Gilles Gauthier (DSI , Garges-lès-Gonesse) : "Notre capacité à développer en interne est due à un turn-over limité"

Malgré des budgets réduits, le DSI de cette ville de 40 000 habitants a réussi à limiter le turn-over de ses équipes. Il évoque les rapports qu'il entretient avec les directions métiers, et l'impact d'Open Office.

Quelles sont les principales caractéristiques de votre municipalité ?

Garges-lès-Gonesse est une ville de 40 000 habitants, située dans le nord-est de l'Ile-de-France, à 15 kilomètres de Paris. Nous sommes une des communes de France qui génèrent le moins de recettes fiscales. Cela a un impact sur nos difficultés à boucler le budget municipal, et donc sur les moyens de la DSI.

Nous faisons partie de la Communauté de communes de Val de France, qui comprend des communes comme Sarcelles et Villiers le bel. Mais la DSI n'est pas mutualisée et ce n'est pas une question d'actualité.

Comment se structure votre DSI ?

Nous avons deux services opérationnels. Un premier service travaille sur l'administration des bases de données. Un autre se focalise sur le système réseau et communication. huit personnes travaillent dans la DSI.

Nous gérons 700 lignes téléphoniques. 80 bâtiments sont équipés de téléphonie classique. 17 sites, en revanche, sont équipés de téléphonie sur IP. Je suis arrivé sur ce poste en 2002 et c'est à ce moment là que la partie téléphonie a été mise sous la responsabilité de la DSI. Ensuite, en 2003, nous avons entrepris un chantier IP avec France Télécom.

Nous disposons aussi de 500 ordinateurs, dont 360 sont sur un réseau local. Les autres sont situés dans les écoles primaires, soit sur des postes administratifs, soit dans des salles informatiques pour les élèves.

Quels sont les logiciels que vous utilisez pour la bureautique ?

En 2002, nous avons fait le choix d'Open Office. Ce choix se justifiait par le coût des licences de Microsoft, trop élevées. A l'époque, nous ne pouvions changer le matériel bureautique que tous les cinq ans, le coût des licences grevait nos investissements. Avec la mise en place d'Open Office, nous pouvons désormais changer notre matériel tous les deux ans et demi.

Nous avons un turn-over de 30%, ce qui fait que nous devons mettre l'accent sur la formation aux outils

Six ans après la mise en place de Open Office, quelle est la perception des utilisateurs ?

L'utilisation d'Open Office par les agents pose encore quelques problèmes. Il faut remarquer que nous avons un turn-over de 30%, ce qui fait que nous devons mettre l'accent sur la formation aux outils, pour des personnes qui ne sont pas habituées à utiliser Open Office. Et une partie des utilisateurs a du mal à s'adapter.

Mais la conduite de ce type de projet dépend aussi de la volonté de l'encadrement à soutenir ce type d'initiative. Notre direction générale a changé 4 fois en 6 ans, ce qui fait qu'il a été parfois compliqué de maintenir le cap sur ce dossier.

Donc le choix d'Open Office est régulièrement remis en question par les utilisateurs ?

Oui, le choix continue d'être contesté en interne. Mais nous avons fait une enquête interne au début de cette année. Globalement, les utilisateurs nous disent qu'ils n'ont pas de souci, mais que des efforts d'ergonomie de l'outil seraient les bienvenus.

Ceci dit, nous faisons de gros efforts pour la formation des personnels. Nous organisons chaque semaine une formation sur Open Office, mais 50% des personnes inscrites viennent de manière effective. Et ce sont elles qui sont le plus critiques sur l'outil !

Bref, il y a des résistances, mais c'est assez faible, 15 personnes sur les 1 000 agents. C'est tout de même assez usant.

Et pour les autres outils, quels sont vos choix ?

