Free Mobile : de l'amateurisme technique ?
Victime de son succès Free Mobile ? Visiblement pas, car l'opérateur continue d'engranger des abonnés – il en aurait bientôt un million. En revanche, ce sont ses clients qui sont victimes du succès de Free. Car l'opérateur semble avoir largement sous estimé l'infrastructure technique entourant son offre. Galères et ratages sont au rendez-vous, revue de détail :
- Une infrastructure d'abonnement pas au niveau. Impossible de s'inscrire le jour du lancement. Des identifiants devant être envoyés "dans quelques heures" qui arrivent "quelques jours" après et, même, des emails qui "peuvent mettre plusieurs heures à arriver", selon l'opérateur lui-même. Pour retransmettre sa conférence de presse, Free a déployé 300 serveurs et 80 GB de bande passante. En a-t-il mis autant pour gérer ses clients ? A l'époque de la fibre optique et du cloud computing, Free Mobile semble décidément préférer les roulottes.
- La hotline débordée. On aurait pu croire que Free avait appris de ses erreurs lors du lancement de l'ADSL. Pas du tout : la hotline technique de l'opérateur est débordée. Le service commercial fait, lui, du mieux qu'il peut pour aider les clients en rade mais il n'a pas accès à la totalité des dossiers des clients. Impossible de rechercher un client par son numéro d'abonné mais uniquement par ses nom et prénom ainsi que son mail. Du coup les réponses sont franchement évasives "Votre carte SIM vous a été envoyée. – Quand ? – Récemment – Et quand vais-je la recevoir ? – Prochainement."
- La portabilité des numéros mal gérée. Dans certains cas, Free Mobile a engagé les procédures de portabilité des numéros avant d'envoyer les cartes SIM aux abonnés. Ces abonnés ont donc eu le malheur de voir leur numéro porté avant de recevoir leur carte SIM. Le résultat : plus de téléphone et un message bien sympathique "Le numéro que vous avez demandé n'est pas attribué" pour ceux qui essaient d'appeler les malheureux. Exemple : une portabilité le 17 janvier à 15h30 et une carte SIM envoyée... le même jour.
- Les nouveaux numéros ne sont pas mieux lotis. Free Mobile propose à ses clients n'optant pas pour la portabilité de choisir leur numéro, un service très pratique. Mais parfois la carte SIM que leur envoie l'opérateur ne correspond pas au numéro demandé. Alors quel est le bon numéro ? Les abonnés sont priés d'attendre une réponse.
- Aucun mode d'emploi digne de ce nom. Bienvenu au royaume de la simplicité. La carte SIM de Free Mobile n'est accompagnée d'aucun mode d'emploi. Du coup à la hotline, on prend soin d'indiquer aux clients : "lorsque vous recevrez votre carte SIM votre code PIN sera 1234". Une précision qui n'est pas inutile car ledit code n'est inscrit qu'en tout petit au dos du support de la carte SIM. De même, le numéro de la messagerie (666) n'est même pas indiqué dans la lettre accompagnant la carte SIM. Il faut le trouver au fond d'une FAQ. Il n'est pas non plus enregistré dans la carte SIM.
- Le suivi conso est en option. Alors que Free prépare son lancement de longue date, l'opérateur n'a pas trouvé le temps de proposer un service de suivi conso à ses clients depuis leur mobile. Celui-ci serait disponible sur le site mais cela reste encore à prouver (nous n'avons pas pu le vérifier). Or, le suivi conso est tout particulièrement utile aux forfaits à 0 ou 2 heures (non illimités). Ces abonnés ne peuvent pas accéder au site Web de suivi conso depuis leur portable ... sauf à payer car leur forfait ne comprend qu'un minimum de trafic données. Si la mamie du Cantal peut être séduite par le forfait Free Mobile elle n'a pas forcément un accès Internet pour voir combien ça lui coûte...
- La gestion multi lignes relève du casse-tête. Ceux qui ont réussi à activer leur forfait sans trop de problèmes pourraient être tentés d'en faire profiter leurs proches. Mauvaise idée, car la procédure est plutôt complexe. D'emblée, s'ils ont un compte Freebox (et un forfait à 15,99 euros), le plus logique serait de souscrire d'autres forfaits à partir de leur compte. Pas de chance : "Si vous avez effectué plusieurs inscriptions depuis un même compte Freebox, seule la première est prise en compte", précise l'opérateur. Qui n'a visiblement pas prévenu toutes les personnes dans ce cas. La solution est donc de souscrire des forfaits indépendants les uns après les autres. Et comment les centraliser dans une même interface ? Le service client a la solution : "Nous vous invitons à réaliser des inscriptions individuelles avec le même RIB, ce qui vous permettra de les rattacher au compte principal prochainement". Ou, traduit en Français : "on va bricoler un truc bientôt"
- Les services qui fonctionnent à moitié. Xavier Niel était très fier d'annoncer que l'iPhone serait disponible chez Free dès son lancement... ou presque car le terminal d'Apple ne sera disponible qu'à la fin du mois. Et ceux qui sont déjà propriétaires d'un iPhone devront patienter pour utiliser la messagerie visuelle. Celle-ci n'étant pas prête. Car Free Mobile qui sait qu'il va se lancer depuis deux ans n'a sans doute pas eu le temps de mettre en place la messagerie visuelle de l'iPhone. Pour ceux qui préfèrent le Blackberry, l'option Blackberry a 1 euro n'est, elle non plus, pas disponible lors de la commande.
Xavier Niel aime à être présenté comme un Robin des Bois. Il devrait pourtant savoir que l'un des seuls faits presque avérés de cette fable est que les habitants du comté de Nottingham étaient effectivement très pauvres... à cause de l'insécurité physique et financière causée par Robin des Bois, qui avait fini par chasser dudit comté les employeurs des habitants.
[EDIT] Pour les commentateurs : tout n'est pas tout noir ou tout blanc. On peut se féliciter du coup de pied dans la fourmilière tarifaire et dire "Bravo Free" mais cela n'excuse pas les multiples approximations de la gestion des clients...