Le bid shading en RTB : une boîte noire ou une solution nécessaire ?

Le bid shading en RTB : une boîte noire ou une solution nécessaire ? Le marché accueille positivement cette solution qui a permis d'éviter une envolée des prix suite au passage du marché programmatique au 1st price auction. Mais la méthode reste difficile à décoder.

Le bid shading - shading pour nuance, bid pour enchère - est une réponse toute indiquée à la transition qui s'opère aujourd'hui au sein du marché programmatique, avec le passage d'une logique de 2nd price auction à celle de 1st price. Dans l'ancien système, le marché s'autorégulait grâce à la règle du 2nd price : le prix payé par le gagnant correspondait à la seconde enchère la plus élevée. Mais dans le système du 1st price, c'est bien la valeur de l'enchère qui emporte l'impression qui doit être payée. Le risque de débourser bien trop cher pour une impression devient donc beaucoup plus important pour l'acheteur. Surtout s'il n'a aucun moyen d'estimer le prix du marché. La plupart des ad-exchanges, dont le dernier en date est Google Ad Manager, se sont conformés à ce nouveau paradigme qui, sans le bid shading, aurait contribué à une envolée des prix. "L'augmentation des CPM a bien été ressentie par les trading desks mais n'a pas été aussi terrible que ce à quoi on aurait pu s'attendre", déclare Rémi Lemonnier, fondateur de Scibids, outil d'optimisation d'enchères utilisé par une cinquantaine de trading desks.

Le bid shading est un outil qui permet à un acheteur de corriger à la baisse la valeur des enchères en tenant compte des prix historiques du marché. Cet ajustement n'est pas réalisé directement par les trading desks, même si certains pourraient le faire. Il est généralement proposé  par les plateformes buy-side, les DSP, qui agrègent les sources d'inventaires et font donc valoir une vision plus exhaustive et précise du marché pour opérer cette pondération sans faire courir le risque à l'acheteur de perdre la compétition.

Le calcul du juste prix

Le DSP américain The Trade Desk a fait du bid shading une fonctionnalité optionnelle très facilement activable depuis juin dernier. "Nous cherchons à déterminer la vraie valeur de chaque enchère", vante Yann Blat, son directeur général France et Belgique. Un algorithme de predictif clearing analyse l'historique des achats faits pour le même type d'impression selon l'ensemble des critères assortis à une bid request (format, url, géolocalisation, moment de la journée, etc.). De quoi déterminer un prix qui devrait permettre à l'annonceur de remporter l'enchère… tout en déboursant moins que son 1st price d'origine. "Les utilisateurs qui décident d'activer cette fonctionnalité doivent nous faire confiance", poursuit Yann Blat. Si le DSP parvient à baisser l'enchère, la différence est partagée avec l'acheteur qui en récupère 80% sous la forme d'achat média. Lorsque l'opération ne permet pas de faire des économies, aucune commission n'est appliquée.

Si les acteurs qui agrègent l'offre (SSP) et la demande (DSP) semblent les mieux placés pour connaître la valeur du marché, ils ne sont pas les seuls. "Il serait appréciable que les trading desks accèdent à une information encore plus complète et que les DSP donnent à ceux qui le souhaitent la possibilité d'opérer cette estimation eux-mêmes", estime Rémi Lemonnier. C'est loin d'être cas alors que la plupart des DSP imposent désormais le bid shading par défaut, rappelle le fondateur de Scibids. Certains trading desks pourraient pourtant se baser sur leur propre historique afin de trouver eux-mêmes le bon niveau de l'enchère. Mais la transition du 2nd au 1st price s'opère de manière chaotique et ils savent donc rarement selon quelle méthode l'impression leur est proposée. L'information est en effet rarement disponible dans les logs des bid requests que leur remontent les DSP. "Comme il s'agit d'une mécanique interne aux DSP, il n'est pas évident d'avoir des informations précises DSP par DSP", complète Rémi Lemonnier. Yann Blat admet que, dans un monde idéal, The Trade Desk et les autres devraient délivrer cette information aux trading desks. Mais, explique-t-il, eux-mêmes ne savent pas toujours si l'enchère est en 1st ou 2nd price. "C'est pour cela que l'on fait le travail de notre côté…"

Cet article est extrait du dernier numéro d'Adtech News, le supplément mensuel du JDN et de CB News consacré à l'adtech et au martech. Au programme :  une  enquête sur l'offensive d'Apple à l'encontre des cookies, une interview de Criteo ,  une interview du Club Med sur le sujet de l'internalisation de l'achat média, un focus sur Admo.tv, spécialiste du drive-to-Web...