La Cnil oppose une fin de non recevoir à Google

La Cnil vient de rejeter le recours gracieux de Google à l'encontre de la décision de l'Autorité qui avait condamné le moteur de recherche à appliquer le "droit à l'oubli" sur toutes les extensions de son site. Un coup dur pour le géant de la recherche sur internet.

Pour mémoire, par un arrêt du 13 mai 2014, la Cour de Justice de l'Union européenne a considéré que les internautes disposaient d'un droit au "déréférencement" sur les moteurs de recherche et pouvaient donc demander à l'exploitant du moteur de supprimer certains liens les concernant s'ils leur causent préjudice. Il est entendu que ce droit au déréférencement ne permet pas de supprimer les contenus qui posent problème (par exemple des articles de presse), mais uniquement les occurrences parmi les résultats des moteurs de recherche.

En application de cette décision, Google a mis en place un formulaire de demande de déréférencement, mais elle estime qu'elle ne peut être contrainte de faire droit aux requêtes qu'elle reçoit que vis-à-vis des versions européennes de son moteur, ce qui exclut nécessairement les résultats sur www.google.com, par exemple.

La CNIL n'est pas de cet avis et a adressé une mise en demeure à Google le 12 juin 2015, pour lui enjoindre d'étendre le droit au déréférencement à l'ensemble des extensions de son moteur. A la suite de la réception de cette injonction, Google a formé un recours gracieux devant la Présidente de la CNIL afin de lui demander de retirer cette mise en demeure. 

Cependant, Madame Isabelle Falque-Pierrotin, Présidente de la CNIL, a décidé de rejeter ce recours. Elle fonde sa décision de rejet sur l'idée principale selon laquelle le moteur de recherche met en oeuvre un seul et même traitement de données à caractère personnel, indépendamment des extensions du moteur, qui ne constituent qu'un moyen d'accéder aux résultats de la recherche. 

Il s'agit également pour la CNIL d'éviter qu'il ne puisse être dérogé au droit au déréférencement, en maintenant l'affichage de liens gênants pour les internautes sur d'autres extensions, dont certaines sont particulièrement utilisées, comme le ".com". 

Dans sa décision, la Présidente de la CNIL a tenu à répondre à l'argument de Google, qui considère que l'injonction de la CNIL aurait un effet extra-territorial, et même mondial, qui dépasse les limites de la France et, partant, de la compétence d'une autorité nationale. Selon la Présidente de la CNIL, sa décision vise uniquement à faire appliquer le droit européen par un acteur non européen qui décide d'offrir ses services en Europe.

Il est vrai que la décision de la CNIL est conforme à une recommandation du Groupe de l'Article 29, c'est-à-dire l'ensemble des autorités nationales en matière de protection des données à caractère personnel.

Maintenant, que peut faire Google ? Si elle ne défère pas à la mise en demeure de la CNIL, elle pourra faire l'objet d'une procédure de sanction, notamment d'une sanction pécuniaire, mais également d'une mesure d'interdiction de mettre en oeuvre le traitement de données contesté, ce qui pourrait théoriquement aboutir à une fermeture de Google. Les décisions de sanction de la CNIL peuvent alors faire l'objet d'un recours devant le Conseil d'Etat.

On imagine bien que l'affaire n'est pas terminée !