Les recettes de la pub digitale progressent de 9% en 2023, au-delà de toutes les attentes

Les recettes de la pub digitale progressent de 9% en 2023, au-delà de toutes les attentes La croissance, bien meilleure qu'attendue, bénéficie surtout aux plateformes non européennes qui s'emparent de 78% du gâteau, et aux retailers qui s'y frayent un chemin.

Le marché de la publicité digitale enregistre une croissance de 9% en France sur l'année 2023, selon le 31e Observatoire de l'e-pub SRI réalisé par Oliver Wyman en partenariat avec l'Udecam dévoilé ce mardi 6 février. C'est le deuxième semestre, beaucoup plus dynamique, qui a sauvé les meubles, après un début d'année très rétracté dans un contexte de marasme économique. Cette performance, bien meilleure qu'attendue, est cependant en très légère baisse comparée à 2022 où les recettes avaient augmenté de 10%.

Ce dynamisme retrouvé ne modifie cependant pas la prudence de la prévision de croissance de seulement 8% des recettes pour 2024, une année encore entourée d'incertitudes économiques et technologiques (dont notamment la fin des cookies tiers). "Nous sommes prudents dans nos prévisions car il est très difficile de disposer de visibilité dans le contexte actuel. En période de crise, les marques naviguent à vue. Mais cela ne signifie pas que l'année sera moins bonne", tempère Jean-Baptiste Rouet, président de la commission digitale de l'Udecam.

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© Observatoire de l'e-Pub

Au total, 9,3 milliards d'euros de recettes ont été captées par les éditeurs en ligne et les plateformes en 2023, et toujours de manière très inégale : le  trio Google, Meta et Amazon a empoché 68% de ce montant, une portion qui passe à 78% si on y ajoute TikTok et les autres plateformes sociales ou AVOD non européennes (dont la maison mère se situe en dehors de l'Europe). C'est un point de plus qu'en 2022 et 2021.

Le reste du gâteau (22%) est partagé entre plus d'une centaine d'éditeurs, chaînes et retailers français et européens, selon l'étude. "Cette situation risque d'empirer avec toutes les grosses plateformes de VOD (Disney+, Netflix et bientôt Amazon Prime Video) qui arrivent sur ce marché. Leurs revenus seront amenés à se développer dans les années à venir", analyse Olivier Rozental vice-président du Syndicat des régies internet (SRI).

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Le retail media devient le 4e levier le plus important 

Cette nouvelle édition de l'Observatoire de l'ePub SRI élève le retail media au rang de levier à part entière. Ce dernier a enregistré la croissance de loin la plus élevée en 2023, de 24% (contre +12% pour le social et +6% pour le search hors retail), pour atteindre 1,11 milliard de recettes. Une croissance forte bien que moins spectaculaire que celle observée en 2022, de 32%.

Intégrant deux formats, à savoir le search et le display, le retail media représente désormais 12% des parts de marché, soit la 4e plus importante position, juste après le display (15%). C'est dire combien les retailers se sont hissés au rang de grands médias au sein du marché digital français, aux côtés du search hors retail (36% des parts de marché) et du social (27% des parts de marché).

Preuve que ce levier naissant et explosif a encore de beaux jours devant lui grâce notamment à sa data déterministe, à la proximité de l'acte d'achat et à un contexte général qui pousse les annonceurs à privilégier la garantie de résultats. Une performance musclée qui est le fait tout d'abord d'Amazon (qui a capté 70% de la croissance du retail media en 2023 selon les auteurs de l'étude) mais également de nombreux autres acteurs de ce marché, comme Cdiscount et Carrefour.

Point important : les revenus du search classique n'ont évolué que de 6% contre 10% l'année précédente et contre +34% pour le retail search. Preuve que la cote du retail search auprès des annonceurs est telle qu'elle cannibalise le search classique majoritairement représenté par Google, nous confirment les auteurs de l'étude.

