Performance Max de Google : du bon… et du flou

Performance Max de Google : du bon… et du flou Fortement décriée par son manque de transparence, la solution publicitaire lancée il y a un an peut procurer des résultats intéressants.

Après plus d'un an d'utilisation de Performance Max, la solution d'activation automatisée de campagnes sur l'ensemble des réseaux publicitaires de Google (search, gmail, shopping, YouTube, Maps et display), marques et agences françaises semblent y voir plus clair : si les résultats sont au rendez-vous pour les campagnes de conquête à la performance notamment, les lacunes restent nombreuses. Pour vraiment tirer parti de Performance Max, qui reste à ce jour marginal dans les investissements des agences que nous avons consultées, l'annonceur devra apprendre à contourner les limites imposées par Google.

"Dans les campagnes de génération de leads en revanche, les contacts fournis ne transforment pas bien"

"Pour les marques en quête de performance, l'intérêt de Performance Max est de leur permettre d'être présentes sur tout le parcours client, de la considération à la performance, avec un set-up très simple. Le point négatif, c'est le côté black box de l'outil qu'il faut savoir gérer", explique Eric Le Page, directeur du pôle search chez 79. L'outil est si simple qu'il paraît magique, d'autant que, pour booster les ventes et des réservations, notamment auprès de nouveaux clients, généralement ça marche. "Pour les clients qui ne se posent pas trop de questions et qui veulent vendre plus, ça marche, mais sans qu'on sache en amont ni où ni comment la campagne est diffusée et sans qu'on puisse comparer ses performances avec d'autres leviers. De plus, si cela performe bien aujourd'hui, c'est parce que c'est un levier nouveau. On peut se demander si ces performances vont se maintenir sur le long cours", s'interroge Mathieu Chapon, fondateur et directeur de l'innovation chez Peak Ace (groupe Heroiks), agence conseil en marketing digital à la performance. "Dans les campagnes de génération de leads en revanche, les résultats sont plutôt décevants car les contacts fournis ne transforment pas bien", ajoute Guillaume Loiseau, directeur des médias chez ESV, agence de marketing digital.

Concrètement, l'annonceur renseigne sur Performance Max ses objectifs en termes de ventes ou de leads, choisit un montant à investir pour sa campagne, indique le coût d'acquisition par clic (CAC) maximum, informe les segments d'audience qu'il souhaite toucher et injecte, s'il le peut, ses propres données propriétaires de type CRM et flux produits. Puis il n'a plus qu'à uploader ses créas (texte, image, vidéo) et appuyer sur le bouton : Google s'occupe de tout. "On pourrait imaginer que c'est le produit idéal pour tous ceux qui ne sont pas accompagnés d'experts ou d'agences comme les TPE. Sauf que pour bien fonctionner, l'outil demande quelques semaines d'investissements, le temps que ses algorithmes s'entraînent et commencent à fournir des résultats", tempère Mathieu Chapon.

Adieu à la brand safety

Le principal souci de Performance Max est encore ailleurs : dans l'absence de transparence sur les leviers employés par Google. "On navigue dans le brouillard, n'ayant pas la main sur le paramétrage de la campagne, et notamment sur les sites où elle est diffusée, ce qui pose de sérieux problèmes, à commencer par la brand safety. Il faut faire confiance à Google… ce que beaucoup de nos clients ne souhaitent pas. Certains ont même déjà eu des problèmes d'affichages non désirés à leur clients sur Gmail par exemple", raconte Mathieu Chapon. Chez Peak Ace, 20% seulement des clients ont souhaité tester Performance Max et la majorité n'en fait depuis qu'un usage tactique et ponctuel.

Sans que l'annonceur ne sache ni comment ni à quelle proportion, ses créas circuleront théoriquement sur une sélection parmi les millions de sites web du réseau display de Google. À la fin, il pourra accéder à des reportings des plus sommaires, dont l'historique est de 28 jours maximum, contenant le nombre de conversions obtenues, le coût par action (vente, lead, clic, etc.) et le taux de conversion au global. Mais il ne saura pas à quelle proportion sa campagne a été diffusée sur les différents leviers et ne connaîtra pas non plus ni les montants précis investis sur chaque levier ni les retours obtenus sur ces derniers. "Si l'annonceur ne fait rien et qu'il se contente d'un CPA bas, il peut être sûr que son annonce ne sera pas affichée sur les premiers résultats du moteur de recherche. Pour optimiser au maximum, Google cherchera plutôt à diffuser la campagne sur des leviers moins chers que le search, qu'il souhaite faire travailler, par exemple sur le réseau display et sur YouTube", avertit Mathieu Chapon.

"On navigue dans le brouillard, n'ayant pas la main sur le paramétrage de la campagne, et notamment sur les sites où elle est diffusée"

Et même lorsque le search est activé, l'annonceur n'apprend pas de sa campagne puisqu'il n'est pas renseigné sur tous les mots-clés utilisés et qui ont fonctionné. "Ces informations sont pourtant fondamentales pour beaucoup d'annonceurs, ne serait-ce que pour leur permettre de comprendre les évolutions de leur marché et adapter leur catalogue de produits", déclare Raphaël Paillet, directeur du pôle clients chez ESV. Sans ces données, l'annonceur ne peut pas non plus défendre ses positions défensives ou offensives sur le search, puisque c'est Google et non lui qui choisit les mots-clés à préempter.

"Google est juge et partie : c'est lui qui distribue la performance et lui qui décide qui, de vous ou vos concurrents, va remporter l'enchère sur le search. De plus, l'enjeu pour Google, c'est de vendre ses inventaires invendus, chez YouTube et Discovery, qu'il va noyer dans le lot", confirme Guillaume Loiseau. Chez ESV, entre 10% et 30% des budgets sont investis sur l'outil mais essentiellement à de fins de conquête et uniquement en dehors du périmètre déjà maîtrisé par l'agence. "La notion de maîtrise est clé : si par exemple l'annonceur veut être présent sur YouTube, il a beaucoup plus intérêt à travailler une créa adaptée à ce format et à ces audiences plutôt qu'à avoir recours à Performance Max", insiste Raphaël Paillet. "Performance Max, c'est du volume et de l'automatisation mais sans la maîtrise ni la qualité, ce qui peut être très nuisible pour l'image de marque", conclut Guillaume Loiseau.