Nous continuons à utiliser Windows pour le système d'exploitation. Nous réfléchissons à une alternative, mais ce n'est pas une priorité pour nous pour l'instant. Pour le service de messagerie, nous utilisons Exchange couplé à Outlook. Nous prévoyons de passer sous Linux dans les deux années qui viennent.

Mais je suis assez prudent sur ce projet. Nous avons déjà eu une mauvaise expérience par le passé en utilisant un serveur Linux. Nous avions installé un outil Open Source mais nous n'avions pas les ressources humaines pour faire évoluer la solution de manière satisfaisante. C'est encore une fois un problème de turn-over, au niveau de la DSI cette fois ci, qui a mis en péril le projet.

Côté progiciels, quelle est votre stratégie ?

Nous travaillons avec 40 progiciels métiers. Trois personnes sont en charge de la production de ces applications, et elles ont en plus la responsabilité de l'Internet municipal. C'est dire qu'elles ne chôment pas ! Par ailleurs, nous développons de plus en plus en interne, ce qui est nouveau. Jusqu'alors, nous faisions souvent appel à des éditeurs.

Pour le téléservice à  la population, nous n'aurions pas eu la capacité de financer ce projet s'il n'avait pas été réalisé en interne.

Pourquoi ce choix ?

Il correspond très clairement à une problématique économique. Ce n'est pas une règle, et nous ne le pratiquons pas à 100%, mais pour le téléservice à la population par exemple, nous n'aurions pas eu la capacité de financer ce projet s'il n'avait pas été réalisé en interne.

En fait, notre capacité à développer en interne est aussi due au fait que nous avons réussi à diminuer le turn-over au sein de la DSI. Cela permet de construire des projets sur le long terme. Nous sommes à présent une équipe stable.

En 5 ans, l'équipe de la DSI a été totalement renouvelée. La stabilité de l'encadrement est aussi importante. Je suis là depuis maintenant 6 ans, et je suis le directeur le plus ancien dans les services municipaux !

Comment se déroule le processus quand vous menez à bien un projet avec les directions métiers ? Comment définissez vous votre rôle ?

Dans la relation avec les directions métiers, il est difficile d'avoir une ligne unique. Il faut faire comprendre aux directeurs qu'ils doivent faire une démarche de spécification fonctionnelle sur les produits qu'ils souhaitent mettre en place.

De même, en matière de financement, je suis partisan de dire que l'on ne finance un chantier que si le service commanditaire a réellement un besoin et sait l'exprimer de manière correcte. Si ce n'est pas le cas, on ne le fait pas.

Donc, vous n'assistez pas les directions métiers sur la partie fonctionnelle comme le ferait une maîtrise d'ouvrage ?

Exactement, enfin, c'est un principe que j'aimerais appliquer. On peut les aider à définir les besoins, mais ce n'est pas mon vœu : mon rôle devrait se limiter à la prise en compte des besoins fonctionnels et à la définition des spécifications techniques.

L'idée, c'est de donner le moyen aux services d'être autonomes sur ce point. C'est important parce que je me rends compte par exemple que les délais fixés par les commanditaires sont souvent trop courts parce qu'ils n'ont pas conscience de l'étendue du travail à effectuer.

Pour finir, sur l'aspect financier, quel est le budget annuel de votre DSI ? Plus largement, comment se planifie la réalisation des projets informatiques en lien avec le budget municipal ?

Le budget annuel de la DSI, hors masse salariale, est d'un peu moins d'un million d'euros et l'investissement représente 40 % du budget. En ce qui concerne notre investissement, nous avons comme politique officieuse de réaliser des chantiers dont le retour sur investissement se mesure sur deux ans au maximum.

Nous planifions les projets dans le cadre d'un PPI, le Projet Pluri annuel d'Investissement. 90 % de nos besoins d'investissements sont fixés jusqu'en 2011. On essaie d'avoir une vision sur les 5 ans à venir. Je remarque que ce type de planification me permet de vendre les postes de la DSI auprès de candidats qui ont besoin de se projeter sur des projets de moyen et long termes.