC"

Malgré les déboires du secteur de la VPC, l'américain Lands' End débarque en france avec un positionnement encore peu répandu. Explications de son DG pour l'Europe Centrale.

JDN. Le vépéciste américain Lands' End, dont vous dirigez l'activité en Europe Centrale, s'est lancé en France fin 2009. Qui est cette société ?

Christian Teutsch. Lands' End a été créé en 1963 à Chicago par un ancien de chez Young & Rubicam, Gary Comer qui, peinant à trouver vêtements et équipements de voile, décida de créer un distributeur. Pour le premier catalogue, l'imprimeur déplaça par erreur l'apostrophe de 'Land's End', mais Gary Comer n'avait pas les moyens de payer une réimpression et adopta cette orthographe. En grossissant, la société a déménagé dans le Wisconsin pour trouver un loyer plus abordable qu'à Chicago. Son siège s'y trouve encore. C'est en 1991 que Lands' End s'est implantée au Royaume-Uni, puis trois ans plus tard au Japon et en Allemagne en 1996. En 2002, Sears a racheté la société (pour 1,9 milliard de dollars, ndlr).

En 2008, Nick Coe (ex-directeur marketing de Banana Republic, ndlr) a pris la tête de Lands' End et initié une nouvelle phase d'expansion internationale. L'an dernier, nous avons ouvert en Autriche à l'automne puis en France à la fin de l'année. Les Pays-Bas et la Suède suivront fin 2010. En revanche, nous n'avons pas de projet pour l'instant en Europe du Sud, car le marché n'y est pas encore assez développé. Nous réfléchissons plutôt à l'Asie.

Quel est votre positionnement ?

Il est unique sur le marché français : le vêtement d'extérieur américain classique. Nous nous distinguons aussi par notre qualité de service aux utilisateurs. Notre promesse "Guaranteed. Period." ("Garanti, un point c'est tout", ndlr) est même devenue notre marque de fabrique : le client peut retourner ses produits sans limite de temps, même utilisés, même 10 ans après leur achat. Nous le rembourserons sans poser de question.

"Le client peut retourner ses achats sans limite de temps, même utilisés"

Par ailleurs, notre service client par téléphone est entièrement gratuit et il n'est pas question de raccrocher au prétexte qu'une durée maximale d'appel serait atteinte : c'est le client qui décide quand la conversation est terminée. D'autant que le rôle des agents est aussi d'apporter des conseils sur le choix de la taille, la matière, la coupe, etc.

Les produits commercialisés en Europe sont-ils les mêmes qu'aux Etats-Unis ?

80 % des références sont identiques, les autres sont spécifiques à chaque pays. Nous avons par exemple des vêtements et des chaussures destinées à l'Europe ou au marché allemand qui ne sont pas populaires aux Etats-Unis. Mais ici comme là-bas, nous fabriquons tout ce que nous vendons.

Vous ne vous contentez pas d'attaquer le marché français par l'e-commerce : vous y lancezaussi un catalogue...

Nous opérons les deux canaux en parallèle. Nous considérons notre business comme multicanal. En France, nous en sommes donc à notre cinquième catalogue.

La VPC française a beaucoup de mal à faire évoluer son business model et à l'adapter au Web. Comment se fait-il que Lands' End lance une activité de VPC en France ?

Nous pensons qu'il y a beaucoup de potentiel en France pour notre segment de marché. La Redoute et les 3 Suisses sont de très gros acteurs, nous ne voulons pas devenir comme eux. Nous désirons rester sur notre niche, le vêtement d'extérieur américain classique.

Lands' End est plutôt gros, pour un acteur de niche...

C'est vrai. Nous sommes plus de 400 au siège allemand de Mettlach et plus de 600 à Oakham au Royaume-Uni. Nous avons aussi une adresse en France, pour les retours produits, mais elle n'est qu'à une trentaine de kilomètres de Mettlach, d'où nous pilotons la France, l'Autriche et bientôt les Pays-Bas. En réalité, la grande majorité de nos collaborateurs travaille au service client. C'est ainsi le cas d'environ 360 personnes à Mettlach.

 
Lands End en Europe et au Japon
  Chiffre d'affaires 2008 Résultat net 2008
Source : Mint / Bureau Van Dijk
Royaume-Uni 124,3 millions d'euros 14,5 millions d'euros
Allemagne 10,4 millions d'euros 349 000 euros
Japon 61,1 milliions d'euros 2,3 millions d'euros

Qui considérez-vous comme vos concurrents, sur le marché français ?

Il y a évidemment certains pans de La Redoute et des 3 Suisses, des acteurs moins importants comme Gap, Tommy Hilfiger ou Polo Ralph Lauren, ainsi que certaines branches de retailers tels que les grands magasins ou les chaînes de distribution de vêtements.

Quel premier bilan tirez-vous du lancement de Lands' End en France ?

Nous en sommes satisfaits. Evidemment, nous avons encore des choses à apprendre sur le marché français. Sur les comportements d'achat par exemple... Nous avons été surpris de constater que nos clients français passent commande par écrit bien davantage que dans les autres pays, qui privilégient le téléphone. Nous enregistrons également beaucoup moins de retours en France. En Allemagne, où les consommateurs sont habitués, par Otto et Quelle en particulier, à renvoyer les produits, le taux de retour est deux fois supérieur. C'est donc plutôt une bonne surprise !

Comment le site français de Lands' End va-t-il évoluer ?

Pour l'instant, il est assez standard, il n'est pas encore unique. Nous avons des projets pour le développer et ajouter de nouvelles fonctionnalités, notamment un moteur de recommandations. Le tunnel de paiement peut aussi être encore amélioré. Le siège américain de Lands End devrait décider dans les semaines qui viennent si nous lançons un projet de refonte. Selon moi, l'idéal à atteindre, c'est le site d'Amazon.