Google est-il devenu bête ?

Google est-il devenu bête ? Avec l'arrivée d'AMP ou des featured snippets, la qualité des résultats du moteur de recherche est de plus en plus remise en cause. Des experts du SEO donnent leur avis

Depuis un an, Google fait remonter tout en haut de ses résultats des featured snippets : des extraits de pages web mis en avant censés répondre à la question de l'internaute. Exemple : 

Un featured snippet qui définit SEO, au-dessus des résultats classiques. © capture

Problème, ces extraits ne donnent pas toujours satisfaction, loin s'en faut. Le contenu mis en avant par Google est souvent contestable, parfois obsolète ou même carrément faux. Les exemples sont innombrables : du contenu ne répondant pas à la requête (voir ci-dessous), des fausses informations, des réponses religieuses obscurantistes ou très orientées politiquement ont été propulsés tout en haut des résultats. 

Ce featured snippet ne répond pas à la requête : il donne les dates des épreuves de première à la Réunion, mais rien concernant les résultats du bac 2017. © capture

Le spécialiste Olivier Andrieu émet également des réserves sur la pertinence de ces featured snippets : "Le choix de la page n'est pas toujours judicieux", résume-t-il. L'idée même des featured snippets ne le séduit par ailleurs pas : "Avec les featured snippets, Google veut devenir un moteur de réponse, voire un moteur de vérité. Il donne une seule réponse à des questions qui mériteraient d'aller chercher plusieurs réponses car il faut recouper les informations. Avec les featured snippets, Google n'invite pas à réfléchir, et impose parfois sa vision du monde un peu simpliste et manichéenne. Les featured snippets ne sont pas satisfaisants intellectuellement".

De son côté, Paul Sanches, autre spécialiste de Google, trouve les featured snippets "souvent fiables", mais admet que leur pertinence est "variable selon les requêtes". "Les featured snippets ne font qu'amplifier un problème existant car Google pouvait déjà faire remonter très haut des sites au contenu polémique, voire faux."  

Si elle est critiquée, la fonctionnalité est aussi encore jeune, et Google travaille activement dessus. Les features snippets seront sans doute les réponses données par le moteur dans les recherches vocales, qui sont de plus en plus nombreuses. Des améliorations sont d'ailleurs régulièrement apportées. Depuis peu, les internautes peuvent par exemple faire remonter leurs critiques lorsqu'un featured snippet ne leur plaît pas. Une manière d'admettre que les featured snippets sont perfectibles, mais aussi un bon moyen d'améliorer leur pertinence.

AMP, nuisible également ?

Autre nouveauté lancée l'année dernière par Google : AMP. Un format sur mobile qui permet à des sites d'actualité d'être propulsés tout en haut des résultats, au sein d'un carrousel. Pour certains acteurs, cette nouveauté a pu dégrader la qualité des résultats, car c'est d'abord leur format, avant leur pertinence, qui leur permet d'être très visibles. Des sites de presse comme Le Monde et le Figaro ont choisi de ne pas adopter AMP, ils n'apparaissent donc pas dans les carrousels AMP.

Un carrousel d'actualité au format AMP, tout en haut des résultats sur mobile pour la requête "Macron". © capture

"La présence de pages AMP tout en haut des résultats ne me choque pas. Ce n'est pour moi ni un gain ni une perte de pertinence. Beaucoup de sites de presse ont adopté le format, et les informations qui figurent dans les carrousels sont pertinentes, même sans Le Monde ou le Figaro", commente Olivier Andrieu. "Ces titres ne sont d'ailleurs pas enfouis, et restent souvent visibles en première page", complète Paul Sanches, qui considère que le carrousel AMP donne les infos recherchées par les internautes.

Mais AMP pose un autre problème aux yeux de ce spécialiste : "les résultats de Google deviennent fouillis avec ce format et tous ces résultats qui défilent de manière horizontale sur smartphone. Google en abuse. Plus que la pertinence, c'est l'expérience utilisateur qui est dégradée", critique-t-il.

Toujours efficace contre le spam

L'histoire du moteur de Mountain View est faite de mises à jour déployées pour nettoyer les résultats du spam et donc améliorer leur qualité et leur pertinence. Exemples : En 2010, la mise à jour de son infrastructure technique appelée Caffeine a permis à Google d'indexer plus de contenu, mais aussi plus de spam. Le moteur a réagi vite et bien l'année suivante avec Panda, qui a su empêcher du spam d'être visible dans les résultats. Et pour empêcher les spammeurs de manipuler les résultats avec des liens artificiels, Google a dégainé Penguin en 2012.

"Entre les résultats de 2010 et ceux de 2017, je vois une pertinence égale"

"A chaque fois, l'enjeu était majeur, voire vital pour Google, car un moteur comme AltaVista est mort car il résistait mal aux spams. Sur Google, je vois rarement des résultats de faible qualité en première page", observe Olivier Andrieu. Et compte tenu de la quantité de spams que doit gérer Google, je suis admiratif devant le travail accompli par le moteur, car le résultat est au final très bon". Ce n'est pas pour autant que cet observateur aguerri pense que la pertinence des résultats de Google se soit améliorée suite aux mises à jour telles que Panda ou Penguin. "Entre les résultats de 2010 et ceux de 2017, je vois une pertinence égale, mais face à un web nettement plus complexe. C'est une sacrée constance", estime-t-il

Après toutes ces mises à jour, la première page des résultats est-elle devenue une forteresse imprenable pour le spam ou le contenu de mauvaise qualité ? Pour Paul Sanches, "il n'y a pas de spammeurs visibles sur les requêtes les plus volumineuses. Pour celles-là, Google joue la carte de la sécurité, et fait remonter des gros sites bien établis. Google peut en revanche être moins pertinent sur les requêtes moins volumineuses de long tail ou de middle tail", observe-t-il. Difficile de nier que Google travaille la pertinence de ses résultats, mais cela ne l'empêchera jamais d'être faillible.