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L'instream s'invite dans le social

Mis à part le retail media, le social est le seul levier à avoir gagné des parts de marché en 2023, tiré notamment par la vidéo qui pèse 46% de ce segment désormais et par les plateformes à forte audience (TikTok et Meta notamment). A noter la croissance explosive de la vidéo instream au sein du social  (+101%), un format jusque-là quasiment absent, qui comptait fin 2023 pour 6,7% du social contre 3% en 2021. Sans doute à mettre sur le compte du succès de Facebook Vidéo.

"Le seul à proposer de l'instream en social est Facebook, dont on observe les efforts au vu des résultats : 166 millions d'euros captés en 2023, soit le double de 2022, cela commence à compter et cette accélération est notable. Cet acteur vient grappiller des parts de marché aux broadcasteurs et surtout à YouTube et ça c'est nouveau", analyse Jean-Baptiste Rouet. Au total, le search et le social ont capté 80% de la croissance du marché publicitaire français ces deux dernières années, selon l'étude.

Les éditeurs en ligne souffrent

Pas de surprise du côté du display, les éditeurs en ligne et les sites d'information ont fini l'année avec des recettes en baisse de 6%, vidéo comprise (c'est malgré tour un meilleur score que les -10% observés au premier semestre). "Le display classique (bannières, habillage, etc., ndlr) est en décroissance (-2%, ndlr). C'est pourquoi l'édition et l'information, qui sont des secteurs qui vivent du display classique, se portent moins bien que les acteurs de la TV et de la radio, plus concentrés sur le display vidéo et l'audio digital. Cette situation de décroissance ne devrait pas s'améliorer et c'est un sujet fort d'inquiétude car ce sont ces médias qui assurent la pluralité de l'information en France, et c'est essentiel pour nous tous", analyse Olivier Rozental. Une situation d'autant plus critique que l'édition d'information est le segment le plus vulnérable à la fin des cookies tiers.

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Or pour ce même levier display (qui réunit, en plus des bannières, la vidéo, l'audio et les opérations spéciales), tous les autres acteurs explosent les compteurs à commencer par le segment TV et radio (offres digitales des acteurs historiques, y compris en TV segmentée), avec +20% en 2023, suivi des plateformes de streaming vidéo et audio, +12% (quasiment stables comparé à 2022) et du retail et services, +6%. "Ces chiffres traduisent l'accélération de la transformation de la TV avec la catch-up, la VOD et le streaming. Ce chemin n'est pas facile pour les acteurs historiques mais leurs efforts commencent à être récompensés par une meilleure valorisation de leurs revenus", analyse Emmanuel Amiot, associé communication, média et technologie chez Oliver Wyman.

Au sein du display, qui ralentit nettement avec +6% en 2023 contre +11% en 2022, les formats vidéo et audio sont plébiscités par les annonceurs : la vidéo a gagné 11% en 2023 pour capter 51% des recettes ; l'audio a continué sa hausse spectaculaire observée d'année en année, de 30% en 2023, tirée surtout par les plateformes de streaming, pour représenter 6% des parts du display. A noter que 38% des recettes display vidéo viennent du segment CTV, un chiffre en hausse de 15%. "A terme toute la publicité adoptera le format vidéo en France. La part de la vidéo augmente mais il y a encore du potentiel pour passer l'ensemble du display en vidéo. Tous les acteurs qui sauront proposer une pub vidéo qualitative et non intrusive, bien intégrée dans l'expérience utilisateur, seront gagnants", ajoute Emmanuel Amiot.

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Forte reprise des comparateurs de prix

On remarque également dans cette édition la performance de la catégorie affiliation, emailing et comparateurs qui semble reprendre des forces, avec une croissance de 7% en 2023 contre seulement 2% en 2022. Ce réveil est expliqué par une bien meilleure performance des comparateurs de prix (+11% contre 0% en 2022) et par l'affiliation (+7% vs +5%). Un constat révélateur du comportement des Français dans un contexte inflationniste.

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Une hausse qui n'a cependant pas empêché ces leviers de perdre un peu plus de terrain par rapport au marché global : leur part de marché est désormais de 10% contre 10,5% en 2022 et 12% en 2021.