Les Gourous de la com', les meilleurs extraits GDF-Suez : petit lobbying entre amis

Cible naturelle des communicants et des lobbyistes : les hommes politiques. La fusion GDF-Suez livre un bon exemple des pratiques en cours, entre invitations aux matchs de football et repas offerts dans les restos chics de la capitale. Extrait.

"À l'Assemblée nationale, un véhicule réservé par Suez est venu chercher les parlementaires. Parmi eux, Éric Woerth."

« Les agences de communication et les lobbies se mobilisent alors pour rallier les parlementaires à leur cause. Jusqu'à leur offrir un voyage en avion vers l'Allemagne et des places en bonne loge aux matches de la Coupe du monde de football, qui se joue au même moment (Suez, sponsor officiel de l'Équipe de France, a déboursé pour ce contrat 7,5 millions d'euros sur trois ans).

Plusieurs dizaines de parlementaires UMP, et quelques socialistes, acceptent ainsi les cadeaux de Suez. Notamment les places pour assister, le 9 juillet 2006 à Berlin, au célèbre coup de boule de Zinedine Zidane à Marco Materazzi, lors de la finale qui voit la France perdre aux tirs aux buts face à l'Italie. À l'Assemblée nationale, un véhicule réservé par Suez est venu chercher les parlementaires. Parmi eux, Éric Woerth, futur ministre du Budget, puis du Travail en 2009, alors député UMP de l'Oise. Mais aussi le sénateur de l'Eure Ladislas Poniatowski, qui n'est autre que le rapporteur au Sénat du projet de loi permettant la fusion GDF Suez. Ou encore Jérôme Chartier, député UMP du Val-d'Oise, ou Philippe Vitel, député UMP du Var.

À gauche, c'est surtout la présence d'Éric Besson, alors député socialiste, et de Claude Bartolone qui est remarquée. "J'y étais parce que j'aime le football, mais ce n'était pas du lobbying, c'était un concours de circonstances, plaide Bartolone lorsque nous le rencontrons en décembre 2010. Je me souviens qu'avant de remonter dans le charter, il y a eu un moment d'inquiétude parmi les députés, sur le thème : "Est-ce que le voyage avait un lien avec la fusion GDF Suez ?" Et puis nous nous sommes regardés avec notre sacoche en plastique, notre sandwich et notre pomme, auxquels nous avions eu droit à la sortie du stade." Il prétend : "Il n'y avait pas de quoi s'alarmer : personne de chez Suez ne nous a abordés !"

"Le patron de Suez, Gérard Mestrallet, a également régalé, par petits groupes, près de 300 parlementaires dans un restaurant chic des Champs-Élysées."

Jean-Louis Debré, le président de l'Assemblée nationale, mal à l'aise, recadre pourtant les parlementaires. Sept élus Verts adressent même une lettre de dénonciation au parquet de Paris. Leur missive pose une question : quand l'activité de lobbying franchit-elle la ligne jaune de la corruption ? D'autant que le patron de Suez, Gérard Mestrallet, a également régalé, par petits groupes, près de trois cents parlementaires dans un restaurant chic des Champs-Élysées. Et les directions commerciales de Suez et de GDF n'hésitent pas à débarquer de façon impromptue dans les permanences des députés pour leur demander de soutenir le projet de loi. »