Quel avenir pour la délégation e-commerce ? L'avenir : les marques se réapproprieront-elles leur e-commerce ?

Opérer une activité rentable de délégation e-commerce n'est pas chose facile. Et surtout, les marques qui acquièrent des compétences Web peuvent à terme vouloir gérer leurs ventes en ligne. D'autant qu'elles ont tout intérêt à multiplier les passerelles cross-canal. Ainsi, Bouygues Telecom a quitté eMerchant en 2012 pour voler de ses propres ailes en se basant sur une brique logicielle d'IBM. D'autres, après avoir réinternalisé leur activité e-commerce, relancent pourtant une procédure d'appel d'offres. Un échec, ou un mouvement de balancier on ne peut plus courant ?

Les marques sont parfois obligées de retourner à la délégation

"Une solution de délégation peut paraître chère, au bout de quelques années, analyse Tristan Balozian. A l'arrivée d'une nouvelle direction ou DSI, il peut arriver que le client pense pouvoir s'en charger lui-même. Mais la plupart du temps, il en revient." Selon le directeur d'eMerchant, le sens de l'histoire est de laisser la gestion de l'activité à ceux qui la maîtrisent le mieux. "Notre métier est très technique, le leur est de vendre, ajoute-t-il. Une marque ne peut intégrer toutes les évolutions de notre industrie aussi rapidement qu'elles se produisent."

Finalement, le choix de déléguer ou d'internaliser n'est pas forcément lié à la maturité de la marque, estime Yann Rivoallan : "Ceci parce que la majorité ne sera sans doute jamais réellement prête. Seules celles qui ont fait de l'e-commerce une priorité stratégique, comme Burberry ou Yves Rocher, parviennent à obtenir un chiffre d'affaires en ligne important. Pour les autres, ces revenus restent compris entre 1% et 5% de celui de la société, l'e-commerce représentant donc plutôt un sous-objectif." Le cofondateur de The Other Store en déduit que cette décision se joue sur d'autres facteurs, à commencer par la volonté d'avoir un e-commerce performant

Vers du cross-canal et du CRM ?

Il en résulte que les marques demanderaient plutôt à prolonger les contrats, voire à changer de délégateur mais sans internaliser l'activité e-commerce. "Et les marques qui souhaitent rendre stratégique un segment particulier - logistique, réseaux sociaux, e-marketing...- internaliseront ce segment-là". Yann Rivoallan se montre donc tout sauf inquiet pour l'avenir de la délégation e-commerce. "Je vois plutôt l'activité augmenter fortement, avec des partenariats bien plus ambitieux comprenant du cross-canal et du CRM, et des segments plus spécialisés qu'aujourd'hui."

Chez Brand Online Commerce, Christophe Davy constate que de nombreux secteurs, ceux du matériel informatique et des logiciels notamment, connaissent des mouvements de balancier entre les revendeurs et les fabricants, qui périodiquement reprennent la main sur la distribution de leurs produits. "C'est une question d'hommes, de tendances. Ce va-et-vient existe aussi dans la délégation, mais il n'existe pas de mouvement de fond vers l'internalisation."

Il est vrai que de tous temps, les marques ont travaillé avec des distributeurs, des relais commerciaux dans certains pays ou encore du travel retail pour le haut de gamme. "De même sur l'e-commerce, parce que les technos évoluent, nous sommes plus facilement challengés, au quotidien, sur les métriques métier que les marques." En un mot : les compétences et les infrastructures e-commerce nécessitent des investissements importants qu'il vaut mieux mutualiser. Et les marques ont tout intérêt à se concentrer sur leur savoir-faire : constituer leur offre... et vendre.