Pénibilité : Comment la mesurer et agir là où ça fait mal ?

Les datas sciences, l'intelligence artificielle et les nouvelles technologies connectées se mettent au service des salariés et des entreprises en s'intéressant aux problématiques de la pénibilité.

Enjeux majeurs de cette réforme des retraites si contestée, la pénibilité au travail et l’usure professionnelle liées à l’activité physique de certains métiers impactent autant les salariés que la vie des entreprises françaises exposant les uns et les autres à de lourdes séquelles et conséquences. Alors que les risques et les enjeux liés à la désinsertion professionnelle sont énormes, les datas sciences, l’intelligence artificielle et les nouvelles technologies connectées se mettent au service des salariés et des entreprises en s’intéressant aux problématiques de la pénibilité : Comment l’identifier ? Comment soulager les travailleurs?

Pénibilité au travail : comment l’évaluer ?

La pandémie a eu une incidence positive sur l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée. Les attentes professionnelles évoluent et les salariés n’ont plus envie de laisser leur travail nuire à leur santé alors la reconversion devient la norme. En effet, 87% des maladies professionnelles en France sont liées à des troubles musculosquelettiques dits TMS et représentent environ 20% des arrêts de travail. 

Une facture salée qui coûtait déjà en 2017 près de deux milliards d'euros aux entreprises, au travers de leurs cotisations accidents du travail et maladies professionnelles. Pourtant c’est cette même année que la loi du 1er octobre entérine définitivement le terme ‘pénibilité‘ du Code du travail pour ‘facteurs de risques professionnels’ avec obligation légale de les prévenir. Si la prescription d’arrêts maladie baisse significativement pendant le Covid-19 (38% et 36% respectivement en 2021 et 2020), en 2022 la courbe s’affole. Ce sont 42% des salariés qui ont été en arrêt maladie au moins une fois dans l’année avec une durée moyenne des arrêts longs de 97 jours. Ainsi, ce sont 64% des entreprises qui ont fait face à un arrêt long au cours de l’année (contre 60% en 2020). Les secteurs de l’industrie, du BTP et de la santé sont en haut du podium. 

Des initiatives gouvernementales visent à encadrer la prévention, optimiser le suivi et autoriser les départs anticipés grâce entre autres à : 

  • un compte professionnel de prévention est disponible pour tous salariés exposé à l'un des 6 facteurs de risque professionnel identifiés par l’État ; 
  • un congé de reconversion professionnelle permet à tout titulaire dont le métier est considéré comme exposé à la pénibilité et à l’usure de s’arrêter pour se former grâce à une formation financée ;
  • un suivi médical renforcé à partir de 45 ans, est désormais offert par la Loi Santé et Travail de 2021. 

Les nouvelles technologies au service de la prévention des risques 

Absences répétées, salariés en souffrance, perte de productivité en entreprise ou au sein des institutions : le suivi rapproché des salariés exposés à la pénibilité et à l’usure professionnelle (charges lourdes, stress, travail de nuit, en équipe successive ou poli-exposé…) n’est plus à débattre. Pour les entreprises et organisations, il ne s’agit plus d’une option : elles ont l’obligation de diminuer cette pénibilité en agissant sur les facteurs de prévention et de gestion des risques avant que l’usure ne s’installe. 

Trois types de solutions pour réduire la pénibilité :  

  • Innovations techniques et matérielles : en optant pour des outils, matériaux adaptés à la discipline professionnelle des salariés afin d’améliorer leurs conditions de travail : machines anti-vibrations, anti-bruit, fixées ou suspendues pour éviter de porter les charges lourdes, poignées non-glissantes de guidage et maintien, ajustement et ergonomie des plans de travail, des bureaux pour éviter les postures pénibles.
  • DeepTech : Les acteurs de la deep-tech et de la med-tech améliorent aujourd’hui considérablement la prise en compte de la pénibilité au travail grâce, par exemple, à des capteurs connectés qui écoutent la vibration produite par les muscles pendant l'effort et les traduisent en indicateurs d'effort et de fatigue. Les exosquelettes, quant à eux, assistent l'opérateur dans certaines tâches afin de le soulager. D’autres solutions encore permettent de générer un avatar en 3D grâce à une mini caméra équipée de capteurs infrarouges qui repère un certain nombre de points sur sa silhouette du travailleur afin d’identifier les points de tension. Les innovations à disposition des chefs d’entreprise sont nombreuses et variées. 
  • Organisation et formation : Les conditions de travail doivent être réfléchies et adaptées pour une organisation saine et claire : prise en compte des horaires, des postures pénibles et gestes répétitifs, des rotations d’équipes, évaluation du temps passé dans un environnement météorologique chaud, froid ou sonore bruyant, limitation du travail physique intense et du port de charges lourdes, temps de repos… Elles sont la clé de voûte du bien-être, de la santé et de la longévité des salariés exposés à la pénibilité au travail. 

Il n’est plus envisageable de reléguer les démarches de prévention des risques professionnels au second plan, au profit d’une approche réparatrice en fin de carrière qui se contenterait de prendre acte de l’état d’usure du salarié aux portes de la retraite. L’objectif est désormais de trouver un équilibre entre ces deux initiatives en tirant profit des innovations technologiques à disposition. Autant d’outils à portée des chefs d’entreprises pour rendre attractif et recruter dans des métiers réputés difficiles et pénibles.